À la UneMonde

La jeunesse s’apprête à descendre de nouveau dans la rue : Un week-end sous tensions au Maroc !

La colère monte au Maroc. Ce week-end, le mouvement de la jeunesse qui secoue le royaume depuis septembre dernier appelle à des manifestations nationales les 20 et 21 décembre, dénonçant des politiques de négligence ayant causé des drames humains et une répression qui aurait fait trois morts et des centaines d’arrestations. 

Le mouvement de la jeunesse marocain ne faiblit pas. Quatre mois après le début de sa mobilisation en septembre dernier, il annonce de nouvelles actions d’envergure nationale pour samedi et dimanche à travers tout le pays. Dans un communiqué diffusé mercredi, le mouvement appelle les jeunes et l’ensemble des citoyens à occuper la rue pour protester contre les politiques de négligence et de marginalisation dont sont victimes plusieurs villes marocaines. La colère du mouvement a été ravivée par deux tragédies récentes qui ont marqué l’opinion publique : l’effondrement de deux immeubles à Fès et des inondations sans précédent à Safi, ayant causé des pertes humaines et matérielles considérables. Pour le mouvement, ces drames ne sont pas le fruit du hasard mais constituent le résultat direct de politiques de laisser-aller et d’étouffement de la vérité et des voix libres. Le communiqué affirme que le musèlement des voix et la terreur n’ont pas empêché ces tragédies de se produire, bien au contraire, ils ont même favorisé leur répétition. Considérant l’action collective, pacifique et responsable comme l’unique voie pour rendre justice aux victimes, le mouvement impute l’entière responsabilité politique et morale de tous les drames récents au gouvernement marocain, accusé de témoigner du mépris à l’égard des vies humaines. L’appel lancé aux forces vives du pays est sans ambiguïté : le silence n’est plus possible et la peur n’est plus justifiée car le droit s’arrache et ne se donne pas, proclame le mouvement dans son communiqué.

The Guardian dévoile la répression du régime

Ces nouvelles manifestations interviennent dans un contexte de répression qui suscite une inquiétude croissante au niveau international. Le journal britannique The Guardian a publié mercredi un article détaillé dévoilant les violences commises par le régime contre les détenus appartenant au mouvement social des jeunes. Plusieurs familles et organisations de défense des droits humains marocaines ont témoigné dans les colonnes du quotidien britannique, dénonçant des violences policières systématiques. Selon ces témoignages, des centaines de personnes auraient été battues et laissées pendant des heures sans eau ni nourriture en garde à vue. Cette vague de répression a débuté fin septembre et début octobre, lorsque des jeunes marocains sont descendus dans la rue pour manifester contre le sous-financement des systèmes de santé et d’éducation et dénoncer la corruption systémique. Le gouvernement a alors procédé à des arrestations massives. Un avocat de Casablanca, membre d’un groupe d’une cinquantaine de volontaires défendant les manifestants à travers le pays, a déclaré au Guardian qu’il y avait eu de multiples violations de procédure concernant les arrestations et la garde à vue, avec des peines sévères prononcées sur la base de preuves insuffisantes et de rapports rédigés à la hâte.

Le bilan humain de cette répression s’alourdit. Souad Brahma, présidente de l’Association marocaine des droits humains, a révélé que trois manifestants ont été tués par la gendarmerie royale et 14 autres blessés, vraisemblablement par les forces de sécurité, lors d’une manifestation le 1er octobre à Lqliâa, près d’Agadir. Elle dénonce également le fait que des manifestantes ont été victimes d’actes de harcèlement, d’insultes et de propos grossiers. L’AMDH tire la sonnette d’alarme sur les conditions judiciaires dans lesquelles sont traités les détenus. Des dizaines de personnes ont déjà été condamnées à des peines de prison, certaines allant jusqu’à 15 ans, dans des procès entachés d’irrégularités. L’organisation dénonce l’absence d’avocats lors de certaines audiences, l’insuffisance des enquêtes et le non-respect de la présomption d’innocence. Des centaines d’autres personnes, dont des enfants, resteraient en détention. L’Association marocaine des droits humains a vigoureusement dénoncé le traitement réservé aux détenus du mouvement, signalant qu’ils ont été victimes de procès marqués par des dépassements graves. Elle appelle à l’ouverture d’une enquête urgente sur la base de témoignages faisant état de torture et de mauvais traitements. Même les avocats défendant ces jeunes auraient été victimes de harcèlement et de menaces, selon l’organisation.

L’intimidation se poursuit jusque dans les familles des victimes. La semaine dernière, six proches de deux personnes tuées lors de la manifestation de Lqliâa ont déclaré avoir été interpellés par la police alors qu’ils se tenaient devant le Parlement à Rabat, brandissant des photos de leurs proches décédés. Les familles ont indiqué que la police leur avait confisqué leurs téléphones et effacé tout ce qui concernait le rassemblement avant de leur ordonner de quitter les lieux. Face à cette escalade répressive, le mouvement de la jeunesse maintient sa détermination et appelle à une mobilisation massive ce week-end, estimant que seule l’action collective pourra faire entendre la voix des Marocains et obtenir justice pour les victimes de ce qu’il considère comme des politiques irresponsables et meurtrières.

Lyes Saïdi

admin

admin

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *