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Trump menace et exhorte l’UE à acheter plus de pétrole et gaz US: Quel impact sur les exportations algériennes de gaz ?

La force de l’Algérie réside notamment dans sa politique contractuelle. Le pays privilégie les contrats à long terme avec des clauses de destination strictes et des mécanismes de prix négociés, garantissant une stabilité tant pour les fournisseurs que pour les acheteurs. Cette approche contraste avec la volatilité inhérente aux importations de GNL américain, soumises aux fluctuations du marché spot.

Le président américain élu Donald Trump a menacé vendredi l’Union européenne (UE) de taxes douanières si elle ne réduit pas son excédent commercial avec Washington en lui achetant du pétrole et du gaz.

Pendant sa campagne électorale, Donald Trump avait déjà menacé les Européens de taxer leurs exportations vers l’Amérique à hauteur de 10%. « J’ai dit à l’Union européenne qu’elle devait combler son énorme déficit avec les États-Unis en achetant à grande échelle notre pétrole et notre gaz », a écrit le milliardaire républicain dans un message sur son réseau social Truth. « Sinon, ce sont les TARIFS DOUANIERS jusqu’au bout ! ! ! », a menacé Donald Trump. Dans son commentaire, M. Trump semble plutôt évoquer le déficit commercial des États-Unis avec l’UE. Les importations de biens en provenance de l’UE s’élevaient à 553,3 milliards d’USD en 2022, tandis que les exportations des États-Unis vers les Vingt-Sept représentaient 350,8 milliards d’USD, selon les chiffres américains. L’Union européenne a réagi en soulignant qu’il faut prendre en compte l’ensemble de la balance commerciale. L’UE a certes un excédent commercial « substantiel » en ce qui concerne les biens, mais les États-Unis ont de leur côté un excédent également « substantiel » en ce qui concerne les échanges de services. « Cela n’est pas toujours pris en compte dans le type de messages auxquels vous faites référence », a indiqué ce porte-parole, interrogé sur le message publié par M. Trump sur son réseau social.

Une position solide pour l’Algérie

Cette nouvelle pression intervient dans un contexte particulier pour le marché gazier européen, où l’Algérie s’est récemment hissée à la première place des fournisseurs de l’UE, selon les dernières données d’Eurostat. Avec une part de marché de 23,7% et des exportations s’élevant à 1,4 milliard d’euros en octobre, l’Algérie a dépassé la Russie, reléguée au second rang avec 21,2% des parts de marché, tandis que les États-Unis occupent la troisième position avec 1,2 milliard d’euros d’exportations. Ces déclarations suscitent des interrogations quant à l’impact des menaces de Trump sur la cartographie du marché énergétique européenne et la possibilité de voir la bataille du gaz en Europe relancée. Cependant, plusieurs facteurs suggèrent que l’impact des menaces trumpiennes pourrait être limité. Les analystes considèrent que ces déclarations tonitruantes pourraient n’être qu’une « fanfaronnade » ou une tactique de négociation, caractéristique du style Trump à la veille d’importantes discussions commerciales. La réaction mesurée de Bruxelles confirme cette lecture : l’UE s’est dite « prête à envisager les moyens de renforcer une relation déjà solide, y compris en discutant de nos intérêts communs dans le secteur de l’énergie. » La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait déjà évoqué début novembre la possibilité que les États-Unis fournissent plus de gaz naturel liquéfié (GNL) à l’UE en remplacement du gaz russe. Autrement-dit, la stratégie européenne reste assise sur les mêmes objectifs, soit une diversification qui doit aboutir à une réduction de la dépendance au gaz russe.

Aussi, la position de l’Algérie est particulièrement solide face à ces turbulences potentielles. Septième exportateur mondial de gaz naturel en 2023 avec 52 milliards de mètres cubes, le pays s’appuie sur une stratégie diversifiée combinant exportations par gazoduc (34 milliards de m³) et sous forme liquéfiée (18 milliards de m³). Sa production commercialisée a progressé de 4% en 2023, atteignant 105,48 milliards m³, selon le rapport statistique annuel du GECF. La force de l’Algérie réside notamment dans sa politique contractuelle. Le pays privilégie les contrats à long terme avec des clauses de destination strictes et des mécanismes de prix négociés, garantissant une stabilité tant pour les fournisseurs que pour les acheteurs. Cette approche contraste avec la volatilité inhérente aux importations de GNL américain, soumises aux fluctuations du marché spot. Par ailleurs, l’Algérie occupe une place stratégique dans la politique européenne de diversification des approvisionnements énergétiques. Sa position géographique, ses infrastructures robustes – incluant deux gazoducs et quatre unités de liquéfaction d’une capacité totale de 32,4 millions de tonnes par an – et sa fiabilité historique en tant que fournisseur en font un partenaire privilégié pour l’UE, comme l’illustre la récente augmentation de 31% de ses exportations de GNL. Si les déclarations de Trump créent une certaine incertitude sur le marché gazier européen, la solidité des fondamentaux algériens et l’importance stratégique du pays dans l’architecture énergétique européenne suggèrent que sa position dominante devrait se maintenir, indépendamment des pressions américaines.

Samira Ghrib

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