Projet de loi de finances 2025 : Un texte orienté vers la stimulation de l’investissement
Le projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2025, actuellement en cours d’examen par la Commission des finances et du budget de l’Assemblée populaire nationale (APN), se distingue par son approche équilibrée visant à stimuler l’économie nationale sans pour autant alourdir la charge fiscale des contribuables. Ce projet de budget, qui ne prévoit pas de nouveaux impôts, met l’accent sur le renforcement du pouvoir d’achat et l’encouragement de l’investissement, tout en introduisant des mesures d’élargissement de l’assiette fiscale et de simplification des procédures administratives. L’un des aspects les plus notables du PLF 2025 est son orientation vers l’élargissement de l’assiette fiscale, notamment par l’extension du régime d’impôt forfaitaire unique (IFU) à de nouvelles activités économiques. Parmi les secteurs désormais concernés figurent la collecte, le traitement et la distribution de tabacs en feuilles, les services de traiteur et de restauration événementielle, la location de salles des fêtes, le commerce de détail dans les grandes surfaces, la location de véhicules et d’engins, les agences de voyages et de tourisme, les agences de publicité et de communication, ainsi que les services de formation et d’enseignement divers. Cette mesure vise à intégrer davantage d’acteurs économiques dans le circuit formel, contribuant ainsi à une répartition plus équitable de la charge fiscale. Dans le même esprit, le commerce des pierres précieuses telles que le diamant, le saphir, le rubis et l’émeraude sera désormais soumis à la taxe intérieure de consommation (TIC) au taux de 30%, une décision qui devrait générer des revenus supplémentaires pour l’État tout en régulant ce secteur de luxe. Le projet prévoit également l’extension de l’application de la taxe de domiciliation bancaire (TDB) au taux de 5% aux redevances de marque et d’utilisation, à l’exception notable des logiciels et progiciels informatiques, ainsi que des frais d’adhésion et d’abonnements à l’étranger. Cette mesure vise à mieux encadrer les flux financiers transfrontaliers tout en préservant la compétitivité du secteur numérique. Dans le domaine de la gestion locale, le PLF 2025 introduit des mesures innovantes pour renforcer les ressources des collectivités territoriales. Il prévoit notamment la réaffectation d’une quote-part de 50% du produit de la taxe annuelle d’habitation au profit des wilayas, destinée à couvrir les charges liées à la réhabilitation du parc immobilier situé dans le périmètre des communes mais n’appartenant pas à ces dernières. Une disposition spécifique concerne la wilaya d’Alger, qui se verra attribuer 16% de la quote-part de la taxe sur les produits pétroliers (TPP) revenant à ses communes, en contrepartie des missions de service public qu’elle assume pour le compte de ces dernières. Ces mesures visent à renforcer l’autonomie financière des collectivités locales et à améliorer la qualité des services publics de proximité.
Facilitations douanières
Le projet de loi accorde une attention particulière à la simplification des procédures douanières, avec des dispositions visant à faciliter les opérations d’import-export. Parmi ces mesures figure la révision du cadre juridique régissant le statut d’Opérateur économique agréé (OEA) en douane, élargissant la catégorie des opérateurs pouvant bénéficier de ce statut privilégié. De plus, le texte prévoit la clarification des conditions de rectification des déclarations en douane et l’introduction de déclarations en détail anticipées, dans le but de réduire les délais de dédouanement et les coûts liés aux surestaries. Ces dispositions devraient contribuer à fluidifier les échanges commerciaux et à renforcer la compétitivité des entreprises algériennes sur la scène internationale. L’innovation et l’entreprenariat sont également au cœur du PLF 2025, avec l’introduction de plusieurs mesures incitatives. Le projet prévoit notamment un abattement de 30% du bénéfice comptable, plafonné à 200 millions de dinars, au titre des dépenses effectuées dans le cadre de la recherche et du développement en entreprise, ainsi que pour les programmes d’innovation ouverte réalisés en collaboration avec des start-up et des incubateurs. Cette mesure vise à encourager l’investissement dans l’innovation et à renforcer les liens entre les grandes entreprises et l’écosystème des start-up. Dans la même veine, le texte propose l’exonération des droits d’enregistrement pour les contrats de constitution de sociétés créées par les détenteurs du label « Projet innovant », ainsi que pour l’acquisition de biens immobiliers par les start-up et incubateurs en vue de la création d’activités industrielles. Ces dispositions s’inscrivent dans une stratégie globale visant à favoriser l’émergence d’un tissu entrepreneurial dynamique et innovant. Le PLF 2025 introduit également des mesures visant à stimuler l’investissement et à diversifier les sources de financement de l’économie.
Sukuk souverains
L’une des innovations majeures est l’autorisation donnée au Trésor public d’émettre des titres « sukuk souverains », permettant aux personnes physiques et morales de participer au financement des infrastructures et des équipements publics marchands de l’État. Pour encourager cette forme de financement, le projet prévoit une exemption de l’Impôt sur le revenu global (IRG) et de l’impôt sur le bénéfice des sociétés (IBS) pour une durée de cinq ans sur les produits de ces Sukuk, qu’ils soient émis par le Trésor ou négociés sur un marché organisé. Cette mesure devrait contribuer à diversifier les sources de financement de l’économie tout en offrant de nouvelles opportunités d’investissement aux acteurs économiques. Dans le domaine de la production industrielle, le PLF 2025 prévoit des mesures spécifiques pour soutenir certains secteurs stratégiques. Ainsi, il est proposé de proroger jusqu’au 31 décembre 2025 le délai accordé aux importateurs/transformateurs pour entamer le processus de production d’huile de soja brute ou pour l’acquérir sur le marché national, sous peine de perdre le bénéfice de la compensation et des exonérations douanières et fiscales accordées à l’importation. Cette disposition vise à encourager la production locale de cette matière première essentielle tout en laissant aux opérateurs économiques le temps nécessaire pour s’adapter. Le projet de loi accorde également une attention particulière à la numérisation de l’économie, avec l’exonération de la TVA et des droits de douane pour les terminaux de paiement électronique (TPE) et les kits destinés à leur assemblage, et ce jusqu’au 31 décembre 2027. Cette mesure vise à accélérer l’adoption des paiements électroniques dans le pays, contribuant ainsi à la modernisation des transactions commerciales et à la lutte contre l’économie informelle. Pour renforcer les outils de financement de l’économie, le PLF 2025 prévoit une augmentation significative du capital du Fonds national d’investissement (FNI), qui passera de 150 milliards à 275 milliards de dinars. De plus, il est proposé d’étendre la garantie accordée par le Fonds de garantie des crédits aux PME (FGAR) à l’ensemble des crédits consentis par les banques et les établissements financiers, et non plus seulement aux crédits d’investissement comme c’était le cas jusqu’à présent. Ces mesures visent à renforcer la capacité d’intervention de l’État dans le financement de l’économie et à faciliter l’accès au crédit pour les petites et moyennes entreprises. Enfin, le projet de loi introduit des dispositions visant à soutenir les exportations, notamment en autorisant l’exportation de pièces de rechange des appareils électroménagers à hauteur de 2% de la valeur totale des exportations par an, dans le cadre de la garantie service après-vente. Il prévoit également la possibilité de réexporter les pièces de rechange des appareils électroménagers importées pour un usage professionnel, en dehors des services après-vente, à condition que leur valeur soit égale ou supérieure à la valeur d’achat. Ces mesures devraient contribuer à renforcer la compétitivité des entreprises algériennes sur les marchés internationaux et à encourager la diversification des exportations. Le projet de loi de finances pour 2025 se présente comme un instrument de politique économique équilibré, visant à stimuler la croissance et l’investissement tout en préservant le pouvoir d’achat des citoyens. En évitant l’introduction de nouveaux impôts et en proposant des mesures ciblées de soutien à l’innovation, à l’entreprenariat et à l’investissement, ce projet de budget témoigne de la volonté des autorités algériennes de poursuivre la modernisation de l’économie nationale tout en renforçant sa résilience face aux défis économiques mondiaux.
Sabrina Aziouez