Culture

Journée du manuscrit arabe : Vers la restauration de 3.000 documents

À l’occasion de la Journée arabe du manuscrit célébrée le 4 avril, le ministre de la Culture et des Arts, Zouhir Ballalou, a mis en lumière les efforts considérables déployés par l’Algérie pour préserver son riche patrimoine manuscrit.

Lors d’une visite officielle au service des manuscrits et au laboratoire de restauration de la Bibliothèque nationale d’Algérie (BNA), le ministre s’est montré particulièrement satisfait des avancées réalisées dans ce domaine patrimonial stratégique. « Ces opérations se déroulent grâce aux techniques de pointe, sous la supervision de techniciens et d’experts qui veillent à assurer une restauration et une numérisation régulières ayant concerné à ce jour le tiers de ces trésors », a-t-il déclaré avec enthousiasme face aux collections précieuses de la bibliothèque. Cette visite s’inscrit dans un contexte où l’Algérie intensifie ses efforts pour protéger son patrimoine culturel écrit, héritage inestimable souvent menacé par les conditions de conservation inadéquates, le vieillissement naturel des supports, et parfois le trafic illicite de biens culturels. Le ministre a d’ailleurs souligné cette réalité historique douloureuse en rappelant que « pendant la période coloniale, il y a eu une hémorragie de manuscrits dont une importante collection a été transférée à l’étranger et se trouve aujourd’hui aux enchères publiques et privées ». L’engagement national en faveur de la préservation de ce patrimoine se traduit par des programmes ambitieux, comme l’a précisé M. Ballalou en annonçant « un programme de restauration de 30000 documents manuscrits durant l’année en cours ». Un bilan encourageant a également été présenté : « La BNA et le Centre national des manuscrits (CNM) d’Adrar ont procédé, l’année dernière, à la restauration de 17000 documents et l’opération se poursuit toujours ». Ces chiffres impressionnants témoignent d’une véritable politique nationale de sauvegarde, le ministre ne cachant pas sa satisfaction quant aux résultats déjà obtenus : « La restauration et la numérisation du tiers de ces manuscrits est en lui même un exploit dont nous sommes fiers ».

La richesse du patrimoine manuscrit algérien est considérable. Selon les informations fournies lors de cette visite, la BNA abrite « un trésor d’ouvrages rares dans le monde, qui font partie du patrimoine détenu par les établissements du secteur de la culture, avec 10000 manuscrits répartis entre la BNA et le CNM d’Adrar ». Parmi ces trésors, Mme Benyahia Fatouma, responsable du service des manuscrits et ouvrages rares à la Bibliothèque, a mis en avant la présence de 6902 manuscrits à la BNA, dont le plus ancien daterait du IIe siècle de l’Hégire. Ce manuscrit particulièrement précieux comporte des versets coraniques écrits sur du peau de gazelle en calligraphie Kufi irakienne, illustrant la diversité et la valeur historique exceptionnelle de ces collections. Le ministre a également insisté sur l’importance de la coopération interinstitutionnelle dans cette entreprise patrimoniale. Les opérations de restauration et de numérisation bénéficient de « la conjugaison des efforts du ministère de la Culture et des Arts, du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs et du Centre national des archives ». Il a par ailleurs salué « le rôle des responsables des armoires qui veillent à protéger leurs ouvrages et lutter contre la vente illicite et le pillage de ces manuscrits qui font partie intégrante du patrimoine national ». Conscient que la préservation de ce patrimoine nécessite une expertise technique spécifique, Zouhir Ballalou a souligné la « nécessité de soutenir ces efforts en invitant les étudiants de l’Ecole nationale supérieure de conservation et de restauration des biens culturels (ENSCRBC) à travailler avec la BNA pour former des techniciens dans le domaine ». Cette approche vise à développer les compétences nationales en matière de conservation préventive et de restauration de documents anciens. Le ministre a également profité de cette occasion pour lancer un appel aux détenteurs privés de manuscrits, les invitant à « se rapprocher de la BNA et du CNM d’Adrar afin de protéger et de numériser ce patrimoine, car ce sont des trésors qui reflètent l’histoire de l’Algérie ». Cette démarche participative témoigne de la volonté d’élargir le champ d’action des institutions publiques en matière de préservation du patrimoine manuscrit.

12 dossiers soumis à l’UNESCO

La reconnaissance internationale de ce patrimoine constitue également un axe important de la politique culturelle algérienne. M. Ballalou a annoncé avec fierté que « l’Algérie avait inscrit deux manuscrits au Registre Mémoire du monde de l’UNESCO, à savoir ‘Al-Mustamlah min Kitab Al-Takmila’ d’Ibn Ahmad Ibn Uthman Ibn Qaymaz Al-Dhahabi, et ‘Al-Qanun fi Al-Tibb’ d’Ibn Sina ». Ces inscriptions valorisent des œuvres majeures du patrimoine intellectuel arabe et islamique conservées en Algérie. Cette politique de sauvegarde des manuscrits s’inscrit dans une stratégie plus large de valorisation du patrimoine culturel algérien sur la scène internationale. Le ministre a d’ailleurs évoqué d’autres initiatives patrimoniales en cours, notamment le dépôt récent du dossier d’inscription de « l’art de l’ornementation avec des bijoux en argent émaillé de l’habit féminin de la région de Kabylie : fabrication, conception et port » sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. Il a affirmé que cette démarche constitue « un pas important en matière de diplomatie culturelle algérienne ». Poursuivant sur cette dynamique, M. Ballalou a précisé que l’Algérie a désormais déposé « deux dossiers relatifs au patrimoine culturel immatériel, à savoir le zellige et l’habit et bijoux kabyles, pour examen lors des prochaines sessions ». Les ambitions ne s’arrêtent pas là, puisque le ministère compte également « déposer 12 dossiers concernant le patrimoine culturel matériel afin de mettre à jour la liste indicative inscrite au nom de l’Algérie auprès de l’UNESCO ». Pour conclure, le ministre de la Culture et des Arts a replacé ces différentes initiatives dans une perspective stratégique nationale, affirmant que cette dynamique patrimoniale s’inscrit dans le cadre de « la sécurité culturelle et de la protection du patrimoine national algérien authentique », ainsi que « la valorisation et l’intégration de ce patrimoine dans la dynamique socioéconomique du pays ».

Mohand Seghir

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