69 ans après le congrès de la Soummam : L’unité nationale face aux manœuvres coloniales
Soixante-neuf ans après l’événement fondateur qui a structuré la Guerre de libération nationale, le congrès de la Soummam continue de résonner comme un modèle d’unité nationale dans un monde marqué par les fragmentations et les tentatives de division des nations.
À l’heure où l’Algérie fait face à de nouveaux défis géopolitiques et où certaines puissances tentent encore de jouer la carte des divisions communautaires au Maghreb et au Sahel, la commémoration de ce moment historique prend une dimension particulièrement symbolique et stratégique. « Le congrès de la Soummam a renforcé au plus haut point l’unité nationale », a affirmé mercredi à Béjaïa l’historien Lahcène Zeghidi, coordinateur général du Comité de la Mémoire auprès de la présidence de la République, lors d’une conférence organisée à l’occasion de la journée du Moudjahid. Cette déclaration, prononcée dans la wilaya même qui a abrité cette assemblée révolutionnaire le 20 août 1956, souligne la pertinence contemporaine d’un événement qui transcende le cadre purement historique pour s’inscrire dans les enjeux actuels de cohésion nationale et de résistance aux ingérences extérieures.
L’intervention de l’historien s’est attachée à démontrer comment cette unité nationale était déjà « un impératif et un repère majeur qui guidait toute la dynamique révolutionnaire envisagée », face à une colonisation française qui déployait des stratégies sophistiquées de fragmentation. « L’unité nationale était sujette alors à une attaque coloniale visant autant la fragmentation du pays que la division du peuple », a-t-il rappelé, établissant un parallèle implicite avec les tentatives contemporaines de déstabilisation qui visent les pays du Maghreb et du Sahel à travers l’exploitation des clivages ethniques, régionaux ou confessionnels.
Cette dimension prend une résonance particulière dans le contexte géopolitique actuel, où l’Algérie joue un rôle croissant de stabilisateur régional face aux crises malienne, libyenne et sahélienne. La référence au congrès de la Soummam rappelle l’expérience algérienne de construction nationale sur la base de l’unité dans la diversité. L’évocation de cette expérience historique résonne également comme un message adressé aux puissances qui tentent encore aujourd’hui d’exploiter les fractures sociales et identitaires pour affaiblir la région.
Zeghidi a particulièrement insisté sur la lucidité du peuple algérien face aux « manœuvres et stratagèmes mis en place par la France coloniale, à la fois pour susciter des divisions entre le peuple, en misant sur des considérations géographiques, ethniques et spirituelles, ou simplement pour susciter des fragmentations territoriales, notamment entre le nord et le sud ». Cette analyse historique trouve un écho direct dans les préoccupations contemporaines de l’Algérie, confrontée à des tentatives de déstabilisation qui utilisent des méthodes similaires, qu’elles émanent d’acteurs régionaux ou internationaux cherchant à fragiliser sa position géostratégique.
« Le peuple n’était pas dupe », a souligné l’historien, « depuis le début de la colonisation, il a fait de l’unité nationale une sacralité, comme en témoigne la multiplication des soulèvements populaires et des mouvements de résistance qui n’ont jamais cessé ». Cette référence à la vigilance populaire contre les tentatives de division revêt une importance particulière à l’heure où l’Algérie consolide son rôle de puissance régionale émergente et où certains cercles tentent de remettre en question sa stabilité interne et sa cohésion sociale. L’orateur a mis en relief les résolutions du congrès de la Soummam qui « toutes, ont été adoptées dans le but suprême d’organiser et d’assurer la victoire à la révolution mais aussi de cimenter l’unité nationale indispensable à la construction du pays ». Cette vision stratégique de l’unité comme fondement de la construction étatique trouve une actualité renouvelée dans le contexte des grands projets de développement que mène actuellement l’Algérie, de la transition énergétique aux investissements dans les nouvelles technologies, en passant par le renforcement de son influence diplomatique en Afrique.
La conférence, qui s’est déroulée à la salle des conférences de la wilaya devant un large public en présence du secrétaire général du Haut-commissariat à l’amazighité Si El Hachemi Assad, initiateur de l’événement en coordination avec l’université de Béjaïa, a été précédée d’une visite symbolique au musée du Moudjahid d’Ifri-Ouzellaguene, lieu historique qui a abrité le congrès le 20 août 1956. La commémoration du congrès de la Soummam dépasse le cadre de l’exercice mémoriel pour devenir un acte politique affirmant la continuité de la vision algérienne d’une nation unie et souveraine, capable de résister aux pressions extérieures et de contribuer à la stabilité régionale.
Malik Ameziane