ContributionDébats

OCS, BRICS et nouvelle recomposition du pouvoir économique mondial

par Abderrahmane Mebtoul

Professeur des universités, docteur d’État 1974 en management stratégique et expert international.

Le devenir des organisations comme les BRICS et l’OCS dépendra des rapports de force pour la recomposition du nouvel ordre mondial.

L’Organisation de coopération de Shanghai est une organisation intergouvernementale créée à Shanghai le 15 juin 2001, avec la Russie, la Chine et quatre anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale : le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan et le Tadjikistan. En 2016, l’organisation s’est élargie pour inclure l’Inde et le Pakistan et en juillet 2023 l’Iran qui était observateur depuis 2005. Comme pour les BRICS, cette organisation milite pour un monde multipolaire basé sur le co-développement et la lutte contre les inégalités au niveau planétaire. Se réclamant de ce que l’on appelle « l’esprit de Shanghai », en termes géographiques, l’OCS est la plus grande organisation régionale couvrant 34 millions de km2. Le 22e sommet qui s’est tenu les 15 et 16 septembre 2023 à Samarcande, en Ouzbékistan, regroupant 14 pays a mis l’accent sur l’instauration d’une confiance mutuelle, l’équilibre et la diversification en matière de sécurité, d’économie et de diplomatie et une plus grande liberté d’action politique dans les relations étrangères par la non-ingérence dans les affaires intérieures, alors que les axes futurs de l’organisation ont été définis.

Les neuf membres de l’organisation sont actuellement la Chine (en 2022 la Chine disposait de 17 963 milliards de dollars de PIB pour une population d’un milliard 400 millions et un PIB par tête d’habitant de 9 605 dollars) ; la Fédération de Russie (2 240 milliards de dollars de PIB, un PIB par tête d’habitant de 11 300 dollars pour une population de 146 millions) ; l’Inde (3 385 milliards de dollars de PIB pour une population de 1,38 milliard d’habitants en 2021 mais a dépassé la Chine en 2023 avec 1,4286 milliard d’habitants et un PIB par tête d’habitant de 2 036 dollars) ; le Kazakhstan (220 milliards de dollars de PIB pour une population de 20 millions et un PIB par tête d’habitant de 11 290 dollars) ; le Kirghizistan (12 milliards de dollars de PIB, un PIB par habitant de 1 350 dollars pour une population de 10 millions) ; l’Ouzbékistan (80 milliards de dollars de PIB pour une population de 33 millions et un PIB par tête d’habitant de 1 263 dollars) ; le Pakistan (376 milliards de dollars de PIB pour une population de 221 millions et un PIB par tête d’habitant de 1 555 dollars) ; le Tadjikistan (10,5 milliards de dollars de PIB, un PIB par habitant de 1 750 dollars pour une population de 6,6 millions) ; l’Iran (388 milliards de dollars de PIB pour une population de 84 millions et un PIB par tête d’habitant de 5 491 dollars). Pour ces neuf pays membres nous avons un PIB total de 24 674 milliards de dollars soit environ 25% du PIB mondial de 2022 évalué à 103 000 milliards de dollars pour une population approchant 3,4 milliards d’habitants sur une population mondiale depuis le 1er janvier 2024 dépassant les 8 milliards d’habitants, la Chine représentant 70% du PIB de ces neuf pays. Nous avons trois États observateurs souhaitant devenir membres à part entière et les huit partenaires qui sont : l’Afghanistan (14 milliards de dollars de PIB en 2021 avec des données contradictoires, un PIB par tête d’habitant de 350 dollars pour une population estimée par l’ONU à 40 millions) ; le Belarus (73 milliards de dollars pour une population de 9 millions et un PIB par tête d’habitant de 6 306 dollars) ; la Mongolie (17 milliards de dollars de PIB, un PIB par tête d’habitant de 4 250 dollars pour une population de 3,5 millions). Le PIB total de ces trois membres est de 174 milliards de dollars pour une population de 52,5 millions d’habitants. Nous avons également 10 partenaires de dialogue dont le dernier en date est l’Arabie saoudite qui vient de s’y associer depuis le 29 mars 2023 avec 1 108 milliards de dollars de PIB pour une population de 35 millions et un PIB par tête d’habitant de 23 566 dollars. Le Koweït a procédé les 4/5 mai 2023 dans la ville de Panaji, en Inde à la signature d’un protocole d’accord comme partenaire dans une première phase ambitionnant de devenir membre dont le PIB en 2022 était de 184 milliards de dollars, un PIB par tête d’habitant de 26 787 dollars pour une population de 2,7 millions. Pour les autres pays nous avons : la Turquie membre de l’OTAN (905 milliards de dollars de PIB, un PIB par tête d’habitant de 13 990 dollars pour une population de 85 millions) ; le Qatar (237 milliards de dollars de PIB, un PIB par habitant de 83 900 dollars pour une population de 2,8 millions dont selon l’ONU 300 000 nationaux) ; l’Égypte (404 milliards de dollars de PIB pour une population de 102 millions et un PIB par tête d’habitant de 2 573 dollars) ; l’Arménie (19 milliards de dollars de PIB, un PIB par habitant de 6 000 dollars pour une population de 3 millions) ; l’Azerbaïdjan (78 milliards de dollars pour une population de 10 millions et un PIB par tête d’habitant de 4 569 dollars) ; le Cambodge (29 milliards de dollars de PIB, un PIB par habitant de 1 800 dollars pour une population de 17 millions) ; le Népal (41 milliards de dollars de PIB, un PIB par tête d’habitant de 1 080 dollars pour une population de 30 millions) ; le Sri Lanka (74,40 milliards de dollars de PIB, un PIB par habitant de 3 900 dollars pour une population de 22 millions). Le PIB cumulé des membres, des observateurs et des partenaires au dialogue totalise en 2022, selon les données de la Banque mondiale, près de 28 000 milliards de dollars soit près de 28% du PIB mondial, pour une population dépassant les 45% de la population mondiale.

En comparaison aux BRICS, plusieurs pays faisant partie des deux organisations, les BRICS étant constitués de cinq États avant la dernière réunion en Afrique du Sud, la Chine, l’Inde, la Russie, le Brésil et l’Afrique du Sud et les pays retenus comme nouveaux membres dont l’Arabie Saoudite, l’Argentine, les Émirats arabes unis, l’Égypte, l’Iran et l’Éthiopie. Le PIB cumulé des pays fondateurs des BRICS est de 25 914 milliards de dollars de PIB selon les données officielles de la Banque mondiale pour 2022 soit près de 26% du PIB mondial pour une population approchant 3,2 milliards d’habitants, la Chine représentant en 2022 pas moins de 69,32% du BRICS et près de 18% du PIB mondial. En ce qui concerne les nouveaux membres, ces derniers ont un PIB cumulé d’environ 3 167 milliards de dollars ce qui donne un total pour les 11 pays de 29 000 milliards de dollars soit 29% du PIB mondial pour 2022, pour une population approchant les 45% de la population mondiale. Or, en comparaison, en s’en tenant uniquement au G7, ce dernier totalise 43 706 milliards de dollars de PIB sur un PIB mondial de 103 000 milliards de dollars en 2022, soit près de 44% du PIB pour moins d’un milliard d’habitants. Respectivement, nous avons : l’Allemagne (4 072 milliards de dollars), le Canada (2 139 milliards de dollars), les États-Unis d’Amérique (25 462 milliards de dollars), la France (2 782 milliards de dollars), le Royaume-Uni (3 070 milliards de dollars), l’Italie (2 010 milliards de dollars) et le Japon (4 131 milliards de dollars) et pour le PIB par tête d’habitant pour les pays du G7 selon les données de la Banque mondiale 2022, nous avons l’Allemagne 63 150 dollars, le Canada 58 400 dollars, les États-Unis d’Amérique 76 399 dollars, la France 55 493 dollars, le Royaume-Uni 54 603 dollars, l’Italie 51 865 dollars et le Japon 45 573 dollars par habitant. Pour l’IDH selon le rapport du PNUD intégrant 3 facteurs : l’espérance de vie à la naissance, le niveau d’éducation et le revenu national brut par habitant. L’IDH se présente sous la forme d’un nombre situé entre 0 et 1, nous avons : l’Allemagne à la 9ème position avec une note de 0,942, le Canada 15ème position avec une note de 0,936, les États-Unis d’Amérique à la 21ème position avec une note de 0,921, la France à la 28ème position avec une note de 0,903, le Royaume-Uni à la 18ème position avec une note de 0,929, l’Italie à la 30ème position avec une note de 0,895 et le Japon à la 19ème position avec une note de 0,925. Et pour le remplacement du dollar qui d’ailleurs ne fait pas l’unanimité au sein des BRICS, il faut être réaliste, ce n’est pas pour demain, peut-être en 2030 car selon les données du FMI du 28 avril 2023, la part du dollar dans les paiements mondiaux s’élève à environ 38 %, l’euro faisant jeu égal avec le dollar et la part du dollar dans les réserves de changes mondiales est passée de 71 % en 1999, à 58 % en 2022, l’euro 20,5 %, le yen 5,5 %, la livre sterling 5 % et le yuan chinois 2,7 %. Aussi compte tenu des importantes disparités économiques, de systèmes politiques et économiques différents avec des alliances économiques et militaires différentes, devant retenir que les principaux courants d’échange entre 2022/2023 se font toujours avec l’Occident, pour preuve les principaux partenaires de la Chine sont les USA et l’Europe, il reste un long chemin à parcourir tant pour les BRICS que pour les membres de l’OCS, tout dépendra entre 2024/2030 de l’accroissement de leur poids économique au sein du PIB mondial.

En conclusion, dans les relations internationales n’existent pas de sentiments mais que des intérêts et en ce XXIème siècle la puissance d’une Nation se mesure au poids de son économie et le devenir des organisations comme les BRICS et l’OCS dépendra des rapports de force pour la recomposition du nouvel ordre mondial.

ademmebtoul@gmail.com

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