6e Sommet du Forum des pays exportateurs de gaz : Les prémices d’une Opep du gaz ?
Le Forum des pays exportateurs de gaz va-t-il opérer une mue afin de devenir une Opep du gaz ? Tout semble l’indiquer. Hier, à Doha les membres du Forum ont affiché des positions communes sur les questions gazières, économiques et géopolitiques. Au regard des crises passées et du contexte actuel, ils plaident pour le renforcement du dialogue et des règles plus justes afin de garantir un approvisionnement « fiable » du marché gazier.
Le 6e Sommet du Forum des pays exportateurs de gaz (GECF) s’est tenu, hier à Doha, dans un contexte exceptionnel marqué par des tensions sur le marché du gaz exacerbées par la crise ukrainienne.
On s’y attendait, le Sommet du GECF a été éminemment géopolitique. Et si le débat avait été orienté, sciemment, ces derniers jours sur les possibilités qu’ont les pays exportateurs de gaz à constituer une alternative au gaz russe, les membres du Forum ont décidé de se présenter en front uni et parler d’une seule voix au nom des producteurs traditionnels de gaz et défendre leurs intérêts face aux consommateurs. D’autant que le contexte s’y prête, car le vent a tourné sur le marché gazier en faveur des exportateurs de gaz qui ont aujourd’hui l’opportunité d’imposer des règles plus justes, non seulement sur le marché gazier, mais aussi en matière de développement durable, de changement climatique, mais aussi et surtout sur le plan géopolitique. La déclaration finale du GECF l’a d’ailleurs souligné sans ambages, les pays membres expriment leur « profonde préoccupation » et leur « désaccord » concernant « les restrictions unilatérales entreprises sans l’approbation du Conseil de sécurité de l’ONU contre des pays membres qui affectent négativement le développement et le commerce du gaz naturel », ainsi que « l’application extraterritoriale des lois et réglementations nationales » contre des pays membres. Il est difficile de ne pas y voir une référence aux sanctions économiques imposées à certains pays à l’image de la Russie ou encore de l’Iran. Ils ont fait part également de leur « préoccupation face à l’utilisation de l’agenda climatique pour perpétuer les inégalités, l’introduction de pratiques discriminatoires et l’incitation à des mesures protectionnistes en violation directe des règles du commerce mondial ».
Les pays du Forum ont également plaidé pour des règles plus justes sur le marché gazier, l’importance des contrats à long terme pour le gaz et le GNL et des prix équitables et stables pour soutenir la poursuite des investissements dans l’industrie mondiale vitale du gaz, seul moyen de garantir des approvisionnements « fiables ». Car, il faut le souligner, le recours aux marchés spots et les pressions exercées par les consommateurs sur les pays producteurs au plus haut de la pandémie qui ont poussé les prix du gaz en zone négative a lourdement affecté les plans d’investissement dans l’industrie gazière, réduisant les capacités de ces derniers à répondre à la hausse actuelle de la demande. Et cela, le Forum a tenu à le souligner. C’est dans ce contexte que les pays du GECF ont souligné « l’importance de la coordination et de la coopération au sein et entre les pays membres, et du dialogue entre les producteurs, les consommateurs et les autres parties prenantes concernées, pour la promotion de la coopération internationale visant à assurer la viabilité et la durabilité des marchés du gaz ».
Mobiliser plus de producteurs
Ainsi, et 20 ans après sa création le Forum des pays exportateurs de gaz se rapproche d’une Opep du gaz capable d’élaborer une vision commune pour sécuriser les approvisionnements. Un forum qui devra mobiliser davantage de producteurs de gaz pour relever les défis de l’heure. C’est dans ce contexte justement que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a appelé, dans son allocution durant le Sommet du GECF, à mobiliser davantage d’acteurs à travers l’adhésion de nouveaux producteurs de gaz au Forum. Abdelmadjid Tebboune a rappelé que le GECF « est aujourd’hui une organisation gouvernementale internationale reconnue, capable d’attirer l’attention sur de nombreuses questions prioritaires ». En tête de ces priorités, le Président de la République a mis en avant la « mobilisation davantage d’acteurs convaincus de l’importance du gaz naturel pour relever les défis actuels et futurs par l’adhésion de nouveaux Etats exportateurs et producteurs de gaz naturel, renforcer leur rôle et préserver leurs intérêts à travers le dialogue avec les Etats consommateurs qui exploitent le gaz comme moteur essentiel pour développer leurs économies ».
« En tant que membre fondateur de l’organisation, l’Algérie a su démontrer l’importance du gaz naturel en tant que facteur de développement durable, comme l’indique la déclaration de Doha de 2011 », rappelle le Président Tebboune qui précise que « le rôle positif du gaz naturel s’est confirmé durant la pandémie de Covid-19 ».
L’Algérie, un fournisseur fiable
Le Président Tebboune a souligné que “l’Algérie, en sa qualité de membre fondateur du forum, n’a eu de cesse de souligner l’importance du gaz dans le développement durable, qui s’est confirmée, a-t-il précisé, lors de la crise sanitaire induite par la pandémie (Covid-19) où le monde entier a recouru à cette ressource pour satisfaire ses besoins énergétiques ».
Abdelmadjid Tebboune a également rappelé que l’Algérie est « pionnière dans le développement et la valorisation du gaz naturel », et à la tête du progrès réalisé dans l’industrie du gaz naturel liquéfié (GNL). Elle tend à poursuivre le développement de ses ressources « importantes » de gaz naturel « au mieux des intérêts de notre peuple et de la meilleure manière qui soit dans le cadre de la coopération et du partenariat, en veillant à préserver l’environnement », a ajouté le président de la République. Il a dans ce sens souligné que l’Algérie est un fournisseur fiable de gaz et compte le rester. « Mon pays est reconnu pour être un distributeur et un fournisseur fiable de gaz naturel depuis plus d’un demi-siècle et il compte le rester », a-t-il souligné.
Samira Ghrib