Quand l’Algérie a révolutionné la géopolitique pétrolière mondiale
Le 5 mars marque un moment de réflexion historique pour l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), qui commémore le cinquantenaire du Sommet d’Alger, événement géopolitique majeur qui a profondément transformé les relations économiques internationales et le rapport de force entre pays producteurs et consommateurs de pétrole. Ce sommet emblématique, qui s’est tenu du 4 au 6 mars 1975 sous la présidence du défunt président Houari Boumediene, a constitué un moment de basculement stratégique où les pays producteurs de pétrole ont affirmé avec force leur souveraineté économique et leur volonté de peser durablement sur l’économie mondiale.
Réunissant les dirigeants de onze pays membres – Arabie Saoudite, Irak, Iran, Koweït, Venezuela, Libye, Nigeria, Indonésie, Émirats arabes unis, Qatar et Équateur – le sommet a posé les jalons d’une nouvelle gouvernance énergétique internationale. L’objectif était clair : reprendre le contrôle d’une ressource stratégique jusqu’alors largement dominée par les intérêts des grandes puissances occidentales et des compagnies pétrolières internationales.
Les décisions prises lors de ces journées historiques ont été structurantes. Les pays membres ont acté la nécessité de renforcer leur maîtrise de l’exploitation et de la commercialisation de leurs ressources pétrolières. Ils ont également jeté les bases d’un dialogue plus équilibré avec les pays consommateurs, reconnaissant la nécessité d’une stabilité mutuelle des marchés énergétiques.
L’innovation majeure du sommet réside dans la création du Fonds de l’OPEP pour le développement international (FODI), mécanisme novateur de solidarité économique. Cette initiative visait explicitement à soutenir les pays en développement par des financements et une assistance technique, traduisant une vision politique dépassant les seuls intérêts pétroliers.
Cinquante ans après, l’organisation continue d’incarner cette vision stratégique. Dans un monde énergétique en mutation permanente, confronté aux défis du changement climatique et de la transition énergétique, l’OPEP démontre sa capacité d’adaptation. Les principes définis à Alger en 1975 – souveraineté économique, dialogue international, solidarité – restent plus que jamais d’actualité. Le sommet d’Alger a marqué un tournant historique où des pays du Sud ont collectivement décidé de prendre leur destin économique en main. Il symbolise une page importante de l’émancipation économique post-coloniale, un moment où la géopolitique mondiale a été réécrite depuis le Sud. L’anniversaire de cet événement est un rappel que la coopération internationale peut s’établir sur des bases d’égalité et de respect mutuel, que les ressources naturelles peuvent être un facteur de développement et non de dépendance.
Dans un message publié sur ses réseaux sociaux, l’OPEP a souligné que cet anniversaire est l’occasion de célébrer la démarche visionnaire de ses dirigeants de réaffirmer son engagement à servir les intérêts des pays producteurs et la stabilité des marchés énergétiques mondiaux.
Sabrina Aziouez