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Sahara occidental, relations avec le Maroc et accord de 1968 : Attaf met les points sur les “i” !

Un discours clair, mesuré mais ferme, qui réaffirme les constantes de la politique étrangère de l’Algérie : attachement au droit international, respect de la souveraineté nationale et fidélité aux principes de la décolonisation.

Dans un entretien dense accordé à la chaîne internationale AL24 News, le ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, Ahmed Attaf, a tenu à replacer les choses dans leur juste cadre diplomatique. En une même intervention, le chef de la diplomatie algérienne a répondu point par point aux polémiques soulevées par la récente résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental, aux gesticulations marocaines, et au vote controversé du Parlement français sur l’accord bilatéral de 1968. Un discours clair, mesuré mais ferme, qui réaffirme les constantes de la politique étrangère de l’Algérie : attachement au droit international, respect de la souveraineté nationale et fidélité aux principes de la décolonisation.

« Les fondamentaux de la question sahraouie sont préservés »

Abordant la résolution 2997 du Conseil de sécurité des Nations unies relative au Sahara occidental, Ahmed Attaf a d’emblée souligné que « les fondamentaux de la question sahraouie sont préservés ». Selon lui, le texte adopté ne remet nullement en cause le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination, « droit qui a été découplé par rapport au plan d’autonomie et doit s’exercer conformément à la légalité internationale et à la Charte des Nations unies ». L’Algérie, a-t-il précisé, a constaté avec satisfaction que « le principe que le Maroc a tenté désespérément d’inscrire, celui de sa prétendue souveraineté sur le Sahara occidental, a été enlevé et expurgé des deux références faites à ce principe dans le dispositif du projet de résolution ». La mention litigieuse n’a subsisté que dans le préambule, « avec beaucoup moins de force juridique ». En conséquence, tranche le ministre, « sur le plan du dispositif, il n’y a absolument aucune référence ni à l’État marocain ni à la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental ». Pour Ahmed Attaf, la portée politique de ce résultat est évidente : « Le plan d’autonomie n’est plus le cadre exclusif de règlement de la question sahraouie. La résolution a ouvert le champ à d’autres idées et à d’autres alternatives ». Une manière diplomatique mais ferme de souligner que le Conseil de sécurité n’a pas cédé aux tentatives marocaines de verrouiller le processus onusien.

Le Maroc échoue à imposer son “plan d’autonomie”

Le ministre a rappelé que le Royaume du Maroc avait tenté, lors de la dernière séance du Conseil de sécurité, un « passage en force » en cherchant à faire du projet dit de “l’autonomie” le seul cadre de règlement. Mais cette manœuvre a échoué. « Huit pays ont présenté des amendements contre le projet initial, qu’ils jugeaient inéquitable, injuste et totalement partial », a-t-il révélé. Le texte final, selon Attaf, rétablit un certain équilibre : « La résolution évoque l’autonomie, mais mentionne aussi d’autres alternatives, notamment celles proposées par la partie sahraouie. Le jeu politique et diplomatique reste ouvert ». Et de préciser que le mandat de la MINURSO, la Mission des Nations unies pour l’organisation du référendum au Sahara occidental, n’a subi aucune réduction ni altération. « Au contraire, le projet initial prévoyait une prolongation de trois mois, mais le délai a finalement été porté à une année, ce qui constitue un renouvellement normal. » En somme, loin du récit triomphaliste relayé par certains médias marocains, la diplomatie algérienne considère que cette résolution consacre le maintien des principes fondateurs du dossier : décolonisation, autodétermination et légalité internationale.

Une abstention algérienne motivée par la rigueur juridique

Interrogé sur la non-participation de l’Algérie au vote de vendredi, Attaf a levé toute ambiguïté : « L’Algérie était à deux doigts de voter pour la résolution. Mais il y avait cette petite disposition relative à la “souveraineté marocaine” dans le préambule. Nous avons demandé, la veille du vote, qu’elle soit enlevée et nous aurions voté pour le texte, mais cela n’a pas été fait. » Ce choix d’abstention, explique-t-il, n’est donc pas un refus du texte mais une question de principe : « Techniquement, c’est ce qui a motivé notre décision. Sur le fond, nous partageons la majorité du contenu. » Une position de cohérence, fidèle à la ligne diplomatique algérienne, qui consiste à défendre le droit international sans concession, tout en privilégiant le dialogue et le multilatéralisme. Ahmed Attaf a rappelé que la question du Sahara occidental s’inscrit dans le cadre plus large du processus onusien de décolonisation. « Il existe dix-sept territoires non autonomes inscrits à l’ordre du jour des Nations unies. Tous sont éligibles, sans contestation aucune, à l’exercice du droit à l’autodétermination. Pourquoi devrait-il y avoir un exceptionnalisme sahraoui ? », s’est-il interrogé.

Le ministre a tenu à souligner que « le droit à l’autodétermination est un pilier de la Charte des Nations unies et aussi un pilier de la diplomatie algérienne », rappelant que « c’est la question algérienne qui, aux Nations unies, a été à l’origine de la résolution 1514, laquelle organise tout le dispositif du droit à l’autodétermination ».

Accord de 1968 : « une affaire franco-française »

S’agissant du vote de l’Assemblée nationale française visant à dénoncer l’accord de 1968 régissant la circulation et le séjour des Algériens en France, Ahmed Attaf a affiché une sérénité certaine. « C’est une affaire franco-française, entre l’Assemblée nationale et le gouvernement français. C’est une affaire intérieure qui ne nous concerne pas pour le moment », a-t-il déclaré, tout en précisant que l’Algérie ne réagira officiellement que si le dossier prend une tournure intergouvernementale. Le ministre a expliqué que « l’accord de 1968 est un accord international entre deux gouvernements. Le gouvernement français ne nous a rien communiqué à ce sujet. Donc, au plan gouvernemental, nous n’avons rien vu venir, et nous espérons ne rien voir venir ».

Attaf s’est par ailleurs dit « triste pour la France » de voir un grand pays « faire de l’histoire d’un autre pays, indépendant et souverain, l’objet d’une compétition électorale anticipée ». Il a rappelé, à ce titre, que « cet accord n’a jamais été libéral ni favorable à une immigration massive », mais « un texte restrictif par rapport au régime plus souple issu des Accords d’Évian ». Répondant aux estimations « fantaisistes » de certains députés français évaluant le coût de l’accord à deux milliards d’euros par an, il a tranché : « Ce sont des chiffres totalement infondés. On confond tout, y compris avec l’aide au développement, ce qui n’a rien à voir avec la réalité. »

L’Afrique, cœur de la diplomatie algérienne

Enfin, le ministre d’État a évoqué la dimension africaine de la politique étrangère algérienne. « L’Algérie n’a jamais manqué à ses devoirs envers le continent », a-t-il affirmé, saluant « la fibre africaine marquée du président de la République, Abdelmadjid Tebboune ». Selon lui, « nos partenaires ressentent qu’il y a à la tête de l’Algérie un président qui croit profondément en l’Afrique et qui veut bâtir cette relation sur des réalisations concrètes ». La Foire commerciale intra-africaine (IATF), organisée récemment à Alger, illustre cette ambition. « Ce fut un grand succès pour l’Afrique et pour notre pays », a conclu le chef de la diplomatie. Ainsi, à travers un langage de vérité, Ahmed Attaf a réaffirmé les positions constantes de l’Algérie : défense du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, rejet de toute instrumentalisation politique de l’histoire et engagement indéfectible envers l’Afrique. Une diplomatie de principes, cohérente, fidèle à l’esprit du 1er Novembre et aux valeurs fondatrices de la République algérienne.

Salim Amokrane

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