Sahara occidental : Le revirement de l’Espagne est une décision « gravissime »
Le Président sahraoui et secrétaire général du Front Polisario, Brahim Ghali, a qualifié, hier, le revirement du gouvernement espagnol sur le conflit au Sahara occidental de décision « gravissime », allant à l’encontre de sa position jusque-là en faveur « d’une solution sur la base des résolutions onusiennes ».
« Il est évident que c’est un virage radical qu’on n’attend(ait) pas de la part d’un pays qui est la puissance administrante de jure du Sahara occidental, ex-colonie espagnole », a déclaré Brahim Ghali dans un entretien accordé au quotidien espagnol El Mundo. « Je me sens comme n’importe quel Sahraoui face à cette décision gravissime. L’Espagne nous a abandonnés à notre sort en 1975 et 47 ans plus tard, ils font la même chose », a ajouté M. Ghali.Avant de poursuivre : « L’Espagne a toujours défendu une solution dans le cadre de l’ONU, sur la base des résolutions » des Nations unies, « ce qui veut dire défendre l’autodétermination du peuple sahraoui pour terminer son processus de décolonisation. C’est pour cela que nous ne comprenons pas cevirage radical du gouvernement espagnol ».
Il est utile de rappeler que la nouvelle position du gouvernement espagnol soutenant le plan marocain de la soi-disant « autonomie » au Sahara occidental a été largement critiquée par la classe politique espagnole, la qualifiant d »‘unilatérale » et de « provocatrice ». D’ailleurs plusieurs manifestations ont été organisées dans les villes espagnoles afin de contester la décision du chef du gouvernement espagnol. La dernière en date a été organisée par l’Association d’amitié avec le peuple sahraoui de la ville espagnole de Majorque, dimanche. Une manifestation de solidarité avec le peuple sahraoui pour dénoncer la position du Premier ministre Pedro Sanchez sur la question du Sahara occidental occupé. Les manifestants ont exprimé leur rejet de la position «partiale» annoncée par Pedro Sanchez en faveur du Maroc, réitérant leur «soutien ferme» au droit du peuple sahraoui à la liberté et à l’autodétermination. La manifestation a vu la participation d’un grand nombre de partisans de la cause sahraouie, ainsi que celle du représentant du Front Polisario dans la région, Ahmoudi Labsir, et des différents courants politiques de la scène espagnole, dirigés par Ramon Urviva, qui a accompagné la cause sahraouie depuis de longues années, jusqu’à ce qu’il soit appelé «Le père de la solidarité avec le peuple sahraoui des îles Baléares». Les îles Baléares connaissent de nombreux mouvements populaires de solidarité avec la cause sahraouie et rejettent la récente décision du Premier ministre espagnol, tout en réaffirmant le droit du peuple sahraoui à choisir librement et en toute transparence son avenir. En mars dernier, la capitale espagnole, Madrid, a été le théâtre de manifestations massives pour dénoncer la position du Premier ministre espagnol, qui soutenait le plan de la soi-disant «autonomie» marocaine au Sahara occidental et afficher une solidarité absolue au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. Plus de 7.000 personnes se sont rassemblées en outre devant le ministère espagnol des Affaires étrangères, de la Coopération et de l’Union européenne pour dénoncer le revirement «soudain» de l’Espagne concernant le conflit dans la dernière colonie d’Afrique.
Notons enfin que le Conseil de sécurité des Nations Unies va se réunir le 20 avril prochain pour discuter du conflit au Sahara occidental, a indiqué le Royaume-Uni qui préside l’instance exécutive de l’ONU pour le mois en cours. Lors de cette réunion, l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Staffan de Mistura, fera un exposé sur les conclusions de sa première tournée dans la région, en janvier dernier, et sur ses différentes rencontres avec les acteurs internationaux concernés par le conflit au Sahara occidental, selon des sources diplomatiques. Ce rendez-vous sera également l’occasion pour le représentant spécial pour le Sahara occidental et chef de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO), le Russe Alexander Ivanko, de présenter un rapport sur la situation sur le terrain avec le développement des actions militaires entre les armées sahraouie et marocaine. Le Conseil de sécurité avait adopté, le 30 octobre 2021, la résolution 2602 prorogeant le mandat de la MINURSO pour une année supplémentaire. Dans son dernier rapport sur le Sahara occidental publié début octobre 2021, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres s’était dit « profondément préoccupé par la forte détérioration » de la situation dans ce territoire occupé par le Maroc, qualifiant la reprise des hostilités entre le Maroc et le Front Polisario de « revers majeur » pour les efforts visant à trouver une solution « pacifique, durable et mutuellement acceptable au conflit » sahraoui.
R.I. avec APS