Niger : Les trois principes de la résolution de la crise
Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ahmed Attaf, a indiqué que les entretiens menés avec de hauts responsables américains, lors de sa visite à Washington, ont mené à un accord sur trois grands principes concernant la résolution de la crise au Niger : le respect de l’ordre constitutionnel et démocratique, le rétablissement du président Mohamed Bazoum en tant que président légitime du Niger et la priorité doit continuer à être accordée à la solution du conflit.
Tout le monde ou presque s’accorde à privilégier la solution politique et diplomatique à une intervention militaire dans la crise au Niger. Les plus sceptiques préfèrent donner du temps au temps et attendre, quand les partisans d’une intervention armée continuent d’affuter leurs armes au risque d’embraser toute la région du Sahel. L’Algérie qui désapprouve la solution militaire a exprimé son « profond attachement » au retour à l’ordre constitutionnel au Niger et son « soutien » à Bazoum comme « président légitime », tout en mettant en garde contre les intentions d’intervention militaire étrangère et privilégie la solution diplomatique. Dans une interview accordée au Washington Post au cours de sa dernière visite aux Etats-Unis où il a rencontré son homologue américain, Antony Blinken, le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ahmed Attaf, a souligné que la priorité « doit continuer à être accordée » à la solution politique à la crise au Niger. Attaf dira à propos d’une possible intervention militaire au Niger, évoquée par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) comme dernier recours, que l’option militaire « risque de ne pas contribuer à la bonne résolution du conflit ». Attaf qui déclare « ignorer les exemples d’interventions militaires couronnées de succès », rappelle le cas de l’intervention en Libye et qui « a abouti à une catastrophe pour toute la région ». Et d’expliquer que « personne n’est sûr, même au sein de la CEDEAO, qu’une intervention militaire a une chance acceptable de succès ». « Vous pouvez commencer une intervention militaire, mais vous ne savez jamais comment elle se terminera. Alors ils (la CEDEAO, NDLR) sont très prudents, ils montrent un maximum de retenue concernant cette option », ajoute-il. Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger considère d’ailleurs que l’option militaire, proposée comme dernier recours par les dirigeants ouest-africains, « ne garantit pas le succès de la résolution » du conflit au Niger. « En discutant de la crise au Niger (avec les responsables américains, NDLR), je pense que nous nous sommes mis d’accord sur trois grands principes: le respect de l’ordre constitutionnel et démocratique, le rétablissement du président Mohamed Bazoum en tant que président légitime du Niger et la priorité doit continuer à être accordée à la solution du conflit », avait déclaré Attaf. Et d’ajouter que « Je crois que (sur) ces principes, il y a un accord total entre nous. Nous devons maintenant essayer de travailler ensemble pour traduire ces principes dans la réalité politique du Niger ».
Armées de terroristes
Attaf et en réponse à une question posée par le journaliste concernant la menace du terrorisme au Sahel, déclarera qu’en « ce qui concerne le Sahel, on a cessé de parler de groupes armés, on parle d’armées de terroristes. Et nous avons vraiment affaire dans la région à des armées de terroristes qui menacent directement le Burkina Faso, le Mali, certaines régions du Tchad et le Niger ». Il ajoutera que pour l’Algérie et les Etats-Unis aussi, la situation dans la région « est très grave » et nécessite « une forte coordination et une coopération étroite entre les pays de la zone pour relever ce défi ».
Attaf fera également remarquer à propos de la migration irrégulière qu’il ne s’agit pas exclusivement d’« une question politique que l’on peut traiter dans le cadre d’un accord international. Dans cette région (Niger, Mali, Tchad et toute l’Afrique de l’Ouest), il s’agit également d’un énorme problème économique ». Et d’expliquer que ces gens quittent leur pays « parce qu’ils sont à la recherche d’une vie meilleure et, pour certains d’entre eux, pour nourrir leur famille. Il faut donc traiter le problème sur le plan politique et diplomatique. Mais si la composante économique de la solution n’est pas présente, le problème ne sera pas résolu ».
Le soutien de Washington à Staffan de Mitura
Au cours de sa visite à Washington, le chef de la diplomatie algérienne a également accordé un entretien au site d’information « Al-Monitor ». Un entretien au cours duquel il est revenu sur la déclaration américaine publiée après sa rencontre, le 9 août courant, avec le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, dans laquelle le chef de la diplomatie américaine « a réitéré son plein soutien » au travail de l’Envoyé personnel du SG de l’ONU pour le Sahara occidental, Staffan de Mistura. Dans ce sens, Ahmed Attaf a salué le soutien apporté par l’administration américaine au travail de l’Envoyé personnel du SG de l’ONU pour le Sahara occidental, Staffan de Mistura, « alors qu’il consulte intensivement toutes les parties concernées pour parvenir à une solution politique ». Attaf soulignera à cet effet
que l’administration Biden « n’a pas du tout approuvé » la décision de l’ancien président américain Donald Trump concernant la « prétendue souveraineté » du Maroc sur le Sahara occidental. « L’administration Biden n’a pas du tout approuvé la décision de Trump. Au contraire, elle prend explicitement ses distances avec la position exprimée par l’ancien président américain », a-t-il affirmé. Dans un autre chapitre, celui des relations algéro-américaines, Attaf affirme que « nous travaillons à renforcer l’amitié algéro-américaine. Vous ne pouvez pas imaginer la substance que ces relations ont acquise au cours des deux dernières années en termes de dialogue politique.
Attaf a estimé que la présence de compagnies pétrolières et gazières américaines en Algérie était l’un des signes des importantes relations entre les deux pays. Revenant sur la récente visite du président de la République Abdelmadjid Tebboune en Chine à la mi-juillet où il a signé près de 20 accords avec son homologue chinois, Xi Jinping et les relations entre l’Algérie et la Chine et dans ce pays, Attaf a tenu à lever un quiproquo en faisant savoir que l’Algérie adopte le principe de l’intérêt national dans ses relations internationales. « Si c’est la Chine, c’est la Chine. Si c’est la Russie, c’est la Russie. Si ce sont les Etats-Unis, ce sont les Etats-Unis. La chose la plus importante est notre intérêt national », rassurera-t-il. De même que pour la crise en Ukraine, le chef de la diplomatie algérienne fera savoir que l’Algérie, qui occupera un siège non permanent au Conseil de sécurité en 2024, soutenait « une solution politique au sein des Nations unies ».
Lyes Saïdi