Projets de loi relatifs au droit syndical et de grève : Des syndicats s’en remettent au président de la République
Les deux projets de loi relatifs, pour le premier, aux modalités d’exercice du droit syndical, et pour le deuxième, à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève, qui ont atterri fin décembre à l’Assemblée populaire nationale (APN) font réagir les syndicats. A cet effet, la Confédération des syndicats algériens (CSA) a adressé une lettre au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, dans laquelle elle exprime son souhait de voir les deux textes retirés.
La Confédération des syndicats algériens (CSA) a adressé une lettre au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, dont nous détenons une copie, dans laquelle elle l’appelleà procéder au retrait des deux projets de loi relatifs aux modalités d’exercice du droit syndical, et à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève. Regroupant quatorze organisations syndicales des secteurs de l’éducation, de la santé, des finances, de la formation professionnelle et des postes et télécommunications, la CSA a estimé, dans ce courrier, rédigé au lendemain de la réunion de son exécutif tenue mercredi dernier, que ces projets de loi « ne reflètent pas les recommandations et instructions » du président de la République, ni les « attentes des travailleurs ». Ainsi, dans cette lettre, la Confédération a tout d’abord « remercié » le chef de l’Etat pour les « instructions » qu’il avait donné « lors des Conseil des ministres tenus respectivement les 31 octobre 2021, 2 et 16 janvier 2022, 3 juillet 2022 et 23 octobre 2022, dans l’objectif de renforcer le cadre légal pour l’exercice du droit syndical ». Des réunions durant lesquelles, ajoute-t-on encore, le Président avait affirmé que « les transformations que connait l’Algérie nécessite un nouveau cadre législatif relatif au secteur syndical de manière à garantir les droits et devoirs des travailleurs et défendre les intérêts de la société » pour lesquels, poursuit la CSA, les syndicalistes ont « milité pendant deux décennies ». Néanmoins, la Confédération indique qu’après avoir pris connaissance du contenu des deux textes, elle a constaté que ceux-là « ne traduisent pas les instructions et recommandations » du président de la République, « ni les attentes et espoirs des travailleurs ». A cet effet, la CSA appelle le premier magistrat du pays à procéder au retrait de ces deux textes et de les réviser. La Confédération des syndicats algériens estime que les lois, 90-14, amendée et complétée et 90-02 sont « plus souples » que les deux projets de loi présentés à l’APN. De plus, la CSA affirme qu’elle n’a pas été associée à leur enrichissement.
Il est utile de rappeler que le projet de loi relatif à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève a renforcé les mesures pouvant limiter le recours à la grève, et ce, en multipliant les conciliations et en prévoyant, en plus de ça, des médiations. Ainsi, en plus de la conciliation de l’Inspection du travail, prévue déjà par l’actuelle législation, il y a une seconde conciliation, ordonnée par le ministre de tutelle, et par la suite, une médiation, locale ou sectorielle, puis nationale. A cet effet, l’autorité publique concernée peut, à titre d’exemple, recourir à une « médiation obligatoire », s’il y a une « nécessité économique ou sociale », et ce, dans le cas où le conflit survient dans un « service essentiel dont l’interruption (pour cause de grève) pourra présenter un danger pour la vie, la sécurité ou la santé de tous les citoyens ou quelques-uns d’entre eux ». Dans l’exposé des motifs de ce texte, il est mentionné que « la grève est un droit essentiel qui s’exerce dans le respect de toutes les parties concernées, y compris donc les usagers du service public de base, et ce, afin d’éloigner le monde du travail du cycle des grèves anarchiques et subites qui ont des conséquences néfastes sur le développement économique et social du pays ». Dans le même ordre, tout en précisant que « le recours à la grève est interdit dans les secteurs de la défense et de la sûreté », le législateur a indiqué qu’ « un texte réglementaire fixera la liste des secteurs, personnels et fonctions qui seront interdits de recourir à la grève ». Il était clair donc que les syndicats, notamment autonomes, allaient réagir à ces deux textes. Bien entendu, des changements peuvent être apportés à ces derniers lors de leurs passages à la commission concernée à l’APN et éventuellement lors de leur examen en plénière. En dernier lieu, il est à signaler que la CSA s’était déjà prononcée au mois d’octobre dernier sur ces deux projets de loi en émettant des réserves notamment par rapport au fait que les syndicats n’ont pas été associés dans cette démarche.
Elyas Nour