Bénin : Tentative de coup d’État avortée
Cette tentative de putsch intervient dans un contexte régional marqué par une multiplication des changements anticonstitutionnels en Afrique de l’Ouest et du Centre, où la contagion des coups d’État semble gagner du terrain, menaçant la stabilité démocratique d’une région déjà fragilisée.
Les forces armées béninoises ont déjoué dimanche une tentative de coup d’État menée par un groupe de soldats qui avaient brièvement pris le contrôle de la télévision nationale pour annoncer le renversement du président Patrice Talon, au pouvoir depuis 2016. Le ministre béninois de l’Intérieur, Alassane Seidou, s’est exprimé à la télévision nationale pour confirmer l’échec de la tentative de déstabilisation. « Un groupuscule de soldats a engagé une mutinerie dans le but de déstabiliser l’État et ses institutions. Face à cette situation, les forces armées béninoises et leur hiérarchie ont permis de garder le contrôle de la situation et de faire échec à la manœuvre », a déclaré le ministre, rassurant sur la maîtrise totale de la situation par les autorités légitimes. Cette déclaration est intervenue quelques heures après que des images spectaculaires ont montré au moins huit soldats en uniforme et coiffés de leur casque prendre brièvement la parole sur la chaîne publique pour annoncer un bouleversement institutionnel. Les putschistes autoproclamés, se réclamant d’un « Comité militaire pour la refondation », avaient lu un communiqué annonçant des mesures radicales. « La Constitution de 2025 est suspendue, toutes les institutions sont dissoutes, les activités des partis politiques suspendues jusqu’à nouvel ordre », avait déclaré l’un des soldats lors de cette intervention télévisée qui n’aura finalement duré que quelques minutes avant que le signal ne soit coupé. Le ministre des Affaires étrangères, Olushegun Adjadi Bakari, avait rapidement réagi pour rassurer la communauté internationale sur le maintien de l’ordre constitutionnel. « Il y a une tentative mais la situation est sous contrôle. C’est un petit groupe de militaires. Une grande partie de l’armée est toujours loyale et nous sommes en train de prendre le contrôle de la situation », avait-il déclaré à l’agence Reuters. Le diplomate avait précisé que les soldats mutins avaient seulement réussi à prendre le contrôle de la télévision d’État, sans parvenir à s’emparer d’autres institutions stratégiques, ce qui a facilité la reprise en main rapide de la situation par les forces loyalistes et la garde nationale. L’entourage présidentiel avait également diffusé un communiqué pour couper court aux rumeurs et aux spéculations. « Le président Patrice Talon est en sécurité et l’armée reprend le contrôle. Il s’agit d’un groupuscule de personnes qui ont pris uniquement la télévision. L’armée régulière reprend le contrôle. La ville de Cotonou et le pays sont totalement sécurisés, le président et sa famille aussi », précisait la source présidentielle, insistant sur le caractère isolé et limité de cette tentative de déstabilisation.
Cette tentative de coup d’État survient à un moment particulièrement sensible pour le Bénin, qui doit tenir en avril prochain une élection présidentielle déjà considérée comme un test démocratique majeur pour le pays. Le président Patrice Talon, au pouvoir depuis 2016, a annoncé son intention de ne pas briguer un troisième mandat. La coalition au pouvoir a d’ores et déjà désigné le ministre des Finances Romuald Wadagni comme candidat présidentiel, un homme considéré comme l’un des architectes importants des politiques économiques menées par l’actuelle mandature et qui devra désormais rassurer sur la stabilité du pays.
L’événement de dimanche s’inscrit dans un contexte régional particulièrement troublé. Les coups d’État se sont multipliés ces dernières années en Afrique de l’Ouest et du Centre, créant une véritable contagion putschiste qui menace l’ensemble de l’architecture démocratique régionale. La Guinée-Bissau voisine a connu le mois dernier son neuvième putsch depuis 2020, illustrant la fragilité chronique de certains États de la région. Le Mali, le Burkina Faso, la Guinée et le Niger ont également été le théâtre de changements anticonstitutionnels récents.
Lyes Saïdi

