G20: Un engagement pour une fiscalité mondiale plus juste
Les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales du G20 ont conclu vendredi une réunion de trois jours en adoptant un communiqué conjoint qui marque un tournant dans la lutte contre l’évasion fiscale et la promotion d’une répartition plus équitable des richesses à l’échelle mondiale.
Au cœur des discussions : la taxation des grandes fortunes. « Nous nous efforcerons de coopérer afin de faire en sorte que les individus possédant un patrimoine net très important soient imposés de manière efficace », affirme le communiqué final. Cette déclaration intervient dans un contexte où les inégalités se creusent, les 1% les plus riches ayant accumulé plus de 40.000 milliards de dollars de nouvelle richesse en seulement dix ans.
Fernando Haddad, ministre brésilien des Finances et coordinateur de cette réunion, a qualifié la publication de ce communiqué de « victoire pour la communauté internationale après plusieurs années ». Le Brésil, qui assure actuellement la présidence tournante du G20, a placé la lutte contre la faim, la pauvreté et les inégalités au cœur de ses priorités.
La réunion a mis en lumière plusieurs axes de réforme. Tout d’abord, le renforcement de la transparence fiscale, avec un accent mis sur l’amélioration des mécanismes de partage d’informations entre pays pour lutter contre la dissimulation de patrimoines. Ensuite, la prévention de l’érosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices, visant à combattre les stratégies d’optimisation fiscale agressive des multinationales qui privent les États de ressources essentielles.
L’application d’une fiscalité progressive aux personnes très fortunées est également au programme, avec l’élaboration de systèmes fiscaux qui imposent davantage les hauts revenus et les grands patrimoines. Enfin, le G20 préconise des réformes du Fonds monétaire international et le renforcement des banques multilatérales de développement.
Le communiqué appelle à un « réalignement des quotes-parts » au sein du FMI pour mieux refléter le poids économique réel des pays membres, tout en protégeant les intérêts des nations les plus pauvres. « Nous reconnaissons l’urgence et l’importance d’un réalignement des quotes-parts afin de mieux refléter les positions relatives des membres dans l’économie mondiale, tout en protégeant les quotes-parts des membres les plus pauvres », précise le texte.
Cependant, des divergences subsistent quant au cadre institutionnel le plus approprié pour mener ces réformes. Deux options se dessinent : l’OCDE et l’ONU. Janet Yellen, secrétaire américaine au Trésor, a déclaré à Reuters qu’elle pensait que l’OCDE était l’organisation la mieux placée pour prendre en charge de telles discussions. « Nous ne souhaitons pas voir cela passer à l’ONU », a-t-elle affirmé, ajoutant que l’OCDE était « une organisation fondée sur le consensus. Nous avons fait d’immenses progrès, et l’ONU n’a pas l’expertise technique pour (s’occuper de) cela ». En revanche, Guilherme Mello, un responsable au sein du ministère brésilien des Finances, a souligné que la convention-cadre sur la coopération fiscale internationale de l’ONU représentait une victoire pour les pays du Sud, alors que nombre d’entre eux ne sont pas membres de l’OCDE. Il a toutefois reconnu que tant l’ONU que l’OCDE étaient des forums légitimes et que les discussions sur les moyens de taxer efficacement les « super-riches » se poursuivaient. L’enjeu est de taille : il s’agit de concevoir un système fiscal capable de s’adapter à une économie mondialisée où les richesses circulent rapidement, tout en garantissant une contribution équitable de chacun au bien commun. Les défis sont nombreux, allant de la complexité technique des mécanismes fiscaux à mettre en place, à la nécessité d’un consensus politique entre des pays aux intérêts parfois divergents. Les prochains mois seront cruciaux pour transformer ces engagements en actions concrètes. Il faudra notamment définir précisément ce que l’on entend par « patrimoine net très important » et établir des seuils d’imposition. L’élaboration de mécanismes de coopération internationale efficaces pour traquer les capitaux cherchant à échapper à l’impôt sera également cruciale.
L’harmonisation des législations fiscales pour éviter les failles exploitables par les plus fortunés, la mise en place de systèmes de contrôle et de sanction dissuasifs, ainsi que l’assurance d’une répartition équitable des recettes fiscales entre les pays, notamment en faveur des économies en développement, sont autant de chantiers à mener.
La réussite de cette initiative dépendra de la capacité des nations à dépasser leurs intérêts immédiats pour œuvrer à un bien commun global. Elle nécessitera aussi une volonté politique forte face aux lobbies et aux résistances des détenteurs de grandes fortunes.
R.I.