D’Oum Kalthoum à Dalida : Les astres d’Orient célébrées à l’Institut du monde arabe
Des monuments Oum Kalthoum ou Fairouz, à l’icône pop Dalida, l’Institut du monde arabe à Paris célèbre ces « Divas » de l’Egypte au Liban et au-delà. »L’idée c’est de parler de personnalités exceptionnelles qui ont révolutionné la musique et le cinéma de l’âge d’or du monde arabe (en gros des années 1930 aux années 1970, ndlr) comme Oum Kalthoum, Fairouz, Warda ou Asmahan, des femmes devenues icônes, émancipées de la domination masculine, qui ont réussi par leur courage à vivre leur rêve », synthétise pour l’AFP Hanna Boghanim, une des commissaires de l’évènement. »Divas », exposition enthousiasmante – qui mêle affiches, garde-robes, extraits de concerts immersifs, salons littéraires reconstitués et hologrammes sur fond d’électro – se tient jusqu’au 26 septembre.
Une place de choix est évidemment réservée à Oum Kalthoum, la « Quatrième Pyramide », la voix la plus célèbre du monde arabe. Ce n’est pas seulement un joyau égyptien. Quand elle meurt en 1975, une marée humaine au Caire porte son cercueil mais on la pleure de Bagdad à Casablanca. Du temps de ses récitals chaque premier jeudi du mois à la radio du Caire, c’est tout le monde arabe qui s’arrête pour l’écouter.
« L’Astre de l’Orient », autre surnom, a « cette folie, cette liberté, cette force de caractère et ce tempérament qui ont mis quasiment tout le monde arabe à ses pieds », décrit dans l’émission télé « Entrée libre » le trompettiste Ibrahim Maalouf, qui lui dédie un album, « Kalthoum ». »Ce sont aussi des personnalités politiques, Oum Kalthoum a été l’incarnation du panarabisme avec Nasser (président égyptien emblématique), Warda a défendu la décolonisation algérienne à travers ses chansons, Fairouz (libanaise) a défendu la cause palestinienne et Asmahan (une princesse druze) travaille pour les alliés durant la Seconde guerre mondiale », éclaire Hanna Boghanim.Si Oum Kalthoum a mis tout le monde arabe d’accord, Fairouz « a fait mieux », mettre « tous les Libanais » sur la même longueur d’onde, glisse malicieusement Ibrahim Maalouf dans « Divas », documentaire récent (Planète+). La chanteuse est un ciment national rare dans un pays toujours malade de ses fractures.
Fairouz est la seule de ces étoiles toujours en vie (86 ans). Retirée loin des feux médiatiques (en dehors de son entrevue avec Emmanuel Macron en août 2020), Fairouz n’a pas donné suite aux sollicitations des organisateurs de l’exposition, à leur grand regret.
Warda – dite aussi « Warda l’Algérienne » – a également cassé les codes. En 1972, elle remonte sur scène pour le 10e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie alors qu’elle avait cessé de chanter à la demande de son mari, officier de l’armée. Elle divorce alors pour reprendre une carrière entamée à l’âge de 11 ans au Tam Tam, le cabaret parisien de son père. Elle retourne ainsi en Egypte, pays où elle avait déjà étendu sa carrière au cinéma.
La courte vie d’Asmahan, la moins connue, a tout d’un roman, entre scandales, destin de star entre micro et écran sans oublier l’espionnage au service des alliés. Avec, pour couronner le tout, une mort précoce à 27 ans dans des circonstances encore floues après la découverte de sa voiture dans le Nil…
D’autres femmes clé sont évoquées dans l’exposition, comme l’Egyptienne Samia Gamal, dont la rivale n’est autre qu’une certaine Dalida dans le film « Un verre, une cigarette » (1954), production du Caire devenu cet « Hollywood sur Nil » ou « Nilwood ».
« Dalida permet de faire le lien avec le grand public, qui connaît moins toutes ces divas arabes, souligne Hanna Boghanim. On voulait la montrer dans son contexte égyptien, depuis ce film de 1954 jusqu’au film dramatique, +Le sixième jour+ qu’elle jouera pour Youssef Chahine en 1986 ». Elle meurt l’année suivante.
AFP