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Ils ont manifesté massivement dans une trentaine de villes : Les Marocains disent non à la normalisation avec l’entité sioniste

La normalisation des relations entre le Maroc avec l’entité sioniste le 10 décembre 2020 ne passe toujours pas au sein de la grande majorité de la population marocaine. Et cette dernière a tenu à exprimer une nouvelle fois avec véhémence sa ferme condamnation de la trahison de Mohammed VI et du Makhzen qui ont sacrifié la dignité des Marocains et la cause palestinienne sur l’autel de leurs intérêts étroits. Le rejet du rapprochement entre le Maroc et Israël est soutenu par quasiment toutes les sensibilités politiques marocaines.

Répondant à l’appel du «Front marocain de soutien à la Palestine et contre la normalisation », qui regroupe 15 organisations politiques, syndicales et de défense des droits de l’homme, des personnes de tous horizons ont participé samedi à des rassemblements nationaux dans près de 30 villes marocaines, dont Casablanca, Oujda, Meknès, Tanger, Larache, Khemisset, Agadir et Khouribga. Par cette action, ils entendaient « témoigner leur solidarité avec les Palestiniens et condamner la normalisation des relations du Maroc avec l’entité sioniste».

L’ire des Marocains était d’autant plus grande que trois jours auparavant des officiels marocains se sont rendus au Théâtre Mohammed V de Rabat pour célébrer avec des représentants du Bureau de liaison israélien le deuxième anniversaire de la reprise des relations diplomatiques entre les deux pays. Selon plusieurs sources médiatiques, la chargée d’affaires du bureau de liaison israélien au Maroc, Alona Fisher, le conseiller du monarque marocain, André Azoulay, la ministre de la Solidarité, de l’Intégration sociale et de la Famille, Awatef Hayar, et la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali, ont participé à la cérémonie en question. Pour tous les Marocains, il s’agissait là de la provocation de trop.

Trahison et accord de la honte

Pour montrer de quel bois ils se chauffent, les manifestants à Rabat se sont rassemblés devant le bâtiment du parlement où ils ont scandé pendant plusieurs heures des slogans condamnant la normalisation et ont exigé l’annulation de l’accord. Ils ont également brandi des drapeaux palestiniens et porté des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « La normalisation est une trahison » et « La lutte se poursuivra jusqu’à la révocation de l’accord de normalisation ». A la fin de la manifestation, des Marocains ont brûlé le drapeau israélien devant le parlement. Les manifestants se sont promis de poursuivre leur mobilisation jusqu’à obtenir la rupture pure et simple des accords de normalisation israélo-marocains. Dans une déclaration à la presse, le coordinateur du « Front marocain de soutien à la Palestine et contre la normalisation », al-Tayyeb Modad, a insisté sur l’idée que « les manifestations nationales transmettent le message que la nation entière est fermement opposée à la normalisation avec Israël ».

Il est à rappeler que la trahison du régime du Makhzen a commencé en 2020 par un tweet de l’ancien président américain Donald Trump, dans lequel il a annoncé la reconnaissance de la prétendue « souveraineté » du Maroc sur le Sahara occidental et l’ouverture d’un consulat dans la ville sahraouie occupée de Dakhla, en échange de la normalisation des relations entre Rabat et l’entité sioniste. C’était le premier acte de l’odieux marchandage auquel s’étaient prêtés le Maroc, les Etats-Unis et Israël. Le tweet avait été suivi d’une annonce officielle du régime marocain, pourtant conscient du fait que troquer la cause palestinienne pour perpétuer son occupation du Sahara occidental est inutile face à la volonté des peuples de combattre la tyrannie.

Depuis, le peuple marocain s’est régulièrement soulevé pour dénoncer la trahison du Makhzen. Il est sorti massivement à travers toutes les villes du royaume, déclarant son rejet et sa condamnation de la décision unilatérale de la monarchie, qu’il considère comme un « coup de poignard » dans le dos du peuple palestinien. Ces marches de la dignité ont été confrontées à une répression brutale des forces de sécurité qui n’ont pas hésité à agresser les manifestants pacifiques et interdire les slogans et banderoles de solidarité avec le peuple palestinien. Pour leur part, les factions palestiniennes avaient condamné ces accords de normalisation, considérant cette décision comme « une erreur politique qui ne sert pas la cause palestinienne ». Malgré les mises en garde, le régime marocain a normalisé ses relations avec l’entité sioniste, au mépris des peuples marocain et maghrébin qui rejettent cet accord des plus honteux.

En plus de son rapprochement avec Tel-Aviv, le Makhzen a également signé un accord de coopération sécuritaire et militaire avec l’entité sioniste. Mohammed VI a carrément fait du Maroc une base avancée pour l’entité sioniste dans la région. Plusieurs observateurs s’accordent à dire que l’Algérie est la première cible du processus de normalisation, et que le Makhzen, enhardi par son nouvel allié, essaye de porter atteinte à l’Algérie qui défend le droit des peuples sahraoui et palestinien à l’indépendance. L’année dernière, le président de l’Observatoire marocain contre la normalisation, Ahmed Ouihmane, avait d’ailleurs insisté sur l’idée que la normalisation représentait une « menace sérieuse et existentielle tant pour le Maroc que pour l’Algérie», appelant les peuples du Maghreb à contrer « les plans sionistes visant l’unité et la stabilité de la région».

Bombe sociale

A noter que ces manifestations contre la normalisation avec Israël interviennent dans un contexte de crise sociale aiguë et de violation massive des droits de l’Homme au Maroc. Les Marocains sont d’ailleurs ressortis dimanche dans les rues pour dénoncer les arrestations politiques, s’opposer à la corruption et à la tyrannie. A Meknès, les manifestants ont organisé dimanche soir une veillée au cours de laquelle ont été brandis des slogans dénonçant les arrestations politiques dont la dernière en date est l’arrestation de l’ancien ministre des Droits de l’Homme, l’avocat Mohamed Zayan et du chef du Groupe Justice et Charité, Mohamed Baasso.

Les manifestants ont également dénoncé le maintien en détention de blogueurs, de journalistes et de prisonniers d’opinion et d’expression dont le seul tort a été de dénoncer l’injustice. Les manifestants ont réclamé à l’occasion « la libération de tous les prisonniers politiques et d’opinion » et ont souligné que le recours à la répression est destiné en fait à « couvrir l’échec de la gestion du Makhzen dans le domaine du développement économique et social». Des manifestations analogues ont eu lieu à travers tout le Maroc.

Face à la paupérisation vertigineuse de la société marocaine, l’Union marocaine du travail a menacé de s’engager dans des formes de protestation « pour la défense des acquis et des revendications légitimes de la classe ouvrière ». « La centrale syndicale a appelé ses différentes structures à se préparer à s’engager dans toutes les formes de lutte, y compris sectorielles, locales, régionales et nationales, pour la défense des acquis et la réalisation des revendications légitimes de la classe ouvrière », a averti cette centrale syndicale qui regroupe des dizaines de milliers d’adhérents. Actuellement tout le Maroc est en ébullition. Le mécontentement est généralisé. Aucun secteur d’activité n’y échappe. Pour beaucoup d’observateurs, le Maroc s’est transformé en bombe sociale qui peut exploser à n’importe quel moment.

Khider Larbi

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