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Déchéance de nationalité : Un encadrement strict pour une mesure exceptionnelle

L’Assemblée populaire nationale a examiné samedi une proposition d’amendement du code de la nationalité visant à encadrer juridiquement la déchéance exceptionnelle de la nationalité algérienne pour les citoyens portant atteinte aux intérêts supérieurs du pays. Le texte, présenté par le député Hicham Sifer, introduit des garanties procédurales renforcées tout en définissant précisément les actes graves justifiant cette mesure, dans le respect des dispositions constitutionnelles et des engagements internationaux de l’Algérie.

La séance plénière tenue sous la présidence de Brahim Boughali, président de l’Assemblée, a permis d’ouvrir un débat sur une question sensible touchant à l’équilibre délicat entre souveraineté nationale et droits individuels. L’enjeu principal réside dans la définition d’un cadre juridique précis permettant à l’État algérien de se prémunir contre les menaces à sa sécurité, tout en préservant les garanties constitutionnelles et les standards internationaux en matière de nationalité. Le député Hicham Sifer, auteur de la proposition, a insisté sur le caractère exceptionnel de cette mesure en affirmant que le texte vise à « adapter le cadre juridique régissant la nationalité aux dispositions de la Constitution et aux engagements internationaux y afférents, notamment pour ce qui est des cas de déchéance ». Il a tenu à clarifier que la déchéance de la nationalité algérienne, qu’elle soit d’origine ou acquise, « n’est pas une règle générale, mais une mesure juridique exceptionnelle à laquelle il n’est recouru que dans des cas rares et avérés liés à l’atteinte délibérée aux intérêts supérieurs de la patrie ou au reniement manifeste du devoir de loyauté ».  Le député a explicitement rassuré cette catégorie de citoyens en soulignant que la proposition « ne vise pas le principe de la double nationalité, mais traite des situations de son mauvais usage visant à se soustraire à la responsabilité ou à porter atteinte à la sécurité de l’État ». Cette distinction vise à dissiper toute ambiguïté sur les intentions du législateur et à préserver le lien avec la diaspora algérienne établie à l’étranger.

Le texte propose une définition exhaustive des actes graves justifiant la déchéance. Selon Hicham Sifer, la proposition « définit les actes graves exigeant la déchéance, tels que l’atteinte à la sécurité et à l’unité de l’État, l’allégeance envers un État étranger, la collaboration avec des parties hostiles ou l’adhésion à des groupes terroristes ou subversifs, leur financement ou la propagande en leur faveur, au préjudice des intérêts de l’État ». Cette énumération précise répond à une exigence de sécurité juridique en circonscrivant les situations visées et en évitant toute interprétation extensive susceptible de dériver vers l’arbitraire.

Des garde-fous pour prévenir l’arbitraire

Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa, a apporté le soutien du gouvernement à cette initiative parlementaire. Il a souligné qu' »après examen de cette proposition, le gouvernement a jugé qu’elle répondait aux conditions procédurales et de forme prévues dans la Constitution ». Toutefois, le ministre a émis des observations visant à renforcer la conformité du texte avec les standards constitutionnels et internationaux. Selon Lotfi Boudjemaa, les observations du gouvernement « portent essentiellement sur la nécessité de renforcer son adaptation aux dispositions de la Constitution et avec les mécanismes internationaux en vigueur qui permettent aux États de procéder à une déchéance de la nationalité y compris d’origine, exceptionnellement et dans des cas précis ». Il a précisé que « ces observations ont été prises en considération en vertu du rapport préliminaire pour la proposition de cette loi dont nous avons pris connaissance ».

Le garde des Sceaux a particulièrement insisté sur les garanties procédurales entourant l’application de cette mesure exceptionnelle. Il a affirmé la nécessité de « renforcer les garanties procédurales qui permettent de bien appliquer cette proposition, notamment l’obligation de fournir des preuves solides et cohérentes attestant que le concerné a commis les actes graves mentionnés dans cette loi », avec « obligation d’informer préalablement le concerné par la déchéance, des faits qui lui sont reprochés ». Ces garanties visent à prévenir tout usage arbitraire de la déchéance et à assurer le respect des droits de la défense.

Le dispositif institutionnel prévu pour l’application de cette mesure reflète également le souci d’encadrement rigoureux. Le ministre a indiqué que « l’examen des dossiers de déchéance de la nationalité algérienne est confié à une instance compétente spécialisée qui, après examen du dossier et de la proposition de déchéance, émet une décision sous forme de décret présidentiel conformément aux formes stipulées ». Ce mécanisme à double niveau, associant expertise technique et décision au plus haut niveau de l’État, constitue une garantie supplémentaire contre les dérives potentielles.

Cette proposition d’amendement intervient dans un contexte sécuritaire régional et international marqué par la persistance des menaces terroristes et des tentatives de déstabilisation. Elle traduit la volonté du législateur algérien de doter l’État d’instruments juridiques adaptés aux défis contemporains, tout en préservant l’équilibre entre efficacité sécuritaire et respect des libertés fondamentales.Hocine Fadheli

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