15e Rencontres euro-algériennes des écrivains: La littérature comme mémoire vivante des villes
« La représentation de la ville dans la littérature » a été au cœur des 15e Rencontres Euro-Algériennes des écrivains (REE). Cette manifestation, organisée par la Délégation de l’Union européenne en Algérie, a réuni auteurs algériens et européens autour d’une réflexion commune sur les liens profonds qui unissent la création littéraire et l’espace urbain.
L’ambassadeur de la Délégation de l’Union européenne en Algérie, M. Diego Mellado Pascua, a inauguré ces rencontres en présence d’un parterre d’auteurs, d’éditeurs et de représentants diplomatiques. Dans son discours d’ouverture, il a souligné « l’importance du dialogue interculturel et la richesse des liens littéraires entre l’Europe et l’Algérie », mettant ainsi en lumière la vocation de passerelle culturelle de cette initiative. La première conférence, intitulée « La littérature comme mémoire vivante des villes et témoin de leurs transformations sociales et culturelles », a donné la parole à trois intervenants de renom : l’anthropologue et architecte italien Franco La Cecla, l’auteure algérienne Keltoum Saali et son compatriote, l’écrivain Kaci Djerbib. Leurs réflexions convergent vers une préoccupation commune : la nécessité de réancrer la ville dans son contexte historique et culturel originel. Les intervenants ont mis en exergue le rôle fondamental de la littérature comme gardienne de la mémoire urbaine et de « l’ADN de la ville ». L’espace urbain se révèle être à la fois la scène et le réceptacle d’une succession d’événements historiques et culturels, le lieu où s’imprime une mémoire collective indélébile. Pour étayer leurs propos, ils se sont appuyés sur leurs propres œuvres : « Contre l’Architecture » (2014) de Franco La Cecla, « Le mimosa de décembre » (2011) et « La ville aux yeux d’or » (2021) de Keltoum Saali, ainsi que « M’dina, fragments de villes et autres lieux » (2023) de Kaci Djerbib. Le second panel a abordé le thème « La ville, personnage littéraire à part entière », avec les interventions de l’auteure Bulgaro-belge Irina Papancheva et des écrivains algériens Samir Toumi et Salah Badis. Cette session a exploré la fonction déterminante de la ville dans la construction des personnages romanesques. Les conférenciers ont insisté sur l’importance pour l’auteur de « s’éloigner de tout jugement » qui pourrait entraver le développement naturel du récit. Irina Papancheva a évoqué ses œuvres « She, the island » (2017) et « Brussels Naked » (2022), tandis que Samir Toumi a présenté « Alger, le cri » (2021) et Salah Badis « Des choses qui arrivent » (2023, traduit de l’arabe par Lotfi Nia). À travers ces exemples, ils ont rappelé avec conviction que « la ville n’était pas une fin en soi, mais qu’elle vivait à travers les personnages qui l’animent ». Ces 15e Rencontres Euro-Algériennes des écrivains, organisées en collaboration avec les services culturels des États membres de l’Union européenne représentés en Algérie, se sont affirmées comme un « espace privilégié d’échanges et de réflexion sur le rôle de la ville comme source d’inspiration littéraire ». Elles ont offert aux écrivains des deux rives de la Méditerranée une occasion précieuse d’apporter leurs perspectives et de partager leurs expériences sur la manière dont la ville s’inscrit dans leurs créations littéraires. Au fil des discussions, une idée majeure s’est dégagée : la littérature ne se contente pas de décrire la ville, elle en préserve l’essence, en révèle les métamorphoses et en perpétue la mémoire. Les œuvres littéraires deviennent ainsi des témoignages vivants des mutations urbaines, sociales et culturelles qui façonnent notre histoire commune. Ces rencontres ont également souligné l’importance du dialogue interculturel dans un monde en constante évolution. À travers le prisme de la ville, les auteurs algériens et européens ont pu confronter leurs visions, enrichir leurs perspectives et tisser des liens qui transcendent les frontières géographiques et culturelles. La ville, avec ses ruelles, ses places, ses édifices et ses habitants, se révèle être bien plus qu’un simple décor littéraire. Elle devient un personnage à part entière, doté d’une âme, d’une histoire et d’une identité propre. En ce sens, la littérature contribue à la préservation d’un patrimoine immatériel inestimable : la mémoire collective des espaces urbains qui nous façonnent et nous habitent.
Mohand Seghir