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83 prisonniers palestiniens libérés : Premier pas vers une paix incertaine à Ghaza

La première phase de l’accord de cessez-le-feu entre le mouvement de résistance palestinien Hamas et l’entité sioniste s’est concrétisée lundi 13 avec la libération de 83 prisonniers palestiniens de la prison d’Ofer, à l’ouest de Ramallah en Cisjordanie occupée. Cet événement majeur marque le début effectif de l’échange des détenus, mettant fin à deux ans d’agression génocidaire contre la bande de Ghaza et ouvrant une période chargée d’enjeux pour la région.

Selon l’accord élaboré sous l’égide du président américain Donald Trump, ce premier contingent de 83 prisonniers palestiniens libérés de la prison d’Ofer sera suivi de 167 autres émanant de la prison de Waktziot, dans le Néguev, pour un total de 250 détenus de longue durée, dont certains purgent des peines à perpétuité. En contrepartie, le Comité international de la Croix-Rouge a annoncé avoir reçu 20 prisonniers de guerre israéliens dans la bande de Ghaza, en 2 groupes distincts : 7 dans la matinée et 13 en début d’après-midi. Ces échanges symbolisent une rupture avec plus de deux années de conflit caractérisé par une destruction massive et des souffrances indicibles pour la population palestinienne.

Cependant, cette première libération ne constitue qu’une goutte d’eau face à l’ampleur de la crise humanitaire et carcérale. Selon les organisations palestiniennes de défense des prisonniers, plus de 11 000 détenus palestiniens demeurent incarcérés dans les geôles de l’occupation, subissant des conditions catastrophiques marquées par la torture systématique, la famine délibérée et la négligence médicale organisée. Le bilan humain s’avère particulièrement glaçant : environ 400 enfants croupissent dans les prisons d’Ofer et de Megiddo, tandis que le nombre de femmes détenues s’élève à 53, dont 2 filles originaires de Ghaza. Plus encore, quelque 3 380 détenus n’ont jamais comparu devant un tribunal, restant emprisonnés sans jugement en violation flagrante du droit international.

L’accord de cessez-le-feu prévoit également la libération de 1 718 prisonniers palestiniens arrêtés après le lancement de l’agression génocidaire sioniste du 7 octobre 2023, mais aussi l’accès à l’aide humanitaire massive et le retrait des forces d’occupation. Ces dispositions interviennent après 2 années de destruction systématique qui ont transformé Ghaza en cimetière à ciel ouvert. Le bilan officiel des autorités sanitaires palestiniennes s’élève à 67 869 martyrs et 170 105 blessés, la majorité étant des femmes et des enfants. À ces chiffres tragiques s’ajoute une famine qui a coûté la vie à 463 personnes, dont 157 enfants, depuis que l’occupation a imposé un blocus total aux convois humanitaires en mars dernier.

L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient a d’ailleurs lancé un appel pressant à l’entité sioniste pour qu’elle permette à l’agence onusienne d’acheminer l’aide humanitaire bloquée depuis des mois dans les entrepôts jordaniens et égyptiens. L’UNRWA, seul organisme disposant du réseau et de la confiance nécessaires pour opérer à l’échelle requise, exhorte les autorités d’occupation à laisser circuler les convois vitaux que Ghaza attendait depuis si longtemps. Cette demande reflète l’urgence de la situation, où chaque jour compte pour sauver des vies ravagées par 2 ans de siège impitoyable.

De son côté, l’Union européenne s’engage également dans le processus de reconstruction. La cheffe de la politique étrangère de l’UE, Kaja Kallas, a annoncé que l’Union était prête à relancer une mission civile chargée de surveiller le passage frontalier de Rafah entre Gaza et l’Égypte. Cette mission, qui avait été suspendue lors de l’intensification du conflit, jouerait un rôle crucial dans le soutien au cessez-le-feu et la consolidation de la paix. Kallas a souligné que la consolidation de la paix à Gaza pourrait s’avérer « extrêmement complexe », justifiant ainsi le besoin d’une présence internationale renforcée pour faciliter la mise en œuvre de l’accord.

Trump promet une paix par la force

Sur la scène politique internationale, le président américain Donald Trump s’est implicitement imposé en tant qu’architecte de cet accord. Arrivé aux terres occupées lundi matin, Trump a adressé un discours enflammé devant le Knesset, présentant cette fin de conflit comme un tournant majeur pour la région. Il a dénoncé la « haine amère » tout en réaffirmant que « l’Amérique appliquera la paix par la force », déclarant posséder « des armes que personne n’a jamais vues ». Cette rhétorique militariste contraste singulièrement avec le message de paix qu’il entend promouvoir. Il a également clamé que « la guerre est finie », une déclaration qui semble prématurée au regard des défis colossaux qui attendent Ghaza. Le président américain s’est vanté d’avoir mis fin à 8 guerres en 8 mois et promis de transformer les victoires militaires « contre le Hamas sur le champ de bataille en la grande victoire : la paix et la prospérité pour toute la région du Moyen-Orient ».

Questionné sur ses déclarations antérieures concernant la transformation de Ghaza en « Riviera du Moyen-Orient », Trump a éludé la question, reconnaissant que « les décombres doivent d’abord être enlevés et la destruction éliminée ». Lorsqu’une journaliste l’a confronté sur le fait que le Hamas se constitue en force de police , Trump a indiqué : « Nous leur avons donné l’autorisation. Ils le font parce qu’ils veulent arrêter les problèmes. Nous les avons autorisés. Nous leur avons demandé de surveiller pour s’assurer qu’il n’y a pas de graves crimes ou de problèmes. Nous voulons que la situation soit sûre ».

Le chemin vers une paix durable à Ghaza s’avère semé d’embûches. Bien que l’accord marque techniquement la fin des hostilités, il laisse sans réponse les questions cruciales concernant la reconstruction, le retrait des forces d’occupation, et surtout, la gouvernance future de la bande de Ghaza. La première phase de l’accord se concentre sur l’échange de prisonniers et l’acheminement de l’aide humanitaire, mais les phases ultérieures demeurent vagues et dépendront des négociations ardues qui attendaient les parties. Cependant, la question plus largement politique demeure ouverte : quel avenir pour la Palestine ? Le simple cessez-le-feu ne résout pas les problèmes structurels qui ont débouché sur 2 années de conflit. L’occupation reste en place, les colonies continuent de s’étendre en Cisjordanie, et les droits des Palestiniens demeurent largement niés. La libération des 250 prisonniers palestiniens représente certes un pas symbolique majeur, mais elle ne peut masquer les 11 000 autres qui demeurent derrière les barreaux, ni la nécessité d’une solution politique globale à la question palestinienne.

Lyes Saïdi

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