Vers un baril à 150 dollars ?
L’escalade entre l’entité sioniste et l’Iran pèse sur un marché pétrolier déjà tendu par un resserrement de l’offre et les tensions sur l’offre russe de produits raffinées induite par les attaques de drones ukrainiens contre les installations russes. Les acteurs du marché s’attendent à ce que les cours du brut ouvrent aujourd’hui en hausse, alors que les prix du Brent s’approchent du seuil des 100 dollars. Alors que la tendance à la hausse des cours est partie pour durer, les analystes n’excluent pas la possibilité de voir un baril à 150 dollars, si l’escalade se poursuit au Moyen-Orient. Une possibilité d’ailleurs évoquée au mois de novembre dernier par la Banque mondiale.
Des analystes ont d’ailleurs déclaré hier à l’agence de presse britannique Reuters que les derniers développements au Moyen-Orient, notamment la riposte samedi soir de l’Iran à l’attaque de son ambassade à Damas par l’entité sioniste devrait peser sur le marché dès aujourd’hui. Ils prévoient ainsi une hausse des prix. Il faut dire que la crainte d’une réponse de l’Iran à la frappe contre son ambassade à Damas a soutenu le pétrole la semaine dernière et a contribué à faire grimper le Brent, la référence mondiale, vendredi à 92,18 dollars le baril, au plus haut depuis octobre, tandis que les contrats à terme sur le brut de référence américain West Texas Intermediate ont augmenté de 64 cents à 85,66 dollars, à la veille de fermeture des marchés pour le week-end. »Il est raisonnable de s’attendre à des prix plus élevés lorsque les échanges reprennent », a déclaré Tamas Varga, courtier en pétrole chez PVM. » « Les prix du pétrole pourraient augmenter à l’ouverture car c’est la première fois que l’Iran frappe Israël depuis son territoire », a déclaré l’analyste de l’UBS Giovanni Staunovo. La hausse risque d’être de longue durée. Il faut dire qu’une extension d’une conflit induit par l’agression israélienne contre Ghaza dans une région qui compte 30% de la production mondiale de pétrole, 40% des réserves mondiales prouvées et surtout 60% des super-gisements de pétrole risque d’avoir un impact majeur sur le marché. Au-delà, plusieurs facteurs doivent être pris en compte. Il s’agit en premier lieu des conséquences de la récentes escalades sur les relations entre Washington et l’Iran qui se sont récemment améliorées, se traduisant par une hausse des exportations iraniennes de pétrole de brut.
Une baisse des exportations iraniennes entraînerait une nouvelle hausse des prix du pétrole.
Les analystes pointent du doigt également l’évolution de la situation dans le détroit stratégique d’Ormuz, après la saisie samedi par l’Iran d’un navire appartenant à un homme d’affaire israélien. Un détroit par lequel passe environ un cinquième du volume de la consommation mondiale totale de pétrole chaque jour. Le commandant de la marine des Gardiens de la révolution iranienne a déclaré mardi que Téhéran pourrait fermer le détroit si cela était jugé nécessaire. « Les prix du pétrole incluaient déjà une prime de risque, et dans quelle mesure elle s’élargira dépend presque exclusivement des développements près de l’Iran autour du détroit d’Ormuz », a déclaré Ole Hansen de Saxo Bank. Il faut dire que ces facteurs géopolitiques associés à d’autres tensions géopolitiques, notamment en mer Rouge, mais aussi en Russie, peuvent pousser encore les prix vers le haut. Le scenario pessimiste prédit par la Banque mondiale au mois de novembre dernier et qui évoque la possibilité d’un baril à plus de 150 dollars en cas d’escalade au Moyen-Orient ne semble pas si lointain. Pour rappel, la BM avait averti que « le conflit au Proche-Orient vient s’ajouter au plus gros choc sur le marché des matières premières depuis les années 1970 provoqué par l’invasion russe de l’Ukraine ». « Les décideurs politiques doivent être vigilants. Si le conflit (entre Israël et le Hamas, ndlr) devait gagner en intensité, l’économie mondiale devrait faire face à un double choc énergétique pour la première fois depuis des décennies », prévenu la BM. Celle-ci a prédit qu’en cas d’impact limité du conflit, le prix du pétrole pourrait monter de 3% à 13%, pour atteindre entre 93 et 102 dollars. Dans le scénario médian, le pétrole atteindrait une fourchette comprise entre 109 et 121 dollars. Dans le scénario du pire, le pétrole atteindait des sommets, entre 140 et 157 dollars, soit potentiellement supérieur au record absolu de 147,50 dollars, observé en 2008.
La tendance à la hausse va durer
De son côté, l’expert algérien en énergie, Baghdad Mendouch, a indiqué hier sur les ondes de la Radio nationale que « l’ensemble des facteurs en relation avec les fondamentaux du marché sont favorables au maintien à la hausse des prix du pétrole, notamment les réductions de l’Opep+ et la hausse de la demande tirée de la croissance de l’économie mondiale, essentiellement de la Chine, de l’Inde et des Etats-Unis ».
S’agissant de la demande mondiale, l’expert a souligné que celle-ci va augmenter surtout durant l’été qui est une période de grande mobilité et d’utilisation de tous les modes de transports, terrestres et aériens. En outre, la situation en mer Rouge a impacté le fret maritime, « où les navires commerciaux sont obligés de faire des détours, ce qui implique plus de temps et de distance avec une importante consommation de gasoil. C’est un facteur important qui faudrait rajouter à l’analyse sur les prix », a précisé cet ancien PDG d’une filiale de Sonatrach .
Les raisons de la tendance haussière du prix du pétrole sur les marchés mondiaux sont également liées aux facteurs géopolitiques actuels, a ajouté M. Mendouch évoquant notamment la situation au Proche-Orient et la riposte de l’Iran contre l’entité sioniste qui vont peser encore sur les prix de l’or noir. L’appréciation du marché pétrolier est soutenue aussi, selon lui, par les analyses faites par des experts de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) qui tablaient sur une hausse de la consommation mondiale de pétrole autour de 104,5 millions de barils jour en 2024, tandis et l’AIE, organisation qui défend les consommateurs, s’attendait à ce que la demande variera entre 100 et 102 millions de barils/j.
Samira Ghrib