Afrique du Sud : L’ANC travaille à former une coalition
L’ANC au pouvoir en Afrique du Sud depuis trente ans, qui a perdu sa majorité au Parlement cette semaine, a confirmé hier son intention d’entamer des discussions avec d’autres partis politiques pour former un gouvernement de coalition.
Après dépouillement de 99,9% des bulletins de vote, le Congrès national africain (ANC) du président Cyril Ramaphosa n’a obtenu que 40,2% des voix, une claque sévère par rapport aux 57,5% qu’il détient dans le Parlement sortant. Ce résultat marque un tournant historique pour l’Afrique du Sud, où l’ANC jouit d’une majorité absolue depuis 1994, lorsque le parti de Nelson Mandela a sorti le pays des griffes de l’apartheid et l’a fait entrer en démocratie. L’ANC reste le parti le plus important au Parlement. Et c’est la nouvelle Assemblée qui sera chargée d’élire le prochain président courant juin. L’ANC doit ainsi forger des alliances, soit pour former un gouvernement de coalition avec un ou plusieurs partis, soit pour persuader d’autres partis de soutenir la réélection de M. Ramaphosa qui constituerait un gouvernement minoritaire de l’ANC, qui devrait chercher au coup par coup des alliés pour faire passer son budget et ses projets de loi.
« L’ANC s’engage à former un gouvernement qui reflète la volonté du peuple, stable et capable de gouverner efficacement », a déclaré son secrétaire général Fikile Mbalula, en précisant que le parti mènerait des discussions en interne et avec d’autres partis « ces prochains jours ». « Les électeurs ont montré qu’ils attendaient des dirigeants de ce pays qu’ils travaillent ensemble, dans l’intérêt de tous », a-t-il ajouté devant la presse, alors que la proclamation officielle des résultats est attendue en fin de journée.
« Nous voulons assurer au peuple sud-africain que nous avons entendu ses préoccupations, frustrations et mécontentement », a ajouté M. Mbalula. M. Ramaphosa a fait savoir qu’il prononcerait un discours lors de la cérémonie de proclamation des résultats, alors que certains partis ont fait état d’irrégularités dans le décompte des voix. Le plus bruyant d’entre eux est l’uMkhonto weSizwe (MK) de l’ex-président Jacob Zuma, 82 ans, qui a demandé samedi soir un report de cette proclamation, dans une brève déclaration aux sous-entendus menaçants. « Si cela arrive, vous allez nous provoquer », a-t-il déclaré. « Les résultats ne sont pas corrects (…) Ne créez pas de problèmes là où il n’y en a pas », a-t-il prévenu, se plaignant de problèmes « graves » sans autres précisions. Son incarcération en juillet 2021 pour outrage avait provoqué des émeutes qui ont fait plus de 350 morts. Les forces de l’ordre sont « prêtes à assurer des conditions paisibles » dans la foulée de l’élection et il n’existe « aucune place pour des menaces d’instabilité », a mis en garde le ministre de la Police, Bheki Cele, devant la presse. A ses côtés, la ministre de la Défense, Thandi Modise, a précisé que le gouvernement n’avait pas été « directement » en contact avec le parti MK, mais a appelé « au calme » et au respect de la loi.us Malema, deux ex-figures de l’ANC ayant fait sécession. Le MK devient la troisième force politique du pays, avec 14,59% des suffrages, un score sidérant pour un parti fondé il y a seulement quelques mois. Très implanté dans la région zouloue, il a martelé qu’il allait remporter les deux tiers des voix aux législatives. La commission électorale a affirmé que « tout ce qui se présente(rait) à (elle) » serait examiné, faisant état de 24 cas de recomptages. L’ANC pourrait composer une coalition sur sa droite, avec le premier parti d’opposition l’Alliance démocratique (DA), ou sur sa gauche radicale, avec le MK de Zuma ou l’EFF de Juli. Le MK a fait savoir qu’il ne discuterait pas avec l’ANC tant que Cyril Ramaphosa resterait à sa tête. Mais M. Mbalula a balayé cette exigence : « C’est une zone où nous n’irons pas. Aucun parti ne nous dictera de tels termes », a-t-il insisté.
R.I. avec agences