Lutte contre la spéculation : « La coercition ne suffit pas ! »
Le ministre du Commerce et de la promotion des exportations, Tayeb Zitouni, a affirmé, hier, que les mesures coercitives entrant dans le cadre de la lutte contre la spéculation ne suffisent pas. « Il faut une approche économique globale », a-t-il dit. Pour le ministre, « il n’y a pas de pénurie touchant les produits de large consommation, mais un problème de distribution ». Par ailleurs, celui-ci a estimé qu’il y a eu des « erreurs » dans la gestion des importations. Le ministre a également mis en relief l’importance « d’avoir des chiffres et statistiques exactes », pour maîtriser le dossier de l’approvisionnement du marché…Ce qui ne semble pas avoir été le cas jusque-là.
Parmi les priorités du ministère du Commerce, l’approvisionnement et la régulation du marché, la rationalisation des importations et la promotion et l’encouragement des exportations. Le nouveau ministre du Commerce, Tayeb Zitouni, a décliné, hier, lors de son intervention sur les ondes de la chaîne 1 de la radio nationale, sa feuille de route pour ce qui est des urgences du secteur et rompt clairement avec l’approche de son prédécesseur. D’emblée, et tout en rappelant que la loi s’appliquera avec rigueur en direction des contrevenants, pour ce qui est de la spéculation illicite, celui-ci a estimé que « les mesures coercitives à elles seules ne suffiront pas ». D’après lui, il faudrait une « approche économique globale » dans laquelle s’inscrivent les opérateurs économiques, commerçants…qui, d’après le ministre, « sont des partenaires ». « Le tout sécuritaire ne va pas régler à lui seul le problème », a encore lancé le ministre. Affirmant que la situation du marché « s’est améliorée » ces tous derniers jours, Tayeb Zitouni a tenu à signaler qu’ « il n’y a pas de pénuries des produits de larges consommation » , mais « un problème lié à la distribution ». « Il y a des perturbations au niveau de certaines régions », a-t-il précisé, ajoutant que le ministère se penche sur la mise en place, en collaboration avec d’autres secteurs, d’une feuille de route qui va permettre la « maîtrise des réseaux de distributions ». C’est dans cet ordre-là, que le ministre a insisté sur l’importance de « chiffres et statistiques fiables » qui vont permettre d’avoir une idée précise sur la consommation, distribution, besoins… « On doit connaitre les ratios par habitant, le taux de consommation, les réseaux de distribution, les quantités distribuées dans chaque région », a-t-il indiqué. Des « informations » qui ne semblent pas être complètes jusque-là. Zitouni a cité l’exemple de l’huile de table, avec des chiffres annoncés relatifs aux quantités supplémentaires mises sur le marché qui sont « inexactes ». « On s’est réuni avec les six producteurs. Nous nous sommes enquis auprès d’eux au sujet de leurs capacités et c’est à partir de là qu’on a décidé des quantités qui seront mises sur le marché pour satisfaire la demande durant le mois de Ramadhan », a déclaré Tayeb Zitouni. Ce dernier a indiqué, donc, que la production a atteint 4.900 litres par jour ce qui représente trois fois la demande. L’autre problème auquel fait face le marché est celui relatif au « stockage ». Et c’est toujours lié aux statistiques nécessaires pour établir des prévisions. « Si on avait stocké l’oignon à temps, on ne ferait pas face à ce problème aujourd’hui », a déclaré le ministre qui a enchainé : « il faut faire la différence entre stocker pour spéculer et stocker pour réguler le marché et l’approvisionner lorsqu’il n’y a plus de récolte ».
Plateformes de distribution
Toujours à propos des chiffres, le ministre a évoqué le cas de la viande que les autorités ont décidé d’importer depuis le Soudan, – 20 000 tonnes selon le ministre – en plus des 10 000 veaux pour abattage importés de Brésil. « On entendait qu’il y avait 29 à 30 millions de têtes de bétail, finalement ce n’est pas vrai », a déclaré le ministre. Un « déficit » de ce produit qui a nécessité donc de procéder à son importation « afin de baisser les prix ». En somme, celui-ci a insisté entre autres sur l’importance de « plateformes de distribution » et de l’établissement d’une « cartographie des réseaux de distribution ». « Il n’est pas normal de se retrouver à chaque Ramadhan dans la même situation », a-t-il déclaré.
Pour ce qui est des importations, Tayeb Zitouni a tenu à affirmer qu’il n’y a aucun blocage au niveau des ports pour ce qui est des produits de larges consommations qui sont importés par l’Etat, néanmoins, pour les autres importations, « il y a des choses techniques qui ont étaient décidées qui ont fait que des problèmes surgissent ». Il s’agit globalement de problèmes « bureaucratiques », a ajouté le ministre qui a cité comme exemple le cas d’une marchandise bloquée pendant plusieurs mois à cause d’une erreur orthographique sur un document. « Tous les produits importés, qui sont conformes à la règlementation, vont être libérés », a-t-il affirmé. « Organiser et réguler le marché, oui, mais sans excès », a-t-il ajouté, en indiquant qu’il y avait des documents supplémentaires réclamés aux importateurs qui n’ont fait que compliquer la situation. Pour le ministre, il est question beaucoup plus d’être plus rigoureux avec les importations de produits pour la vente en l’état, « pas la matière première et les intrants ». Mais, d’une manière globale, Tayeb Zitouni a encore réaffirmé qu’ « il fallait mettre un terme à l’anarchie de l’importation et au transfert illicite de la devise, au détriment de la production nationale ». « Il y a eu des usines qui ont été maintenues fermées pour ouvrir la voie à l’importation », a déclaré le ministre, pour qui, en définitif, il est question de contrôler les importations, mais sans affecter la production nationale qui s’appuie sur des intrants ou matière première importée, ni de dérégler le marché.
Elyas Nour