Tiaret : Une nécropole romaine du Ve siècle sort de terre
Les pelleteuses destinées à un projet immobilier ont révélé un trésor archéologique insoupçonné dans les hauteurs de Tiaret. Une découverte qui transforme un simple chantier de logements en fenêtre ouverte sur quinze siècles d’histoire. Dans le quartier des « Frères Guitoune », une équipe d’archéologues spécialisés a mis au jour une nécropole romaine datant du Ve siècle, offrant un témoignage précieux sur les pratiques funéraires de l’époque tardive de l’Empire romain en Afrique du Nord. Cette trouvaille exceptionnelle illustre parfaitement comment l’archéologie de sauvetage peut révéler des pans entiers de notre patrimoine historique, souvent menacés par l’urbanisation moderne. Ouafia Adel, directrice des études en archéologie historique au Centre national de recherche en archéologie, a coordonné ces fouilles délicates qui ont permis d’exhumer pas moins de cinquante tombes, dont vingt-cinq remarquablement préservées. « Au moins 50 tombes ont été mises au jour, dont 25 en bon état, contenant des squelettes d’enfants, de femmes et d’hommes », précise-t-elle, soulignant la diversité démographique de cette communauté antique. Cette nécropole constitue un véritable livre d’histoire à ciel ouvert, où chaque sépulture raconte une vie, une époque, des traditions ancestrales qui résonnent encore aujourd’hui. L’analyse minutieuse des structures funéraires révèle des détails fascinants sur les rites d’inhumation de l’époque. « L’étude de la structure externe des sépultures montre qu’elles remontent à l’époque romaine, car elles sont construites sous des dalles et dans des coffres en pierre », explique la spécialiste. Cette technique de construction sophistiquée témoigne du savoir-faire architectural des artisans locaux qui maîtrisaient parfaitement l’art de la construction funéraire. La position des défunts offre également des indices précieux sur les croyances de l’époque : « la position dorsale allongée, caractérisée par le placement des membres supérieurs sous l’abdomen, a été utilisée pour l’inhumation », une pratique qui reflète les codes funéraires romains adaptés aux traditions locales. Un détail particulièrement significatif attire l’attention des archéologues : l’absence totale de mobilier funéraire dans ces sépultures. « Les tombes ne contenaient aucun mobilier funéraire, ce qui est typique de cette époque », observe Ouafia Adel. Cette sobriété contraste avec les riches mobiliers des époques antérieures et illustre l’évolution des mentalités face à la mort et à l’au-delà. Face à cette découverte exceptionnelle, les autorités locales et les spécialistes ont pris une décision remarquable qui honore la valeur patrimoniale du site. « Il est prévu de préserver ce site dans son état actuel et de le transformer en site touristique », annonce la directrice des études. Des mesures seront prises pour protéger ces vestiges millénaires des intempéries, « notamment par l’installation de couvercles en verre sur les tombes ainsi que de panneaux d’information et d’orientation pour mettre en valeur son importance historique ». Cette découverte de Tiaret s’inscrit dans la riche tradition archéologique algérienne qui ne cesse de révéler les multiples facettes de l’histoire nord-africaine. Elle rappelle que sous nos pieds repose un patrimoine inestimable, témoin de civilisations qui ont façonné notre identité culturelle.
M.S.