Lutte contre les inondations : 850 sites à très haut-risque recensés
L’Algérie fait face à des changements climatiques marqués depuis une vingtaine d’années, particulièrement concernant les précipitations qui ont directement impacté les réseaux d’assainissement, poussant le ministère de l’Hydraulique à adopter une politique préventive basée sur le nettoyage des canaux et cours d’eau pour éviter leur obstruction et limiter les inondations durant l’automne et l’hiver. Cherif Aïssiou, directeur de l’assainissement et de la prévention des risques d’inondation au ministère de l’hydraulique, a exposé dimanche lors de son passage sur les ondes de la radio nationale l’ampleur des défis auxquels le secteur doit faire face. Il a cité l’exemple récent de la commune de Bir Mourad Raïs à Alger, où 72 millimètres de pluie sont tombés en seulement deux heures, soit l’équivalent de deux semaines de précipitations normales, dépassant largement la capacité d’absorption des réseaux d’assainissement. Cette réalité climatique nouvelle nécessite une adaptation constante des infrastructures. « Les opérations d’assainissement sont programmées de manière périodique, avec l’enregistrement de nouveaux projets chaque année et la mise à jour des plans directeurs en adéquation avec les changements climatiques et l’expansion urbaine », a précisé le responsable. Le problème ne se limite toutefois pas aux capacités techniques des infrastructures. « Le problème ne concerne pas uniquement la capacité d’absorption des réseaux, mais s’aggrave également en raison des comportements inciviques de certains citoyens, comme le jet de déchets, de plastique et de gravats dans les égouts, ou l’abandon de résidus de travaux sans nettoyage à proximité », a déploré Aïssiou, pointant du doigt une responsabilité collective dans la gestion de ces risques.
L’état général du réseau d’assainissement demeure acceptable selon le responsable, malgré l’existence de sections anciennes nécessitant une réhabilitation. « Après que les pluies prévues ne dépassaient pas 20 millimètres, elles atteignent aujourd’hui parfois 120 millimètres, ce qui a poussé les pouvoirs publics ces dernières années à accélérer le renouvellement des réseaux d’assainissement en coordination avec le ministère de l’Intérieur et les collectivités locales, avec l’allocation de fonds à cet effet dans la loi de finances », a-t-il expliqué. L’infrastructure repose principalement sur un réseau unifié pour l’assainissement et les eaux pluviales, couvrant environ 93% du territoire national, 96% des zones urbaines et près de 75% des zones rurales, pour une longueur totale estimée à 97.000 kilomètres. « Les services d’assainissement sont disponibles à 100% en Algérie, alors que 76% des pays africains voisins ne disposent pas de ces services », a souligné Aïssiou, notant que la séparation entre réseaux d’assainissement et eaux pluviales, bien que complexe et coûteuse, a été entamée dans les nouvelles villes. Concernant les points critiques, le dernier recensement réalisé fin 2024 a identifié environ 13.500 points noirs à travers le pays, un chiffre en régression grâce aux nouveaux programmes mis en œuvre en collaboration avec les collectivités locales. La stratégie nationale de lutte contre les inondations, validée en 2020, a recensé 850 sites dangereux, dont 50 à très haut risque. « Les études techniques sont terminées dans 16 wilayas, tandis que les travaux se poursuivent dans 14 autres wilayas et 11 wilayas ont des projets en cours de lancement », a détaillé le responsable.
Le problème spécifique de la remontée des eaux usées dans les wilayas du Sud, particulièrement à El Oued et Ouargla, menace de polluer les nappes phréatiques. Le secteur a réalisé quatre phases de programmes et atteint actuellement la dernière étape, réduisant considérablement les inondations dans ces deux wilayas. Concernant la réutilisation des eaux traitées en agriculture, Aïssiou a précisé que le secteur, qui se concentrait auparavant uniquement sur la protection de l’environnement, s’oriente désormais vers l’utilisation des eaux usées traitées dans plusieurs domaines, dont l’agriculture, l’industrie et les services, conformément aux directives présidentielles de novembre 2023. 21 projets ont été réalisés ou sont en cours, incluant 18 stations d’épuration, avec la remise en service des stations arrêtées et l’adoption du traitement tertiaire permettant d’irriguer diverses cultures comme les céréales et les légumes. La quantité d’eau actuellement destinée à l’agriculture s’élève à 110 millions de mètres cubes, et devrait atteindre un milliard de mètres cubes annuellement d’ici deux ans avec l’achèvement de 75 nouvelles stations en cours de réalisation.
Malik Meziane

