Un séminaire s’ouvre aujourd’hui au Palais de la culture : Protéger le patrimoine à l’ombre des guerres
Dans un contexte géopolitique marqué par l’intensification des conflits dans le monde arabe, la protection du patrimoine millénaire qui témoigne de l’histoire et des civilisations de la région est un enjeu de première importance.
Dans ce sens, Alger accueille, jeudi et vendredi, une rencontre scientifique de première importance organisée par l’Organisation arabe pour l’éducation, la culture et les sciences (ALESCO) en partenariat avec le ministère de la Culture et des Arts. Cette conférence, placée sous le patronage de la ministre Malika Bendouda, réunit au Palais de la culture Moufdi Zakaria des experts internationaux autour d’une problématique brûlante : « Le patrimoine culturel dans le monde arabe face aux conflits armés ». L’urgence de cette thématique résonne particulièrement dans l’actualité récente qui a vu la destruction systématique de sites archéologiques millénaires en Syrie, en Irak, au Liban et en Palestine dans le sillage des tensions et des agression sionistes, transformant le patrimoine culturel en victime collatérale de ces guerres. Le professeur Mounir Bouchenaki, figure emblématique de la conservation patrimoniale et ancien du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO, prononcera la conférence inaugurale de cet événement scientifique majeur, apportant son expertise reconnue mondialement dans la protection du patrimoine en temps de crise.
Le programme scientifique, orchestré par le directeur de la culture à l’ALESCO, le docteur Hamid Bin Seif Al-Naoufali, s’articule autour d’interventions pointues qui interrogent les stratégies de préservation face aux menaces contemporaines. L’archéologue égyptien Faraj Hussein Faraj Al-Husseini présentera un inventaire archéologique des nécropoles historiques de Ghaza, où les récents bombardements et attaques sionistes ont causé des dommages irréversibles au patrimoine palestinien. Cette présentation revêt une dimension particulière qui permettra de démontrer une dimension importante de la stratégie de guerre sioniste destinée à effacer complètement l’identité palestinienne.
La contribution algérienne s’impose à travers les travaux du professeur Mohamed Sahnouni, spécialiste reconnu des premiers peuplements humains, qui exposera ses recherches pluridisciplinaires sur les sites préhistoriques d’Ain Lahnech et Ain Boucherit dans la région de Sétif. Ces découvertes, qui repoussent les limites chronologiques de la présence humaine en Afrique du Nord à près de 2,4 millions d’années, démontrent l’importance stratégique de l’Algérie dans la compréhension des origines de l’humanité. La Tunisie enrichira également les débats par l’intervention du professeur Lotfi Nezzari, qui proposera une relecture novatrice des trois temples de la place publique de Sbeïtla, site archéologique majeur de l’époque romaine.
Au-delà des communications académiques, cette rencontre prévoit une dimension interactive cruciale avec l’organisation d’une table ronde consacrée à l’état des lieux du patrimoine culturel dans le monde arabe. Cette session permettra aux participants d’évaluer collectivement les défis contemporains et d’esquisser des stratégies coordonnées de protection. La programmation culturelle complète l’approche scientifique avec des visites guidées du site archéologique de Tipaza, joyau de l’époque romaine classé au patrimoine mondial, du Musée national des beaux-arts d’Alger et de la Grande Mosquée d’Alger, symbole architectural de l’Algérie contemporaine.
L’inclusion d’une découverte de la Casbah d’Alger, elle aussi inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, souligne la volonté des organisateurs de conjuguer réflexion théorique et immersion patrimoniale concrète. Cette approche pédagogique vise à sensibiliser les participants à la richesse et à la fragilité du patrimoine, tout en illustrant les bonnes pratiques de conservation urbaine dans un contexte méditerranéen. La cérémonie de clôture honorera symboliquement le professeur Bouchenaki, reconnaissance méritée d’une carrière dédiée à la sauvegarde du patrimoine mondial.
Mohand Seghir
