Quel impact sur l’économie algérienne ?
La décision fracassante du président américain Donald Trump d’imposer de nouvelles taxes douanières à l’échelle mondiale a provoqué une onde de choc considérable sur les marchés internationaux. Annoncée le 2 avril 2025, cette mesure protectionniste sans précédent touche plus de 180 pays et territoires, dont l’Algérie, qui voit désormais ses produits exportés vers les États-Unis taxés à hauteur de 30%, contre 18,9% auparavant. Une hausse justifiée, selon l’administration américaine, par les droits de douane de 59% que l’Algérie imposerait sur les produits américains et par son excédent commercial avec les États-Unis. Les échanges commerciaux entre l’Algérie et les États-Unis représentaient 3,5 milliards de dollars en 2024, avec des exportations algériennes vers le marché américain s’élevant à environ 2,5 milliards de dollars, contre des importations de produits américains estimées à 1 milliard de dollars. En 2023, selon l’Office national des statistiques (ONS), les exportations algériennes vers les États-Unis s’élevaient à 411 milliards de dinars (3,09 milliards de dollars), tandis que les importations atteignaient 190,5 milliards de dinars (1,43 milliard de dollars), plaçant ainsi les États-Unis au 8ème rang des fournisseurs de l’Algérie, loin derrière la Chine, la France et l’Italie. Si ces nouvelles taxes douanières risquent d’affecter certains secteurs d’exportation algériens, leur impact direct reste à relativiser. Les produits pétroliers bruts ou raffinés, qui constituent l’essentiel des exportations algériennes vers les États-Unis, demeurent exonérés de ces nouvelles taxes. En revanche, d’autres produits comme les barres de fer forgées, les engrais azotés et les ciments seront vraisemblablement concernés par cette mesure protectionniste. L’Algérie exporte également vers le marché américain une soixantaine de produits en moindre quantité, allant des produits agricoles et agroalimentaires (huile d’olive, avocats, tomates, confitures, chocolats) aux produits industriels (transformateurs électriques, pièces électroniques, pneumatiques), qui pourraient tous subir l’impact de cette hausse tarifaire.
Baisse des prix du pétrole
Cependant, le véritable danger pour l’économie algérienne ne réside pas tant dans l’effet direct des tarifs douaniers que dans les conséquences indirectes de cette guerre commerciale mondiale sur les cours du pétrole. En effet, le prix du Brent, référence pour le pétrole algérien, s’est effondré ces derniers jours pour atteindre 65,29 dollars le baril le 4 avril, son niveau le plus bas depuis avril 2021 et la fin de la pandémie de Covid-19. Cette chute vertigineuse de 6,50% en une seule journée, après une baisse similaire la veille, traduit l’inquiétude des marchés quant à un ralentissement de la demande mondiale dans un contexte de tensions commerciales entre les principales puissances économiques. Cette situation est particulièrement préoccupante pour l’Algérie dont l’économie reste fortement dépendante des hydrocarbures. En 2023, selon l’ONS, les hydrocarbures représentaient encore 90% du total des exportations algériennes, soit 49,3 milliards de dollars. La riposte chinoise, annonçant des droits de douane supplémentaires de 34% sur les produits américains dès le 10 avril, ne fait qu’exacerber les craintes d’un ralentissement économique mondial généralisé. D’autant plus que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (OPEP+) a surpris les marchés en annonçant une augmentation de sa production de 411.000 barils par jour en mai 2025, alors que les analystes anticipaient une hausse plus modeste de 135.000 barils quotidiens. Cette décision, combinée aux tensions commerciales, fait craindre une surabondance de l’offre sur le marché mondial du pétrole et pourrait conduire à une poursuite de la baisse des cours dans les semaines à venir.
Si les exportations vers les États-Unis (qui ne représentent que 4,4% des exportations algériennes globales en 2023) pourraient être marginalement affectées par les nouvelles taxes douanières, c’est bien l’effondrement des cours du pétrole qui constitue la plus grande grande source d’inquiétude pour la balance commerciale, alors que l’Europe reste de loin le principal partenaire commercial de l’Algérie avec 75% de ses exportations, dont 64% vers l’Union européenne en 2023.
Sabrina Aziouez