Lutte contre le terrorisme en Afrique : Lamamra alerte sur la menace des combattants étrangers
Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra a présenté, lors du 16e Sommet extraordinaire de l’Union africaine, un exposé sur le rapport soumis par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune sur le terrorisme et les changements anticonstitutionnels de gouvernement en Afrique, en sa qualité de leader de l’UA en matière de prévention et de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent.
Ramtane Lamamra a indiqué que «ce 16ème Sommet extraordinaire revêt une importance extrême et intervient à point nommé, à la lumière de défis croissants et effrénés imposés par les menaces croissantes que font peser le terrorisme et l’extrémisme violent en Afrique». D’ailleurs, il a mis en garde contre «la propagation de ce fléau dans le continent africain qui est tributaire de l’ampleur du volume et de l’intensité des attaques terroristes qui ciblent aussi bien les forces armées des pays membres que les civiles ». «Nous faisons face aux menaces les plus dangereuses sur la paix, la stabilité et le développement dans le continent», a-t-il alerté, appelant «à s’intéresser de plus près à nombre de facteurs qui ont favorisé la propagation de ce fléau violent ». Il s’agit, selon le représentant diplomatique de l’Algérie «du déplacement et du retour des combattants étrangers, vaincus dans d’autres zones de conflits, particulièrement au Proche orient, du redéploiement des groupes terroristes et l’exploitation de l’espace virtuel pour faire l’apologie de leurs actes, ce qui l’érige en nouveau front dans notre guerre contre le terrorisme et l’extrémisme violent, sans oublier les liens de plus en plus larges entre le terrorisme et le crime organisé transfrontalier, comme le trafic de drogue, la traite d’humains, la migration clandestine, l’exploitation illicite des ressources naturelles et le paiement de rançons». Il a ajouté que ces «facteurs renforcent les capacités des groupes armées, auxquels s’ajoute l’impact négatif du phénomène de changements anticonstitutionnels de gouvernement en Afrique, en termes d’affaiblissement des institutions publiques (institutions relevant des Etats), d’escalades sur la scène sécuritaire déjà vulnérable dans de nombreux pays africains, notamment dans la région sahélo-saharienne», rappelant que «la lutte contre le terrorisme nous interpelle à l’effet de faire montre d’un haut degré de vigilance, de mobilisation et de coopération». Lamamra a évoqué la douloureuse, mais réussie, expérience en matière de lutte antiterroriste, de l’Algérie qui « a payé un lourd tribut durant les années 90, face au mutisme combien retentissant de la communauté internationale, n’a eu de cesse d’affirmer que devant une menace aux proportions mondiales, la coopération internationale et la solidarité deviennent deux nécessités impérieuses». Prenant en compte le net recul de l’intérêt mondiale pour cette question, Lamamra a plaidé à «œuvrer de concert à créer une dynamique internationale, en confirmant que l’Afrique fait face à une menace mondiale sans frontières, un danger qu’il ne convient pas d’associer à une religion ou à une nationalité donnée, ni assimiler à la lutte légitime des peules colonisés pour accéder à leur droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance, tel que stipulé dans la convention de l’OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme de 1999». Il a également appelé les partenaires internationaux «à augmenter leurs aides en faveur des pays africains membres pour soutenir leurs efforts en matière de lutte antiterroriste, en se focalisant sur le traitement des principales causes de ce fléau». Lamamra a réitéré «le besoin davantage de coopération de la part de nos partenaires en préservant leurs terres de toute exploitation par des terroristes, pour mener des actes subversifs ou soutenir des actes terroristes d’une quelconque manière contre d’autres pays».
Tarir les sources de financement
Il a appelé pour «le tarissement des sources de financement du terrorisme qui exige une coopération internationale forte et conforme au cadre juridique actuel», soutenant que «l’Afrique doit être plus déterminée à exprimer le besoin pressant d’opérer des changements et mutations indispensables en vue de former un nouveau modèle des opérations de paix onusiennes, mieux adapté au contexte de lutte contre le terrorisme». «Si nous reconnaissons avoir énormément investi à titre individuel et collectif dans le développement des outils juridiques et pratiques nécessaires, nous devons néanmoins admettre que nos efforts sont demeurés divisés et il est clair qu’ils ne s’accordent ni à l’ampleur ni à la gravité de la menace terroriste», a-t-il déploré, insistant sur l’impératif «d’adapter et de mieux cibler nos outils et interventions pour une riposte collective efficace et durable». Il a préconisé «l’accélération de la mise en application de plusieurs décisions importantes en suspens liées à l’élaboration d’une liste africaine des groupes terroristes, des entités et individus y compris les combattants terroristes étrangers». Le représentant du président de la République aux travaux du sommet extraordinaire africain a évoqué «l’importance du développement et de l’activation d’un mandat d’arrêt africain contre les accusés et condamnés pour des actes terroristes et du fonds de l’Union africaine de prévention et de lutte contre le terrorisme, et la réactivation de la commission du Conseil de paix et de sécurité sur la lutte contre le terrorisme, voire l’élaboration d’un 2e plan d’action africain de prévention et de lutte contre le terrorisme». Il a également mis l’accent sur «l’importance de consentir davantage d’efforts pour libérer et encourager les mécanismes et agences spécialisés déjà en place ». Il s’agit, selon Lamamra, du Centre Africain d’Etudes et de Recherches sur le Terrorisme, d’AFRIPOL (Mécanisme africain de la Coopération Policière) et du Comité des Services de Renseignement et de Sécurité en Afrique, afin de leur permettre d’accomplir pleinement leurs missions en tant que composantes essentielles de la stratégie de l’UA de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, en plus de l’activation en urgence «des processus de Nouakchott et Djibouti en vue de réaliser les capacités opérationnelles de ces cadres précieux en matière de renforcement de la coopération sécuritaire territoriale et l’échange d’informations».
L’expérience algérienne mise en avant
Évoquant l’expérience de l’Algérie, Lamamra a affirmé que «nous sommes parvenus aussi à réaliser que vaincre le terrorisme seulement par des moyens militaires est insuffisant ». Car, a-t-il expliqué «ce fléau trouvera toujours un moyen pour ressurgir», soulignant que «notre réponse collective doit reposer sur une stratégie complémentaire et globale à mettre en œuvre en amont et en aval». En ce sens, il a mis l’accent sur «la nécessité de traiter les véritables causes du terrorisme et lutter contre l’extrémisme et la propagande terroriste, notamment auprès des jeunes», en plus du «traitement des répercussions désastreuses induites par le terrorisme sur la société (tarissement du bourbier), y compris par le soutien aux victimes et le traitement de la question de réinsertion de manière convenable ainsi que la nécessité de rétablir et renforcer la confiance des peuples en la capacités de leurs gouvernements à répondre à leurs besoins». Le chef de la diplomatie algérienne a souligné que «les pays du continent sont appelés à renouveler leur engagement à travailler dans l’unité et la solidarité avec un véritable esprit africain en vue de vaincre le fléau du terrorisme, soulignant l’importance de «la mise en œuvre sérieuse des décisions prises pour qu’elles ne deviennent pas lettre morte», appelant à «la restauration de la confiance en l’importance stratégique des solutions africaines aux problèmes africains tout en œuvrant et à asseoir un partenariat équilibré et responsable qui tienne compte des domaines d’intérêt et des besoins de l’Afrique. Le plus important demeure le fait de mettre fin à la longue marginalisation de l’Afrique sur toutes les scènes internationales». Il a clôturé son intervention en assurant que «l’Algérie restera attachée de manière active et efficace à cet engagement important et ne ménagera aucun effort pour assumer la haute mission que lui a confiée ce Conseil depuis 2017».
Amar Malki