Nouveaux codes de la commune et de wilaya: Le Parlement se penche sur les propositions de la commission Ould Kablia
Les deux chambres du Parlement ont lancé le processus d’examen des avant-projets de loi relatifs aux codes de la commune et de la wilaya, marquant ainsi une étape cruciale dans la réforme des collectivités locales promise par le président de la République Abdelmadjid Tebboune. Cette révision, attendue depuis novembre 2021, vise à moderniser la gouvernance locale et à répondre aux défis économiques et sociaux auxquels font face les collectivités territoriales.
Le processus de révision a été initié au début du mois d’octobre 2024, lorsque le Président Tebboune a procédé à l’installation du Comité national pour la révision des lois sur la commune et la wilaya, concrétisant ainsi l’un de ses engagements de campagne. Pour piloter cette réforme majeure, le chef de l’État a fait appel à Dahou Ould Kablia, ancien ministre de l’Intérieur et figure expérimentée de l’administration territoriale, ayant occupé successivement les fonctions de wali, sénateur et ministre délégué chargé des collectivités locales de 2001 à 2010. La commission présidée par Ould Kablia, composée de 30 membres dont 20 élus et 10 représentants de l’administration, a rendu ses conclusions. Les avant-projets sont désormais entre les mains des parlementaires qui disposent d’un délai d’un mois pour les enrichir avant leur présentation en Conseil des ministres. Le Conseil de la Nation a ainsi mis en place hier son groupe de travail sous la présidence d’Ahmed Kherchi, tandis que l’Assemblée populaire nationale a installé sa propre commission. Les modifications proposées pour le code communal visent à introduire une nouvelle approche de la gouvernance locale, sans pour autant bouleverser radicalement l’architecture institutionnelle existante. Selon les premiers éléments révélés par nos confrères du quotidien Horizons, le texte propose notamment une nouvelle classification des communes en trois catégories : urbaine, semi-urbaine et rurale, basée sur des critères géographiques, démographiques, économiques et financiers. Cette catégorisation vise à mieux adapter les politiques publiques aux réalités du terrain et à garantir un accompagnement plus efficace de l’État aux communes à faibles ressources. En matière de gouvernance, l’avant-projet introduit des modifications significatives dans le mode d’élection du président de l’Assemblée populaire communale (APC). Désormais, le candidat qui obtient la majorité des voix des électeurs sur la liste ayant reçu le plus grand nombre de suffrages sera automatiquement désigné, abandonnant ainsi le système actuel basé sur les alliances post-électorales et qui a causé de nombreux dysfonctionnements aboutissant au problème de blocage des APC. Une innovation notable concerne les situations d’égalité des voix, où la préférence sera donnée au candidat le plus jeune, ou à une femme candidate en l’absence d’élément jeune. Le texte prévoit également une réduction du nombre de vice-présidents, plafonné à quatre pour les communes de plus de 100.000 habitants, dans le but d’assurer une plus grande stabilité des assemblées. Les élus bénéficieront d’une protection juridique renforcée, ne pouvant être arrêtés qu’après une condamnation judiciaire, tandis que les poursuites contre le président de l’assemblée et ses adjoints seront soumises à l’avis préalable du wali.
Un aspect novateur du projet réside dans l’introduction d’un mécanisme participatif de planification stratégique du développement, baptisé « Plan de développement participatif communal ». Cette approche sera renforcée par la création d’un organe consultatif composé de citoyens désignés en assemblée générale, chargé de proposer des plans de développement à l’exécutif communal.
Rééquilibrer les pouvoirs
Concernant la wilaya, l’avant-projet vise à rééquilibrer les pouvoirs entre les élus et l’exécutif. Le président de l’Assemblée populaire de wilaya (APW) se verra attribuer le pouvoir d’ordonner le financement d’opérations dans le cadre de l’exécution du budget de l’État, particulièrement dans les secteurs ayant un impact direct sur la vie des citoyens. L’APW pourra également créer des institutions publiques locales et économiques pour stimuler le développement territorial et accompagner les porteurs de projets. La nouvelle gouvernance financière proposée permettra aux wilayas de souscrire des emprunts pour mettre en œuvre des projets générateurs de revenus. Le texte précise également le statut du wali comme agent de haut rang de l’État et rétablit le Conseil exécutif de la wilaya sous son autorité. Une attention particulière est portée à la capitale du pays, dont l’organisation et le fonctionnement seront régis par une loi fondamentale spéciale, reconnaissant ainsi son rôle de centre politique, institutionnel et économique aspirant à une dimension méditerranéenne et internationale. Les deux chambres du Parlement disposent maintenant d’un délai relativement court pour enrichir ces textes qui devraient contribuer à moderniser la gestion des collectivités locales, tout en préservant le rôle central de l’État dans l’administration territoriale.
Hocine Fadheli