A vous les lauriers, à nous la grâce !
Nous étions, nous journalistes, solidaires durant les années 90… pour le compte des éditeurs qui, eux, ne s’empêchaient pas de faire ami-ami en cachette avec le pouvoir et se servaient de la corporation comme bouclier. Nous avions un syndicat fort que certains ont eu l’audace de s’approprier et s’en accaparer jusqu’à le tuer. Nous avions un conseil de l’éthique mort-né, tué par le défunt Zoubir Souissi et les calculs partisans. Que vaut aujourd’hui un simple journaliste, mal formé, mal payé et mal considéré ? Que vaut un éditeur sans l’ANEP ? Nous avons tué la presse écrite le jour où elle a cessé d’être faite par des journalistes.
Le jour où les confrères se remettront à se lire et à lire les autres journalistes, à les critiquer ou les encourager, les citer dans leur reprise d’article (par honnêteté intellectuelle, par déontologie et correction) et reconnaitre la compétence de l’autre sans le descendre en flamme, ce jour là on parlera d’une presse libérée (de ses complexes, de ses antagonismes et de sa grégarité et de son clanisme et régionalisme).
On touchait 75 dinars la pige à El Moudjahid mais nous étions fiers de voir notre signature paraitre sur cet illustre quotidien. En plus de la passion d’émarger aux côtés de certaines grandes signatures du journalisme, nous étions surtout mus par la seule ambition de briller. Aujourd’hui, vous avez vos lauriers et nous avons notre grâce ! Autres temps, autres mœurs et comme disait mon ami Bob H’midchi pour ceux qui le connaissent et qui n’a jamais été nominé, « noble métier, ignobles confrères ». Sur ce, je m’arrête pour laisser place à ceux qui semblent dérangés par l’émergence d’une nouvelle génération de titres de « 2010, deuxième vague ». Le problème est ailleurs. La première génération n’a pas vu nécessaire ou utile de former la relève. « L’aventure intellectuelle » n’aura été au final qu’une aventure !