L’AEC veut intégrer jusqu’à 35% d’ENR dans les futures stations: Concilier sécurité énergétique et hydrique
Fini le temps où dessaler l’eau de mer rimait avec gaspillage énergétique. L’Algérie veut bouleverser les codes du secteur en annonçant une innovation : intégrer jusqu’à 35% d’énergies renouvelables dans ses futures stations de dessalement. Cette révolution verte propulse le pays au rang de champion africain du dessalement tout en réconciliant soif de développement et respect de l’environnement.
La société Algerian Energy Company (AEC), filiale spécialisée du groupe Sonatrach, pilote cette mutation technologique avec une approche résolument innovante. Sofiane Zamiche, directeur du développement à l’AEC, a révélé hier lors d’une intervention sur les ondes de la Radio algérienne que l’entreprise « prévoit d’intégrer entre 30 et 35 % d’énergies renouvelables dans les six nouvelles stations de dessalement de l’eau de mer, actuellement en cours de maturation ». Cette proportion inédite dans le secteur du dessalement positionne l’Algérie parmi les précurseurs mondiaux de l’éco-dessalement, une approche qui pourrait faire école dans d’autres pays confrontés au stress hydrique.
L’ambition écologique de ces futurs projets s’inscrit dans une démarche globale de durabilité. « Parmi les mesures adoptées dans la réalisation des futurs projets, nous avons décidé d’intégrer 30 à 35 % d’énergies renouvelables dans les stations de dessalement », a déclaré M. Zamiche, soulignant que cette orientation vise à « réduire la consommation d’électricité conventionnelle, à diminuer l’empreinte carbone et à inscrire ces projets dans la dynamique nationale de transition énergétique ». Cette approche révolutionnaire transforme le dessalement, traditionnellement énergivore, en un processus partiellement alimenté par l’énergie solaire et éolienne, créant un cercle vertueux entre ressources naturelles et besoins hydriques. La stratégie adoptée par l’AEC témoigne d’une vision intégrée de l’ingénierie moderne. Les appels d’offres pour la réalisation des six nouvelles stations imposeront, selon M. Zamiche, « à travers leurs cahiers de charges, la réalisation de fermes d’énergies photovoltaïques/éolienne pour diminuer le coût élevé de la consommation énergétique, et ce, dans le cadre d’un projet intégré sous la formule EPC (Engineering, Procurement and Construction) ». Cette approche globale garantit une cohérence technique et économique optimale, transformant chaque station en véritable écosystème énergétique autonome.
Le programme en cours de maturation concerne six nouvelles installations d’envergure. « Nous sommes actuellement dans la phase de maturation des six nouvelles stations, d’une capacité de 300.000 m3 chacune, qui seront implantées dans les wilayas de Skikda, Jijel, Tizi Ouzou, Chlef, Mostaganem et Tlemcen », a précisé le responsable de l’AEC. Cette répartition géographique stratégique vise à couvrir l’ensemble du littoral algérien, garantissant un approvisionnement équilibré et réduisant les coûts de transport de l’eau dessalée vers les zones de consommation.
Ces futures installations s’ajoutent à un parc déjà impressionnant qui positionne l’Algérie au sommet continental. Avec la réception actuelle des cinq nouvelles stations de dessalement, l’Algérie devient « premier pays investisseur dans cette technologie au niveau africain, deuxième au niveau arabe et dans le bassin méditerranéen » et atteint « une capacité totale de 3,75 millions de mètres cubes jour d’eau dessalée », selon M. Zamiche. Les cinq stations, d’une capacité de 300.000 mètres cubes par jour chacune, concernent « les villes de El Taref, Béjaïa, Boumerdès, Tipaza et Oran », ajoutant « un total de 1,5 million de mètres cubes qui vient s’ajouter à la capacité déjà installée ».
Cette montée en puissance transforme radicalement l’équilibre hydrique national. « Avec ces nouvelles quantités, le mix (eau conventionnelle – eau dessalée) passe de 18% à 42% », révèle le directeur de développement de l’AEC. L’objectif à moyen terme est encore plus ambitieux. Ces nouvelles stations « devront augmenter la contribution de dessalement de l’eau de mer à l’horizon 2030 de 42% à 60% du volume global de l’eau potable », transformant le dessalement en source majoritaire d’approvisionnement hydrique du pays. Cette mutation place l’Algérie parmi les nations les plus avancées dans la maîtrise technologique du dessalement à grande échelle.
Toutefois, la mise en service de ces capacités supplémentaires nécessite une coordination fine avec les infrastructures existantes. M. Zamiche précise que « la réception de ces quantités par les consommateurs finaux que sont nos concitoyens se fera de manière progressive et est tributaire de deux facteurs ». D’abord, « c’est à la demande de l’ADE que des quantités précises sont libérées ». L’opération reste ensuite « conditionnée par l’état du réseau de distribution de l’eau potable appelé à supporter les quantités injectées ».
Amar Malki