La campagne de l’extrême droite française vertement décriée: La Souveraineté de l’Algérie, une ligne rouge
Les relations franco-algériennes traversent une nouvelle période de turbulence, marquée par des tensions diplomatiques croissantes sur fond d’une montée des discours algéro-phobes de l’extrême droite française. Pour le spécialiste des relations internationales Gamal Abina, la persistance de ces tensions trouve sa source dans le rapport problématique que la France entretient avec son histoire coloniale, n’ayant « toujours pas digéré sa défaite » en Algérie. S’exprimant dans l’émission « L’invité du jour » de la radio algérienne, l’expert pointe du doigt l’attitude condescendante persistante de Paris envers Alger, notamment dans son refus de reconnaître pleinement ses crimes coloniaux, une position qui continue d’empoisonner les relations bilatérales 63 ans après l’indépendance. Cette tension s’est particulièrement cristallisée autour des récentes déclarations de Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement National à l’Assemblée nationale française, qui a provoqué l’indignation en affirmant que la colonisation n’était pas un drame et que l’Algérie aurait pu devenir « la Norvège du Maghreb ». Face à ces propos, Abina rappelle avec force que les infrastructures coloniales ont été construites « par le sang et le dur labeur des ouvriers algériens réduits à l’esclavage », dénonçant une lecture de l’histoire « mythifiée » et déconnectée des travaux des véritables historiens. La situation s’est encore détériorée avec la multiplication des incidents impliquant des ressortissants algériens dans les aéroports français, révélant selon Abina une volonté délibérée de l’extrême droite de stigmatiser la communauté algérienne. Cette stratégie s’inscrit dans un contexte plus large de crise politique et économique en France, où certains cherchent à faire de l’Algérie et des Algériens les boucs émissaires des difficultés nationales.
Une campagne dénoncée en France
Cependant, ces positions extrémistes ne font pas l’unanimité en France. Plusieurs voix s’élèvent pour dénoncer cet acharnement contre l’Algérie, à l’image de l’ancienne ministre Ségolène Royal qui a fermement condamné les « discours méprisants » envers l’Algérie, rappelant l’existence d’une « grande civilisation algérienne » brutalement brisée par la colonisation. Dans la même veine, le député de La France Insoumise Bastien Lachaud a dénoncé au Parlement l' »algérophobie » comme rente politique de la droite et de l’extrême droite, appelant à « s’opposer à ce déferlement de haine ». Les récentes polémiques, notamment autour de l’expulsion controversée d’un influenceur algérien et de prétendues dettes hospitalières, ont d’ailleurs été largement déconstruites par les institutions françaises elles-mêmes. Le tribunal administratif de Paris a ainsi désavoué le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau concernant la procédure d’expulsion, tandis que le ministre des Affaires étrangères Jean-Noel Barrot a complètement défait la propagande de l’extrême droite sur la dette hospitalière algérienne, confirmant que celle-ci ne s’élève qu’à 2,58 millions d’euros, représentait une situation « très acceptable », sachant que ce montant fait l’objet d’un contentieux sur lequel Paris évite de se pencher. Ces développements révèlent l’émergence d’une autre France, plus lucide sur les enjeux réels des relations franco-algériennes et consciente des dangers d’une instrumentalisation politique de l’histoire coloniale. Face aux défis majeurs auxquels est confrontée la République française – relance économique, déficit budgétaire, positionnement géostratégique, perte d’influence – le recours à des polémiques artificielles avec l’Algérie apparaît comme un « cache-misère » destiné à masquer l’absence de solutions concrètes aux problèmes nationaux en France. La souveraineté de l’Algérie demeure ainsi une ligne rouge intangible, dont la remise en cause par certains cercles français traduit moins une vision politique cohérente qu’un aveu d’impuissance face aux défis contemporains. Comme le souligne Catherine Tricot, directrice de la revue Regards, les attaques contre l’Algérie servent de prétexte pour « développer un discours de guerre de civilisation contre le monde musulman », révélant ainsi les véritables motivations idéologiques derrière ces tensions diplomatiques.
Chokri Hafed