Violences faites aux femmes : L’Algérie renforce son arsenal juridique
Les autorités ont réaffirmé mardi leur engagement prioritaire dans la lutte contre les violences faites aux femmes, en mettant l’accent sur le renforcement du cadre réglementaire et des mécanismes de protection, lors d’une cérémonie officielle marquant la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, coprésidée par la ministre de la Solidarité nationale, Soraya Mouloudji, et le ministre de la Justice, Lotfi Boudjemaa.
Organisée sous le slogan « Le respect mutuel, un comportement civilisé et humain », cette rencontre a constitué l’occasion pour les autorités de dresser un bilan des avancées réalisées dans ce domaine et d’annoncer de nouvelles mesures visant à renforcer la protection des femmes et des filles contre toute forme de violence. L’événement a également permis de souligner la dimension intersectorielle de cette lutte, réunissant plusieurs départements ministériels autour d’un objectif commun de prévention et de protection. Dans son allocution, Soraya Mouloudji a souligné que cette journée représente « une occasion de renouveler l’engagement en faveur de la concrétisation des valeurs constitutionnelles consacrant la justice et l’égalité, à travers le renforcement de la protection et de la préservation du droit des femmes à vivre en sécurité », tout en « rejetant toute pratique attentatoire à leur dignité et entravant leur parcours et leur contribution à l’édification socioéconomique ». La ministre a insisté sur le fait que la protection des femmes et des filles contre toute forme de violence représente « la pierre angulaire de la construction d’une société unie, fondée sur le respect et l’égalité des chances ».
Numéro vert
Rappelant les instructions du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, relatives au renforcement de la protection de la femme, la ministre a évoqué les multiples efforts déployés par son secteur dans ce domaine. Parmi les dispositifs mis en place figure notamment le numéro vert 1026 dédié au signalement des cas de violence, qui permet aux victimes ou à leurs proches de lancer l’alerte de manière confidentielle et rapide. Le ministère a également élaboré plusieurs guides destinés à accompagner les femmes dans leurs démarches, à l’instar du « Guide de la prise en charge des femmes et des filles victimes de violence », du « Guide de l’autonomisation économique de la femme », ainsi que du « Guide juridique pour la protection et la promotion de la femme », réalisés en coordination avec le ministère de la Justice. Ces outils s’ajoutent aux plateformes numériques « Sanedcom » pour les conseils et orientations et « Himayati », cette dernière ayant fait l’objet d’un lancement officiel sous forme d’application mobile lors de la cérémonie. Ces dispositifs témoignent de la volonté des pouvoirs publics de moderniser les mécanismes de prise en charge et de les rendre plus accessibles aux victimes. Sur le plan juridique, le ministre de la Justice a mis en avant les avancées significatives réalisées dans le renforcement du cadre légal de protection des femmes. Lotfi Boudjemaa a souligné que son secteur a pris un ensemble de mesures conformément aux orientations présidentielles, notamment l’introduction de nouvelles dispositions dans le projet de code de procédure pénale offrant à la victime une protection supplémentaire. Le ministre a également annoncé la création d’une application informatique pour le suivi des statistiques relatives aux violences faites aux femmes, outil qui permettra une meilleure appréhension du phénomène et une adaptation plus fine des politiques publiques. Le ministre de la Justice a rappelé que le code pénal comprend « plusieurs dispositions destinées à lutter contre tous les comportements contraires aux valeurs de la société, et à protéger les femmes de toute forme de violence, qu’elle soit physique, verbale, psychologique ou économique ». Il a également mis en lumière les efforts déployés pour faciliter l’accès des victimes à l’assistance judiciaire devant les différentes juridictions, levant ainsi un obstacle majeur à la défense de leurs droits. Le magistrat a par ailleurs salué la coopération avec les organisations internationales, notamment celles relevant des Nations unies, à travers l’organisation de colloques et d’ateliers de formation destinés aux cadres et aux professionnels des différents secteurs confrontés à ce fléau. La dimension sanitaire de la prise en charge des victimes n’a pas été occultée lors de cette rencontre. Le ministre de la Santé, Mohamed Seddik Ait Messaoudene, dont l’allocution a été lue par le chef de cabinet, a affirmé que l’élimination de la violence à l’égard des femmes exige la conjugaison de tous les efforts, d’autant plus que la violence « constitue une préoccupation majeure au vu de ses répercussions dangereuses sur la santé mentale, psychologique et physique ». Le secteur de la santé veille ainsi à garantir une prise en charge sanitaire adéquate aux femmes victimes de violence, tout en renforçant les compétences des médecins et psychologues pour assurer le suivi et l’orientation des victimes. Le représentant du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, Mohamed Azzoug, a pour sa part indiqué que son institution « a adopté dans son programme de lutte contre la violence à l’égard des femmes la diffusion de la conscience religieuse, des valeurs de tolérance et du respect de la femme », œuvrant à travers les conseils scientifiques à « résoudre plusieurs problèmes familiaux » et veillant à « diffuser les fatwas condamnant la violence faite aux femmes ».
Une campagne nationale de 16 jours pour sensibiliser
Point d’orgue de cette journée de mobilisation, Soraya Mouloudji a annoncé le lancement d’une campagne nationale de sensibilisation de 16 jours pour lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles. Cette initiative vise à « sensibiliser aux dangers de la violence et à faire connaître les mécanismes de protection et de prévention mis en place par l’État en vue de renforcer la sécurité des femmes et de préserver leur dignité ». La ministre a insisté sur la nécessité de « privilégier la prévention afin de bâtir une société sûre et saine, notamment en renforçant l’éducation et la formation des femmes à tous les niveaux et en les sensibilisant à leurs droits, parallèlement à la sensibilisation de la société aux conséquences négatives de la violence tant sur les femmes que sur la cohésion familiale et sociale ». Cette campagne s’inscrit dans une approche globale combinant prévention, sensibilisation et répression, témoignant d’une volonté politique affirmée de faire reculer ce fléau qui continue d’affecter de nombreuses femmes à travers le pays.
Chokri Hafed

