Sahel : Le ton monte entre le Niger et le Nigeria
Les tensions diplomatiques entre le Nigeria et le Niger ont atteint un nouveau pic. Le ministère des Affaires étrangères du Nigeria a publié samedi un communiqué rejetant fermement les accusations portées par son voisin nigérien concernant son prétendu rôle dans la déstabilisation du pays.
Le gouvernement fédéral nigérian a « réfuté les allégations des autorités nigériennes selon lesquelles le groupe terroriste Lakurawa, avec l’aide des forces de sécurité étrangères, notamment nigérianes, serait responsable de l’attaque de l’oléoduc Niger-Benin le 13 décembre 2024 à Gaya, dans la région de Dosso au Niger ». Tout en présentant ses condoléances pour cette attaque, le Nigeria a tenu à préciser que « les auteurs de cet attentat n’ont été ni soutenus ni assistés par les autorités nigérianes ».
L’escalade diplomatique s’est manifestée lorsque le ministre nigérien des Affaires étrangères, Bakary Yaou Sangaré, a convoqué la chargée d’affaires de l’ambassade du Nigeria à Niamey. Selon les informations rapportées par la télévision publique nigérienne, le ministre a exprimé les regrets des autorités de son pays de constater que « le Nigeria n’a toujours pas renoncé de servir de base arrière à la déstabilisation du Niger ». Le Niger dénonce également la présence sur le sol nigérian de partisans des anciennes autorités nigériennes et de bases étrangères qualifiées d' »hostiles » au Niger. Le porte-parole du ministère nigérian des Affaires étrangères, Kimiebi Imomotimi Ebienfa, s’est dit « très inquiet » de ces propos, déclarant « catégoriquement qu’il n’y a pas de militaires français dans le nord du pays qui se préparent à déstabiliser le gouvernement du Niger », et qualifiant ces accusations d' »infondées » devant être « totalement ignorées ».
Cette crise diplomatique intervient dans un contexte régional déjà tendu, marqué par la décision « irréversible » du Niger, du Mali et du Burkina Faso de quitter la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), annoncée le 13 décembre lors d’une réunion ministérielle entre les trois pays. Ces États, regroupés au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES), accusent l’organisation régionale d’être instrumentalisée par l’ancienne puissance coloniale française. Les relations entre le Niger et le Nigeria s’étaient pourtant momentanément améliorées après la levée fin février des sanctions de la CEDEAO, dont le président nigérian Bola Tinubu assure actuellement la présidence. Un rapprochement qui s’était même traduit, fin août, par une rencontre des chefs d’état-major des armées des deux pays à Niamey pour discuter d’une coopération militaire commune. La détérioration des relations entre les deux voisins remonte au coup d’État du 26 juillet 2023 au Niger. Les autorités militaires nigériennes avaient dénoncé le mesures prises par le Nigeria dans l’application des sanctions de la CEDEAO, notamment la fermeture des frontières aériennes et terrestres, et la coupure de l’approvisionnement en électricité dont le Nigeria est le principal fournisseur. Le soutien affiché par les autorités nigérianes à une possible intervention militaire pour rétablir le président déchu Mohamed Bazoum avait également contribué à tendre les relations entre les deux pays.
R.I.