Voyage musical entre Béchar et Tamanrasset : El Ferda et Imerhane enchantent l’Opéra d’Alger
L’Opéra d’Alger Boualem-Bessaih a vibré lundi soir aux rythmes authentiques et envoûtants des Ensembles « El Ferda » de Béchar et « Imerhane » de Tamanrasset qui ont offert au public algérois un voyage musical d’exception, traversant les vastitudes du Sahara pour faire découvrir ou redécouvrir des traditions séculaires sublimées par une interprétation contemporaine. Organisée sous l’égide du ministère de la Culture et des Arts dans le cadre du programme artistique et culturel « spécial-Ramadhan » de l’Opéra d’Alger, cette soirée a mis en lumière la richesse et la diversité du patrimoine musical algérien, témoignant de la vitalité de ces expressions culturelles régionales qui continuent de séduire un public intergénérationnel. La première partie du spectacle a transporté l’assistance dans l’univers envoûtant du Melhoun de la région de Kenadsa, portée par la formation El Ferda. Sous la direction de Larbi Bestam, virtuose du luth et chanteur charismatique, l’ensemble de sept musiciens a déployé pendant une heure un répertoire riche et varié mêlant avec maestria Q’çid soufi, Chaâbi et M’dih. Les spectateurs ont rapidement succombé au charme des compositions interprétées avec passion par cette formation qui fait la fierté de Béchar depuis plusieurs décennies. La magie opérait pleinement lorsque résonnaient dans la salle des titres phares comme « El Kawtar », « Krim El Kourama », « Kif iwassi », « Salamou » et l’incontournable « Ben Bouziane », suscitant l’enthousiasme d’un public conquis. L’ensemble, composé d’artistes talentueux tels que El Hadj Bouhazma au Guenibri, Touhami Bouhazma aux percussions traditionnelles (derbouka et bendir), Abd-Rabbi Bouhazma au violon et Lakhdar Hamidi aux percussions typiques de la région (mehraz et El Ferda), a démontré une cohésion parfaite et une maîtrise impressionnante de ce patrimoine musical exigeant. À l’issue de sa prestation, Larbi Bestam n’a pas caché son émotion : « C’est une immense joie pour nous, les membres d’El Ferda, de retrouver Alger et de chanter pour son public chaleureux et si accueillant ». Créée en 1992, la troupe El Ferda poursuit inlassablement son travail de préservation et de valorisation du Melhoun de Kenadsa, avec à son actif un album éponyme et plusieurs enregistrements produits par l’Office national des Droits d’auteur et des Droits voisins (ONDA). Comme l’a précisé Larbi Bestam, la formation continue « d’explorer le répertoire musical de cette région, en quête de nouveaux textes et Q’çid, pour raviver et promouvoir le patrimoine culturel local et mettre en valeur les particularités, poétique, mélodique et rythmique, propres à ce genre de musique ». La deuxième partie de la soirée a transporté le public vers les étendues infinies du Sahara avec l’Ensemble « Imerhane ». Accueilli par des applaudissements et des youyous nourris, le groupe dirigé par Seddam, à la guitare électrique et au chant, a immédiatement imposé sa présence scénique magnétique. Accompagné par Hichem Bouhas alternant entre guitare électro-acoustique et batterie, Habib Allah Akhamoukh à la calebasse, Tahar Khaldi à la basse électrique et Abdelkader Ourzik à la guitare d’accompagnement, le quintet a brillamment interprété le genre targui « Assoufi » de la région de Tamanrasset. Durant une heure, des titres aux mélodies envoûtantes et aux cadences ternaires caractéristiques comme « Dounya », « Tiguettane », « Assouf » (nostalgie), « Achenkadh » (gazelle), « Iresligh » (ouï-dire), « Touchal » (coureur), « Imerhane » (les amis), « Tinaghit », « Tagh’dert » (trahison) et « Soumagh » (je me suis tu) ont créé une atmosphère euphorique où tradition et modernité se sont harmonieusement entrelacées. Issue du célèbre groupe « Tinariwine », la formation « Imerhane » a été fondée en 2006 sous l’impulsion du bassiste Eyadou, qui a formé et encadré à Tamanrasset de nombreux musiciens, dont Seddam, aujourd’hui leader du groupe. Fort d’une reconnaissance nationale et internationale, l’ensemble a déjà participé à plusieurs tournées à travers les plus grandes capitales du monde et compte à son actif trois albums : « Imerhane » (les amis – 2006), « Timit » (lien ombilical – 2018) et « Abougui » (Z’riba – 2021). La complicité évidente entre les musiciens et le public, qui reprenait en chœur les refrains de leurs chansons, témoignait de l’impact émotionnel et de la résonance culturelle profonde de cette musique. Les deux formations ont ainsi pleinement réussi leur mission en offrant aux spectateurs une soirée exceptionnelle, célébrant la richesse et la diversité du patrimoine musical algérien dans toute sa splendeur. L’Opéra d’Alger poursuit son programme d’animation spécial-Ramadhan avec plusieurs plateaux artistiques variés, dédiés à tous les genres musicaux algériens, des plus classiques aux variétés contemporaines.
M.S.