Monde

Soudan : Les FSR multiplient les crimes contre les civils

Au Soudan, la guerre entre l’armée nationale et les Forces de soutien rapide (FSR) continue de plonger le pays dans le chaos, marquant de nouvelles étapes d’horreur. Des frappes de drones contre des centres de déplacés et des massacres à grande échelle à El-Fashir illustrent l’escalade meurtrière menée par les paramilitaires depuis leur avancée dans le Darfour et le Kordofan du Sud.

Selon des sources médicales et humanitaires, au moins douze civils, dont des femmes et des enfants, ont été tués vendredi soir dans deux frappes de drones attribuées aux FSR, dans l’État du Kordofan du Sud. La première frappe a visé un centre d’hébergement installé dans les locaux de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), à Kadugli, où cinq enfants ont péri sur le coup. Une seconde attaque a frappé un camp de déplacés dans la zone d’Al-Abbasiya Tagali, faisant sept morts supplémentaires et plusieurs blessés graves.

Le Sudan Doctors Network, un collectif de médecins bénévoles, a dénoncé ces attaques comme une nouvelle preuve que les FSR « mènent une guerre totale contre le peuple soudanais » et « cherchent délibérément à semer la terreur et la mort partout ». L’OIM a confirmé qu’un de ses anciens bureaux, utilisé comme abri par des familles déplacées, avait été directement touché par une frappe de drone, qualifiant cet acte de « violation flagrante du droit international humanitaire ». Ces bombardements interviennent dans un contexte où les FSR, issues des milices janjawids responsables des atrocités du Darfour au début des années 2000, intensifient leurs attaques contre les civils depuis la prise d’El-Fashir, capitale du Darfour-Nord, le 26 octobre dernier. D’après la ministre soudanaise du Bien-être social, Salma Ishaq, les paramilitaires ont tué 300 femmes dans les deux premiers jours suivant leur entrée dans la ville, dans un déchaînement de violences sexuelles, d’enlèvements et de tortures. « Ce qui s’est passé à El-Fashir relève d’un nettoyage ethnique systématique, un crime majeur dont le monde se rend complice par son silence », a-t-elle déclaré. Selon la ministre, la route reliant El-Fashir à Tawila est devenue « une véritable route de la mort », où les civils qui tentent de fuir sont abattus ou capturés. De nombreuses familles sont toujours prises au piège dans la ville, soumises à des viols, des enlèvements et des exécutions sommaires.

Atrocités à grande échelle !

Les témoignages recueillis par Médecins sans frontières (MSF) et d’autres ONG confirment un tableau d’atrocités à grande échelle. Des survivants ont rapporté des scènes insoutenables : des habitants séparés selon leur âge, leur sexe ou leur origine ethnique, certains détenus, d’autres exécutés publiquement. Un rescapé a raconté avoir vu des prisonniers écrasés par des véhicules de combattants des FSR. D’après le Laboratoire de recherche humanitaire de l’Université de Yale, qui analyse des images satellites, au moins 31 sites correspondant à des regroupements de corps humains ont été identifiés entre lundi et vendredi dans différents quartiers d’El-Fashir. Les communications étant largement coupées, le bilan réel reste incertain, mais les humanitaires craignent des milliers de morts supplémentaires. L’ONU estime que plus de 65 000 civils ont fui El-Fashir, tandis que des dizaines de milliers d’autres sont toujours piégés, empêchés de rejoindre des zones plus sûres par les miliciens. Depuis le début du conflit le 15 avril 2023, environ 20 000 personnes ont été tuées et plus de 15 millions ont été déplacées ou réfugiées à l’étranger, selon les Nations unies. Les négociations de cessez-le-feu, menées sous l’égide des États-Unis, de l’Égypte, des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite, sont dans l’impasse, tandis que les rapports onusiens pointent l’implication directe d’Abou Dhabi dans le conflit, via la fourniture d’armes et de drones aux FSR. Ces dernières contrôlent aujourd’hui une grande partie de l’ouest et du centre du pays, tandis que le gouvernement pro-armée s’est replié sur Port-Soudan, sur la côte de la mer Rouge.

Sur le terrain, les civils continuent de payer le prix d’une guerre d’usure qui ne montre aucun signe de répit. Les organisations humanitaires, dont la présence devient de plus en plus risquée, dénoncent un effondrement total de la protection des populations et appellent la communauté internationale à agir pour mettre fin à « un cycle de massacres et d’impunité ».

Lyes Saïdi

admin

admin

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *