L’Algérie mise sur « des partenariats multiples et diversifiés »
Le Général d’Armée Saïd Chanegriha, ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale, Chef d’Etat-Major de l’Armée nationale populaire (ANP) a reçu mardi au siège de l’État-major de l’ANP le Directeur du Service fédéral pour la coopération militaire et technique de la Fédération de Russie, Shugaev Dimitry, réaffirmant à cette occasion les principes fondamentaux de la politique étrangère algérienne, y compris dans le domaine militaire.
Le chef d’État-major de l’Armée nationale populaire a notamment souligné la volonté de l’Algérie d’établir des partenariats diversifiés tout en respectant scrupuleusement le droit international et la souveraineté des États. Cette rencontre de haut niveau, qui s’est déroulée en présence de généraux-majors et généraux de l’État-major de l’ANP et du ministère de la Défense nationale ainsi que des membres de la délégation russe, a porté sur l’état de la coopération militaire bilatérale et l’échange d’analyses sur les questions d’intérêt commun. L’audience s’inscrit dans la continuité des relations historiques entre les deux pays et témoigne de la dynamique nouvelle insufflée dans ce domaine stratégique. Dans son allocution d’ouverture, le Général d’Armée Chanegriha a souligné l’importance des « récentes visites mutuelles » qui « ont permis d’insuffler une dynamique renouvelée dans le domaine de la coopération militaire, élargissant ainsi les perspectives de partenariat bilatéral ». Il a qualifié cette visite d' »étape supplémentaire dans le processus de la consolidation des relations historiques entre nos deux pays de manière générale, et entre nos institutions militaires respectives en particulier ». Au-delà des aspects bilatéraux, le chef d’État-major de l’ANP a exposé une vision plus large de la diplomatie militaire nationale, ancrée dans les principes fondamentaux de la politique étrangère du pays. Il a ainsi affirmé que « l’Algérie cherche à établir des partenariats multiples et diversifiés avec les pays amis, et œuvre à développer des réseaux de relations fondés sur la recherche de solutions par le dialogue et la promotion des impératifs du développement durable ». Cette approche prend une dimension particulière dans le contexte géopolitique actuel. Face à la complexité mondiale et à l’instabilité régionale, le Général Chanegriha a précisé que l’Algérie « dans le cadre des principes de sa politique étrangère, fondée sur le plein respect du droit international et sur la recherche assidue de solutions pacifiques aux conflits, s’emploie à développer des partenariats multiples et diversifiés avec des pays amis ». Cette déclaration traduit l’attachement de l’Algérie aux principes du non-alignement, du multilatéralisme et du respect du droit et de la souveraineté des Etats qui caractérisent sa diplomatie depuis l’indépendance. Une déclaration lourde de sens dans un contexte régional tendu notamment au Sahel et exacerbé par les interférences étrangères, soulignant ainsi le rôle stabilisateur qui a toujours été celui de l’Algérie et qui fait l’objet d’attaques insidieuses en raison justement de cette constance. Le ministre délégué auprès du ministre de la Défense nationale a également insisté sur l’objectif de « développer des réseaux de relations réunissant la quête de solutions fondées sur le dialogue et la promotion des impératifs du développement durable, en vue de bâtir un avenir commun, reposant sur la solidarité et le respect de la souveraineté des États ». Cette vision s’articule autour de trois piliers essentiels : le dialogue comme mode de résolution des conflits, le développement durable comme objectif commun, et le respect absolu de la souveraineté étatique.
Ces déclarations s’inscrivent dans une stratégie plus large de diversification des partenariats militaires menée par l’Armée nationale populaire. Cette approche multidimensionnelle, conforme aux principes du non-alignement historique de l’Algérie, permet au pays de maintenir des relations équilibrées avec différents partenaires stratégiques tout en préservant son autonomie décisionnelle. La diversification des partenariats militaires algériens se manifeste concrètement par des coopérations avec des pays aux orientations géopolitiques diverses. Aux côtés de partenaires traditionnels comme la Russie, les États-Unis, la Chine et l’Europe, l’Algérie développe également ses relations avec ses homologues africains et arabes, ainsi qu’avec de nouveaux partenaires comme l’Inde. Cette stratégie témoigne de la volonté algérienne de ne pas s’enfermer dans des blocs géopolitiques rigides.
L’actualité récente illustre cette approche équilibrée. La semaine précédant la rencontre avec le responsable russe, le général-major américain Claude K. Tudor Jr, commandant des opérations spéciales des Forces américaines en Afrique, avait effectué une visite en Algérie. Il s’agissait de la première délégation militaire américaine de haut niveau depuis la visite du commandant de l’Africom en janvier 2025, qui avait abouti à la signature d’un mémorandum d’entente historique sur la coopération militaire. Cette capacité à maintenir des relations simultanées avec des puissances aux intérêts parfois divergents témoigne du pragmatisme de la diplomatie militaire algérienne. L’ambassade américaine en Algérie a d’ailleurs salué le rôle de l’Algérie comme « leader régional doté d’une expérience avérée dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé » qui « collabore avec les pays voisins afin de développer leurs capacités sécuritaires ». La rencontre avec le responsable russe, conclue par un échange de cadeaux symboliques selon le protocole diplomatique, s’inscrit donc dans cette logique de partenariats équilibrés et diversifiés. Elle confirme la volonté algérienne de maintenir des relations privilégiées avec Moscou tout en préservant sa liberté d’action dans ses autres coopérations militaires internationales, illustrant parfaitement les principes du non-alignement adapté aux réalités géopolitiques contemporaines.
Hocine Fadheli