Lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme : L’argent des associations sous la loupe
Le projet de loi modifiant et complétant la loi 05-01 du 6 février 2005 relative à la prévention et à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme a atterri au Parlement.
Outre la mise en adéquation de la législation algérienne avec les traités et accords internationaux ratifiés, avec entre autre, l’introduction, parmi les crimes, de celui du « financement de la prolifération d’armes de destruction massive », le nouveau texte se penche sur le financement des associations.A cet effet, l’article 3 de l’avant-projet, dont nous détenons une copie, amendant l’article 5 bis 4 énonce clairement que « toute association ou organisation à but non lucratif qui collecte, reçoit, distribue ou transfert de l’argent, dans le cadre de son activité, est soumise au contrôle approprié de la part de l’instance de contrôle spécialisée ». Cette dernière, ajoute-t-on encore, « met en place les règles qui garantissent la non utilisation de l’argent des associations à des fins de blanchiment d’argent, de financement du terrorisme ou de la prolifération des armes de destruction massive ». Celle-ci est également chargée de « collecter les informations et statistiques qui concernent les associations et organisations à buts non lucratifs ». L’article 5 bis 5 stipule pour sa part que ces associations doivent adopter un certain nombre de mesures prudentielles, comme « refuser des dons ou aides financières d’origine inconnue, ou qui sont le fruit d’activités illégales, ou encore des dons et des aides financières considérés comme un délit ou un crime ou émanant de personnes, morales ou physiques, organisations ou structures impliqués dans des actes, à l’intérieur du pays ou à l’extérieur, en lien avec le terrorisme ». Comme il n’est pas question que ces associations acceptent de l’argent, en numéraire, sans autorisation préalable du ministère concerné. L’article 10 bis 3 rappelle que c’est « le ministère de l’Intérieur qui a la charge de contrôler les associations et organisations à but non lucratif ».
D’autres nouveautés ont également été introduites dans cet avant-projet. Dans l’exposé des motifs, il a été mentionné que « ce projet de loi s’inscrit dans le cadre de la mise en adéquation de la législation nationale avec les engagements internationaux de l’Algérie, notamment les recommandations du GAFI (Groupe d’action financière) ». Il s’agit, entre autres, de se mettre au diapason « des développements que connaissent ces crimes avec l’apparition de nouvelles méthodes de blanchiment d’argent », ajoute-t-on encore. C’est dans cet ordre que le concept d’ « actifs virtuels » par exemple a été introduit dans l’avant-projet. Une précision nécessaire au regard des derniers développements technologiques et la propagation des cryptomonnaies et des portefeuilles virtuels qui sont devenus des canaux de blanchiment d’argen. Par ailleurs, concernant toujours les nouveautés, dans le cas où l’infraction principale, par laquelle en a résulté le blanchiment, n’est pas prouvée, c’est « l’infraction de blanchiment d’argent qui sera considérée comme infraction principale ».
Saisie des avoirs dès le lancement des poursuites
Il est question aussi de la saisie, par l’autorité judiciaire, d’avoirs, en lien avec le blanchiment, « même en l’absence d’une condamnation si ces avoirs sont le résultat d’un acte énoncé dans cette loi » (article 34 bis 6), tout comme « la saisie des avoirs des terroristes même s’il y a extinction des poursuites pour cause de décès ou autres » (article 34 bis 7). L’avant-projet de loi prévoit également la mise sur pieds d’une « commission de suivi des sanctions internationales », prononcées par le Conseil de sécurité, qui sera placée sous l’autorité du ministère des Affaires étrangères. S’exprimant le 17 octobre dernier devant la Commission des affaires juridiques et administratives et des libertés de l’Assemblée populaire nationale (APN), le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Abderrachid Tabi, avait indiqué que ce projet de loi constitue « un outil pour protéger l’économie nationale et le système financier et bancaire contre cette forme de criminalité grave ». Il a ajouté que « cette protection est désormais nécessaire en raison du manque de mécanismes juridiques et réglementaires pour la prévention contre ces crimes ».
Elyas Nour