Un système d’alerte précoce contre les inondations
Face à la recrudescence des événements météorologiques extrêmes, conséquence directe du changement climatique, l’Algérie s’emploie à renforcer ses capacités de prévision et d’anticipation. Selon Said Chelmouni, chargé de mission à l’Office nationale de la météorologie (ONM), plusieurs initiatives sont en cours pour doter le pays d’outils plus performants.
L’une des priorités est la mise en place prochaine d’un système d’alerte précoce spécifiquement dédié à la lutte contre les inondations. Ce projet, fruit d’une collaboration entre l’ONM, l’Agence nationale des ressources hydriques (ANRH), l’Agence nationale de gestion intégrée des ressources en eau (Agire) et la Délégation nationale des risques majeurs (ANRM), vise à mieux prévoir et anticiper les inondations dévastatrices qui se multiplient, a expliqué le responsable hier lors d’une intervention sur les ondes de la Radio algérienne. Et d’ajouter que ce système d’alerte précoce s’appuiera sur une commission mixte chargée de sa mise en œuvre. Au-delà de ce projet dédié, l’ONM travaille de manière continue pour améliorer ses capacités de prévision météorologique à différentes échelles temporelles. Les efforts portent notamment sur le perfectionnement des modèles de prévision saisonnière, basés sur des statistiques et des scénarios, afin d’affiner les prévisions à moyen terme, explique Said Chelmouni. Le renforcement du « no-casting », c’est-à-dire les prévisions à très court terme (quelques heures), permettant de donner l’alerte rapidement aux autorités et à la population, est également une priorité, précise-t-il. Le responsable de l’ONM explique aussi que l’exploitation de la climatologie et le déploiement d’une veille météorologique permanente pour surveiller en temps réel l’évolution des phénomènes font aussi l’objet d’attentions particulières. Enfin, le perfectionnement du système d’alerte précoce existant, avec ses trois phases (avant, pendant, après), vise une meilleure diffusion de l’information auprès des décideurs et du public.
Ces différentes initiatives témoignent de la volonté des pouvoirs publics de se doter d’outils de prévention et de gestion des risques naturels à la hauteur des enjeux. Elles s’inscrivent dans un contexte où l’Algérie est de plus en plus exposée aux phénomènes météorologiques extrêmes, conséquence du changement climatique. Ainsi, le chargé de mission de l’ONM, Said Chelmouni, souligne que le Grand Sud du pays connaît une « tropicalisation » de son climat, avec des pluies diluviennes d’une intensité équivalente aux quantités annuelles moyennes. La région de Béchar a par exemple reçu 105 millimètres de pluie en septembre dernier, soit l’équivalent d’une année de précipitations. Ce type d’événements pluvieux intenses est désormais classé dans la catégorie des « phénomènes extrêmes » par les services météorologiques, afin d’améliorer les prévisions à l’avenir. Malgré ces efforts, la mission de localiser et de quantifier précisément les orages violents reste difficile, notamment dans le Grand Sud algérien où ces phénomènes « surprennent » souvent. Les périodes de transition saisonnière, en été et en automne, sont particulièrement propices à ce type d’événements météorologiques extrêmes et imprévisibles. M. Chelmouni souligne également que la répartition géographique de ces pluies est déséquilibrée, ce qui peut être bénéfique pour certains secteurs comme l’agriculture, mais problématique pour d’autres, notamment lorsque les barrages sont déjà remplis. S’agissant des prévisions pour l’hiver prochain, les modèles saisonniers prévoient un léger déficit pluviométrique par rapport aux normales dans certaines régions du Nord et du Grand Sud. Les températures devraient quant à elles être globalement saisonnières, avec une différence positive légère par rapport aux moyennes climatiques, explique le même responsable. Néanmoins, l’intervenant de l’ONM insiste sur le fait que l’Algérie enregistre de plus en plus de phénomènes météorologiques extrêmes, en raison de sa situation géographique à l’interface de la Méditerranée, connue pour être une région de cyclogenèse, et du climat tropical du Sud. L’augmentation de 1°C de la température moyenne s’accompagne d’une hausse d’environ 7% de l’humidité, facteur aggravant pour ce type d’événements. C’est dans ce contexte que s’inscrivent les efforts de l’Algérie pour renforcer ses capacités de prévision et d’anticipation des phénomènes météorologiques extrêmes. La coordination renforcée entre les différentes administrations et agences concernées, à l’image du projet d’alerte précoce contre les inondations, est un élément clé pour relever ce défi majeur lié au changement climatique.
Salim Amokrane