L’Algérie affiche une reprise économique robuste : Les bons points du FMI
Le FMI souligne une transition positive de l’économie algérienne, forte de réserves solides et d’une croissance soutenue, mais appelée à accélérer ses réformes structurelles pour pleinement exploiter son potentiel économique considérable.
L’économie algérienne a démontré une « forte reprise depuis la pandémie » portée par la hausse des prix des hydrocarbures et l’augmentation des dépenses publiques, révèle le rapport de consultation au titre de l’Article IV 2025 du Fonds monétaire international publié jeudi. Une performance qui positionne le pays sur une trajectoire de croissance positive à court terme, même si des ajustements politiques urgents s’avèrent nécessaires pour consolider cette dynamique. Le conseil d’administration du FMI a conclu sa consultation annuelle avec l’Algérie en soulignant que « les perspectives économiques à court terme restent globalement positives ». Et de préciser que le PIB réel du pays a atteint 3,6% en 2024, soutenu par un secteur non-hydrocarbures particulièrement dynamique. « L’activité non-hydrocarbures est restée forte, soutenue par l’investissement public et la demande de consommation », précise le document, témoignant de la diversification progressive de l’économie nationale. L’institution de Bretton Woods met en avant plusieurs indicateurs encourageants pour 2025. La stabilisation attendue de l’activité hydrocarbures grâce à « l’assouplissement des réductions de production OPEP+ » devrait soutenir une croissance de 3,4% cette année. Cette prévision s’appuie sur la résilience démontrée par l’économie algérienne face aux chocs externes, notamment les répercussions du conflit ukrainien et les sécheresses récurrentes qui avaient alimenté les pressions inflationnistes. Sur le front de l’inflation, les nouvelles sont particulièrement rassurantes. « Les pressions inflationnistes ont considérablement diminué en 2024, l’inflation chutant largement en raison de la baisse des prix alimentaires », observe le FMI. Cette maîtrise de l’inflation, qui devrait « rester modérée », constitue un atout majeur pour le pouvoir d’achat des ménages et la stabilité macroéconomique du pays. Le rapport souligne également la solidité des réserves de change, qui « sont restées fortes » malgré la baisse des exportations énergétiques. Cette robustesse financière offre à l’Algérie une marge de manœuvre appréciable pour naviguer dans un environnement économique mondial incertain.
Creusement du déficit budgétaire
Le rapport avertit, cependant, contre les comptes publics qui se dégradent, le déficit bondissant de 5,5% du PIB en 2023 à 13,9% en 2024, soit plus du double. Pour 2025, le FMI anticipe une croissance de 3,4% « soutenue par la stabilisation de la production pétrolière », mais le déficit budgétaire ne recule que marginalement à 11,5% du PIB. La dette publique brute devrait bondir de 48,5% du PIB en 2024 à 52,5% en 2025, pour atteindre 80,6% en 2030 selon le scénario de référence. Sur le front extérieur, les nouvelles sont contrastées. Si le dinar « a progressé face à l’euro », les exportations pétrolières continuent de chuter, passant de 29% du PIB en 2022 à 18,4% en 2024, creusant un déficit de la balance courante qui devrait se dégrader de -1,1% du PIB en 2024 à -3,7% en 2025. La croissance devrait progressivement ralentir à 2,5% d’ici 2030, tandis que les réserves de change pourraient s’amenuiser dangereusement à 3,2 mois d’importations contre 14 mois actuellement. Le FMI formule des recommandations pour redresser la trajectoire. Pour « stabiliser la trajectoire d’endettement d’ici 2028 », l’institution recommande « un effort de consolidation budgétaire à hauteur de 5% du PIB sur la période 2025-2028 ». Cet ajustement passerait notamment par « une rationalisation des dépenses » et « une augmentation des recettes hors hydrocarbures », estimées à seulement 14% du PIB en 2024. Le rapport pointe particulièrement du doigt « la nécessité de réformer les subventions énergétiques, jugées coûteuses et peu efficaces ». Cette réforme pourrait « générer des revenus supplémentaires annuels substantiels à moyen terme », créant l’espace budgétaire nécessaire pour « des dépenses sociales mieux ciblées ». Le FMI identifie également un potentiel de 2 à 4% du PIB dans la réduction de « l’écart fiscal non-hydrocarbures ». L’institution reconnaît néanmoins certaines avancées notables dans la modernisation de l’État. Elle salue « les progrès accomplis dans la numérisation de la collecte fiscale, la mise en place du budget par programmes et l’amélioration de la transparence des marchés publics ».
Des potentialités considérables
L’analyse du FMI révèle des potentialités considérables pour l’économie algérienne à moyen terme. « En cas de succès de l’ajustement politique et des réformes structurelles », le pays pourrait « réduire le déficit budgétaire, soutenir la diversification des exportations, améliorer le climat des affaires et approfondir les marchés financiers ». Ces perspectives optimistes s’appuient sur les réformes déjà engagées par les autorités. Le FMI reconnaît d’ailleurs les « progrès considérables » réalisés par la Banque d’Algérie dans plusieurs domaines cruciaux. La banque centrale a avancé dans « la supervision basée sur les risques, la gestion de crise et l’assurance du fonctionnement indépendant des entités de supervision ». Ces améliorations renforcent la crédibilité du système financier national et sa capacité à accompagner la croissance économique. Les initiatives gouvernementales pour améliorer l’environnement des affaires reçoivent également une évaluation positive. « Les lois d’investissement et foncière de 2022-23, ainsi que le lancement d’une plateforme numérique guichet unique, constituent des étapes importantes vers la simplification des démarches administratives et la promotion de l’investissement privé », note le rapport. Le FMI salue particulièrement les « réformes récentes pour renforcer la gouvernance et réduire les vulnérabilités à la corruption ». La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la corruption de juillet 2023, la nouvelle loi monétaire et bancaire de juin 2023, ainsi que les initiatives de numérisation pour améliorer le suivi fiscal et la collecte des revenus représentent des « étapes importantes » selon l’institution internationale. L’engagement des autorités algériennes à répondre aux recommandations du Groupe d’action financière (GAFI) témoigne d’une « volonté remarquable de corriger les déficiences » identifiées en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Concernant la politique monétaire, le FMI juge que « la position politique monétaire accommodante actuelle pour contrer la liquidité tendue du secteur bancaire est adéquate » dans un contexte de recul de l’inflation. Le rapport met également en lumière les opportunités offertes par une plus grande flexibilité du taux de change. « Une flexibilité accrue du taux de change améliorerait la capacité de l’économie à absorber les chocs » et « soutiendrait les efforts de diversification de l’économie, en promouvant les exportations non-hydrocarbures ». Malgré les défis fiscaux identifiés, le FMI reconnaît le potentiel substantiel de l’Algérie.
Sabrina Aziouez