Le Maroc au cœur du trafic international de drogue
Un nouvel incident survenu hier au large des côtes marocaines vient une nouvelle fois mettre en lumière le rôle central du Maroc dans le trafic international de stupéfiants. Selon Pedro Fernández, représentant du gouvernement espagnol en Andalousie, une collision entre trois embarcations de contrebande dans les eaux d’Al Hoceima a fait un blessé grave, actuellement en état de mort cérébrale. Les détails de l’incident, rapportés par la Guardia Civil espagnole, confirment le rôle central des réseaux marocains dans le trafic de drogue dans la région. L’événement s’est déroulé dans la nuit du vendredi au samedi, le long de la côte reliant Al Hoceima à Moulay Bousselham, au nord-ouest du pays. Deux embarcations transportant sept trafiquants attendaient de transférer une cargaison de haschich vers le sud de l’Espagne lorsqu’elles sont entrées en conflit avec un troisième « bateau fantôme » venu d’Espagne. Cette altercation, attribuée à des rivalités entre bandes criminelles pour le contrôle des routes maritimes, s’est soldée par la fuite du troisième navire après avoir percuté les deux autres. Les sept trafiquants ont finalement été interceptés par les autorités espagnoles sur la côte de Sancti Petri, malgré leur tentative de fuite. Cet incident s’inscrit dans un contexte plus large, documenté par l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) dans son rapport de 2023. Le document souligne une évolution préoccupante : les réseaux historiquement dédiés au trafic de résine de cannabis du Maroc vers l’Europe, particulièrement via l’Espagne vers les Pays-Bas, sont désormais exploités pour le trafic de cocaïne. Cette adaptation des routes traditionnelles témoigne d’une sophistication croissante des organisations criminelles opérant depuis le territoire marocain. Les statistiques mondiales révèlent une augmentation alarmante de la consommation de drogues, avec plus de 296 millions d’utilisateurs recensés en 2021, soit une hausse de 23% en dix ans. Dans ce paysage, le Maroc occupe une position particulière en tant que premier producteur mondial de cannabis. Les saisies régulières effectuées par les autorités espagnoles en témoignent : en avril dernier, 25 tonnes de haschisch d’une valeur de 50 millions d’euros ont été découvertes dans un camion censé transporter des melons vers la France. Le mois précédent, plus de 4,4 tonnes de la même substance avaient été interceptées dans le port de Motril à Grenade. Plus récemment une tonne de cocaïne à destination du Maroc a été saisie dans un port brésilien. Le royaume chérifien est reconnu comme la principale source de résine de cannabis au Sahel, avec une influence s’étendant à l’Afrique du Nord, au Moyen-Orient et à l’Europe. Cette position dominante dans le marché mondial des stupéfiants soulève de sérieuses préoccupations au niveau international. Le département d’État américain a notamment exprimé son inquiétude concernant l’ampleur du blanchiment d’argent au Maroc, directement lié au trafic de cannabis et au transit de cocaïne vers l’Europe. La culture du cannabis est devenue une source significative de devises étrangères pour le pays, alimentant des réseaux de corruption politique notamment en Europe, ainsi que le trafic d’armes. La récente saisie au Brésil illustre d’ailleurs la transformation du Maroc en plaque tournante du trafic international de drogue, un phénomène qui menace la stabilité et la sécurité régionales. Les réseaux criminels locaux continuent, avec la bénédiction des autorités marocaines, de faciliter le transit des stupéfiants par voie maritime et terrestre, participant ainsi à la propagation de la criminalité organisée et à ses conséquences dévastatrices sur les populations, tant au niveau local qu’international. La zone côtière entre Al Hoceima et Moulay Bousselham est particulièrement touchée par ce phénomène, s’étant récemment imposée comme un point de transit majeur pour le haschich destiné aux côtes méridionales espagnoles.
Salim Amokrane