Rapport de la Banque mondiale sur l’impact de la pandémie sur l’enseignement : Des alternatives pour éviter la déperdition de toute une génération
Les ravages du covid-19 ne concernent pas uniquement les millions de vies perdues. Comme effets corollaires, la pandémie entraîne aussi des souffrances humaines dues notamment à l’insécurité de l’emploi et de l’aggravation de la pauvreté dans le monde. Dans cet imbroglio dont le constat vient d’être dressé par des experts internationaux de la Banque mondiale, des élèves dans le monde entier sont contraints de rester chez eux au lieu d’aller à l’école. Ils sont plus d’un milliard et demi d’enfants à quitter, forcés, les bancs d’écoles dont 300 mille n’ont pas pu regagner les classes après le retour des autres. Dans leur constat, les mêmes experts rappellent qu’à l’émergence de la pandémie, la quasi-totalité des pays du monde a opté pour les congés scolaires comme moyen d’éloigner les enfants du danger en les gardant loin des écoles et des universités. Le maintien des établissements d’enseignement ouverts allait, affirment-ils, contribuer à une plus grande propagation des infections. Aussi, recommandent-ils, afin d’aplatir la courbe des contaminations et éviter le débordement des hôpitaux, les enfants devaient rester à la maison. Mais, conscients à la fois du coût évident infligé aux enfants et du peu de preuves validant les bienfaits d’une fermeture totale, de nombreux pays d’Europe et certains pays d’Asie de l’Est ont rouvert leurs écoles relativement rapidement tandis que de nombreux pays d’Asie du Sud, d’Amérique latine, du Moyen-Orient et même d’Asie de l’Est ont fait perdurer les fermetures d’écoles pendant des périodes exceptionnellement longues.
Le constat est sans appel. Fin 2021, le nombre de jours d’école perdus dépassait largement 200, soit l’équivalent d’environ une année scolaire et demi avec les conséquences futures sur ceux qui avaient entre 4 et 25 ans en 2020 et 2021 pouvant se traduire par une très forte inégalité intergénérationnelle et l’oubli de beaucoup de ce que l’on a appris auparavant. La Banque mondiale estime d’ailleurs, en 2020, qu’une période de sept mois sans école ferait augmenter le taux de « pauvreté des apprentissages » de 53 à 63 % outre les 7 millions d’élèves supplémentaires qui abandonnent leur scolarité et les répercussions encore plus graves pour les minorités marginalisées et les filles. Du point de vue pédagogique, les séquelles ne seront pas moindre, ajoutent les experts qui prévoient que faute de mesures rapides et vigoureuses, la proportion d’élèves incapables de lire et comprendre un texte simple à dix ans atteindra 70 %. Cette situation creusera plus les inégalités de chances freinant la croissance dans les pays en développement et accroîtra la pauvreté et accentuera les inégalités pour toute une génération. C’est carrément l’avenir d’un milliard d’enfants qui est menacé s’ils ne retrouvent pas le chemin de l’école. Trois axes principaux pour une action globale sont ainsi préconisés pour servir de modèle pour faire face aux futures crises, voire même améliorer la qualité de l’éducation publique par rapport à ce qu’elle était il y a deux ans. D’abord, il faudra rouvrir les écoles dans de bonnes conditions de sécurité. Puis, investir dans l’apprentissage à distance selon un travail effectué par les équipes de la Banque mondiale et de l’OCDE qui ont réalisé une évaluation de l’apprentissage à distance (a) au cours des deux années de pandémie et enfin rattraper les apprentissages manqués et perdus à l’instar des États-Unis où les élèves ont repris l’école l’automne dernier avec environ un tiers des acquis en lecture en moins sur l’année scolaire 2019-2020 par rapport à une année normale. Afin de soutenir ces efforts, le Groupe de la Banque mondiale compte près d’une centaine de projets liés au Covid dans le secteur de l’éducation. Un travail lancé dans une soixantaine de pays, représentant un montant total de 11 milliards de dollars. Un montant exceptionnellement important pour la Banque mondiale, mais qui apparaît relativement modeste comparé aux 72 milliards de dollars mobilisés par le gouvernement fédéral américain pour assurer une réouverture en toute sécurité des écoles publiques.
Akli Amor