Diversification des exportations hors hydrocarbures : Les recommandations de la Banque mondiale
La Banque mondiale appelle l’Algérie à une transformation profonde de sa stratégie d’exportation et de développement économique, dans un rapport détaillé qui met en lumière les défis et les opportunités du pays. Actuellement, les hydrocarbures dominent encore massivement les exportations algériennes, représentant plus de 90% des produits exportés en 2023. Bien que les exportations hors hydrocarbures aient triplé depuis 2017 pour atteindre 5,1 milliards de dollars, elles restent limitées : les engrais, produits sidérurgiques et ciment constituent plus de 80% de ces exportations, avec une complexité commerciale très réduite. Les experts internationaux identifient néanmoins un potentiel de diversification et de croissance significatif, particulièrement grâce à la proximité géographique avec l’Europe. L’objectif ambitieux est d’atteindre 29 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures d’ici 2030, ce qui nécessitera une transformation économique profonde. Le diagnostic posé est sans appel : au cours des deux dernières décennies, l’investissement, la productivité globale et la part de l’industrie manufacturière dans le PIB ont montré des signes préoccupants de ralentissement. La part manufacturière est passée de 11,2% en 2002 à seulement 9,2% en 2022, affectant directement la compétitivité nationale. Pour réussir cette mutation, la Banque mondiale recommande une approche holistique articulée autour de plusieurs axes stratégiques. Premièrement, améliorer l’environnement des affaires et la productivité des entreprises, en particulier les entreprises publiques qui représentent un tiers du PIB et un quart du secteur manufacturier. Les données montrent que leur rentabilité et leur productivité sont significativement inférieures à celles du secteur privé.
Deuxièmement, adopter des politiques macroéconomiques et microéconomiques calibrées concernant le taux de change, le commerce international et l’investissement étranger. La suppression partielle de la loi 51/49 en 2020 constitue déjà un pas dans cette direction, ayant permis l’entrée de grands exportateurs étrangers comme Algerian Qatari Steel. Un autre défi majeur concerne la transition écologique. Le mécanisme européen d’ajustement carbone aux frontières (CBAM) va progressivement taxer les produits à forte empreinte carbone. Comme 80% des exportations algériennes vers l’UE concernent des secteurs sensibles (ciment, fer, acier, engrais), une stratégie de verdissement de la production et de diversification vers des industries moins polluantes devient cruciale. La Banque mondiale préconise une double approche de développement des exportations. Une approche verticale centrée sur le développement de chaînes de valeur dans des secteurs à potentiel comme l’agriculture, les technologies de l’information, les énergies renouvelables et le tourisme. Une approche horizontale visant à améliorer les aspects réglementaires, institutionnels, de financement et de logistique. L’attraction des investissements directs étrangers apparaît comme un levier stratégique pour s’insérer dans les chaînes de valeur mondiales, générer des gains de productivité et stimuler les exportations. La proximité géographique avec l’Europe, un tissu industriel en devenir et des secteurs émergents représentent des atouts considérables. La réussite de cette transformation impliquera de surmonter plusieurs défis structurels : améliorer la productivité des entreprises, adapter le système financier, soutenir la sophistication industrielle et développer une vision stratégique de long terme. L’objectif final est de construire une économie algérienne plus résiliente, diversifiée et compétitive à l’international.
H.A.