Culture

« Alger, Capitale de la Culture Hassaniya » : Le cinéma au service d’un patrimoine en péril

La culture Hassaniya trouve dans le septième art son plus fidèle ambassadeur et son plus précieux archiviste. C’est le message fort qui a émané lundi d’une conférence organisée au Palais de la Culture « Moufdi-Zakaria » d’Alger, dans le cadre de la clôture de la manifestation « Alger, Capitale de la Culture Hassaniya » 2025.

Réunissant des cinéastes et critiques d’Algérie, de Mauritanie et du Sahara Occidental, cette rencontre a révélé l’ampleur du défi que représente la préservation d’une culture nomade dispersée sur un territoire immense, mais unie par une langue et des traditions millénaires.

L’espace de la culture Hassaniya, qui s’étend des confins algériens aux rivages atlantiques mauritaniens en passant par les territoires sahraouis, constitue un laboratoire culturel unique où se mélangent influences berbères, arabes et africaines subsahariennes. Cette richesse patrimoniale, longtemps transmise par l’oralité, trouve aujourd’hui dans le cinéma un nouveau souffle de modernité. Le réalisateur algérien Mohamed Mohamedi a particulièrement insisté sur cette dimension lors de sa présentation intitulée « La dimension linguistique du dialecte hassaniya et son utilisation cinématographique », estimant que le cinéma « a grandement contribué à faire connaître la richesse du patrimoine culturel matériel et immatériel de la Hassaniya » et qu’il constitue « une fenêtre importante pour comprendre la vie sociale et spirituelle des sociétés hassanophones en Algérie, en Mauritanie et au Sahara Occidental ».

Cette approche documentaire prend une dimension particulièrement politique dans le contexte sahraoui, où le cinéma devient un instrument de résistance et de mémoire. L’écrivain et critique Mohamed Lamine Said a souligné que le cinéma représente « un outil essentiel pour documenter la lutte et la résistance du peuple sahraoui contre l’occupation marocaine, et transmettre la réalité, éveiller la conscience et préserver également l’identité, la mémoire, le patrimoine culturel et les traditions populaires hassaniennes au Sahara Occidental ». Cependant, les intervenants ont également mis en garde contre les dérives d’une représentation occidentale souvent réductrice de leur culture. Le réalisateur et acteur mauritanien Salem Dandou a développé une critique acerbe des productions européennes des décennies passées, dénonçant l’utilisation de la culture Hassaniya comme « matière visuelle folklorique qui renforce une conception orientaliste » dans les œuvres produites « entre les années soixante et quatre-vingt du siècle dernier par des réalisateurs français, belges et britanniques ».

Le réalisateur Mohamed Mohamedi a explicité sa démarche artistique en expliquant que son expérience cinématographique s’est concentrée sur « la mise en évidence de la richesse de la vie sociale, de l’héritage populaire, de la poésie, des expériences humaines et de leur relation avec la nature », considérant le cinéma comme « un moyen de documenter cette culture riche et de la transmettre au grand public ». Mohamed Rahal a complété cette réflexion en soulignant la capacité unique du cinéma à « mixer l’image, le son et la narration » pour documenter un patrimoine qui « reflète l’histoire et la culture des habitants du Grand Sahara, dans ses coutumes, traditions, langue parlée, musique et poésie ». Pour ce cinéaste algérien, l’acte de « filmer et stocker des scènes de la vie quotidienne, des célébrations, des rituels et des contes populaires » constitue « un outil idéal pour transmettre le patrimoine aux générations futures ».

Mohand Seghir

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