La course vers la culture du cannabis au Maroc
Le Maroc est devenu un narco-État dans tous les sens du terme. Sous le couvert de la légalisation du cannabis, le régime marocain encourage la culture du cannabis, considérée comme « une industrie locale », et par conséquent les réseaux de trafic de drogue, source d’argent sale pour le régime qui s’en sert d’ailleurs pour entretenir sa clientèle et ses réseaux de corruption. Les derniers chiffres de l’Agence marocaine de réglementation des activités relatives au cannabis (ANRAC) sont effarants : les surfaces consacrées à la culture du cannabis ont été multipliées par neuf une année ! Cela démultiplie la menace que le kif marocain représente pour de nombreux pays, aussi bien en Europe, qu’au Maghreb et au Sahel. en effet, l’ANRAC a révélé avoir accordé des autorisations pour la culture et la production de cannabis couvrant une superficie totale de 2552 hectares, soit 9 fois plus que la surface qui y était consacrée, l’année dernière. Pis, l’Agence compte même mener, dans les prochains jours, une campagne pour inciter les opérateurs étrangers à investir dans le cannabis marocain. Cette agence de régulation, chargée, à l’origine, de contrôler la chaine de production, de l’importation des semences jusqu’à la commercialisation, prévoit de mener des missions commerciales lors de 3 grands événements dédiés à la filière à l’étranger en 2024, selon les informations relayées par la presse marocaine. C’est que l’enjeu pour le Maroc est de taille: permettre d’engranger des millions, voire des milliards de dollars. Selon les estimations du ministère marocain de l’Intérieur, les revenus d’exportation générés par le marché licite du cannabis oscilleraient entre 4,2 et 6,3 milliards de dollars à l’horizon 2028. Toutefois, dans un ouvrage consacré à « l’économie de la drogue et réseaux de corruption au Maroc », deux chercheurs européens ont affirmé que les profits générés par le trafic de haschisch et de drogue dure sont d’une ampleur financière telle qu’ils permettent au Royaume de nourrir la corruption. Une étude de l’initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée a évalué la production marocaine annuelle de cannabis à plus de 700 tonnes, pour une valeur de 23 milliards de dollars. « Les profits de la drogue sont à l’origine de réseaux de corruption et de clientélisme allant du village aux plus hauts niveaux des autorités de l’Etat et que ces réseaux se prolongent jusqu’en Europe », a souligné l’étude. En 2022, le Maroc a adopté une loi autorisant le cannabis « thérapeutique ». Cependant, la réalité de la culture du cannabis au Maroc est encore aujourd’hui largement illégale. La survie de milliers de personnes, notamment au rif, dépend de cette activité. En 20 ans, la région avantageusement située aux portes de l’Europe, est devenue son grenier à kif. La demande mondiale explosant, les zones de culture se sont en effet étendues dans cette région. En dépit de la pression internationale, le royaume a toujours toléré cette pratique, tirant avantage de la manne économique non négligeable qu’elle représentait et de la paix sociale qu’elle permettait d’instaurer dans cette région, traditionnellement frondeuse. En avril, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a tiré la sonnette d’alarme sur la forte hausse que connait le trafic de drogue au Sahel, précisant que la résine de cannabis, une des trois drogues les plus répandues dans la région, provient du Maroc où une augmentation de la production a été signalée. Dans un rapport intitulé « Trafic de drogue au Sahel : Evaluation de la menace de la criminalité transnationale organisée », l’organisme onusien a souligné qu’un nombre croissant de saisies record de cocaïne impliquant des pays du Sahel ont fourni la preuve d’un trafic à grande échelle à travers la région. « D’une moyenne de 13 kg par an sur la période 2015-2020, la quantité de cocaïne saisie au Sahel est passée à 41 kg en 2021 et 1466 kg en 2022, l’essentiel étant signalé par le Burkina, le Mali et le Niger », a précisé le rapport de l’ONUDC.
Cannabis et cocaïne
Des données des pays du Sahel montrent que « la résine de cannabis trafiquée dans la région provient généralement du Maroc où une augmentation de la production a été signalée, atteignant environ 901 tonnes en 2022 », a indiqué le rapport, relevant que cette drogue est « généralement destinée aux pays d’Europe occidentale et du Nord ». « Au-delà de la route directe entre l’Espagne et le Maroc, la résine de cannabis est surtout acheminée par voie terrestre du Maroc vers la Mauritanie, le Mali, le Burkina, le Niger et le Tchad », fait savoir l’ONUDC qui révèle l’existence d’une autre « voie maritime alternative allant du Maroc aux portes du golfe de Guinée ». En mars dernier, le journal espagnol « El Espanol » a révélé un nouveau scandale autour d’un trafic de drogue entre la Péninsule ibérique et le Maroc, accusant la marine royale marocaine de complicité dans ce trafic à travers la participation de ses patrouilleurs à l’opération d’introduction des stupéfiants en Espagne. L’ONU a également prévenu dans un récent rapport contre les dangers que représentent les réseaux de trafic de cannabis marocain, qui facilitent et permettent de faciliter le trafic de cocaïne en provenance d’Amérique du Sud. ENACT Africa, une institution soutenue par Interpol a averti l’année dernière contre les alliances entre les réseaux de trafic de drogue marocains et les cartels de la drogue en Amérique du Sud. Selon la même source, le Maroc est devenu également la plus importante plate-forme en Afrique par laquelle transitent les drogues dures produites en Amérique Latine et destinées à arroser l’Europe et le Maghreb.
Samir Benisid