Pétrole: Volatilité accrue sur les marchés
Le marché pétrolier connaît des fluctuations importantes reflétant la complexité des facteurs géopolitiques et économiques qui influencent actuellement les cours. Entre négociations commerciales sino-américaines, augmentation de la production de l’OPEP+ et évolution des stocks américains, les investisseurs peinent à déterminer une tendance claire, générant une volatilité significative sur les marchés énergétiques mondiaux. Cette instabilité s’est traduite par des variations de prix notables au cours même de la journée d’hier, illustrant parfaitement les tensions qui traversent actuellement le secteur pétrolier international. En matinée, les cours affichaient une hausse sensible avant de s’orienter à la baisse en fin de journée, témoignant des incertitudes persistantes qui caractérisent le marché.
L’annonce d’une rencontre ce week-end en Suisse entre représentants chinois et américains pour jeter les bases de négociations commerciales a initialement soutenu les cours. Cette première rencontre depuis l’imposition par Donald Trump de droits de douane conséquents sur les produits chinois et la riposte de Pékin est perçue comme un potentiel facteur de stabilisation. Les deux pays, qui s’imposent depuis avril des droits de douane très importants, représentent les deux plus grands consommateurs mondiaux de pétrole. Une amélioration de leurs relations commerciales serait donc synonyme d’une demande potentiellement plus soutenue, ce qui explique la réaction positive initiale du marché. Vers 09H15 GMT, le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet enregistrait ainsi une hausse de 0,77% à 52,63 dollars, tandis que son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate (WTI) pour livraison en juin, gagnait 0,95% à 59,65 dollars.
Cependant, l’optimisme des investisseurs s’est rapidement heurté à d’autres facteurs baissiers, notamment l’augmentation significative de la production de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés (OPEP+) prévue pour juin. L’Arabie saoudite, en collaboration avec la Russie et six autres membres de l’OPEP+, a annoncé qu’elle réduirait les coupes volontaires produirait et 411.000 barils supplémentaires par jour en juin, soit une augmentation bien supérieure aux 137.000 barils initialement prévus. Cette décision affecte toujours le marché avec un retournement de tendance, le Brent perdant 0,87% à 61,61 dollars vers 15H25 GMT, tandis que le WTI limitait sa progression à 0,73% à 58,66 dollars.
En parallèle, les négociations entre les États-Unis et l’Iran concernant le programme nucléaire de Téhéran semblent progresser favorablement. Le vice-président américain JD Vance a estimé mercredi que ces discussions étaient sur la « bonne voie », laissant entrevoir la possibilité d’un allègement des sanctions qui pèsent actuellement sur le secteur pétrolier iranien. L’Iran, qui figure parmi les dix premiers producteurs mondiaux d’or noir, pourrait ainsi voir ses exportations facilitées, ce qui constitue un facteur baissier supplémentaire pour les cours.
La publication hebdomadaire des stocks de pétrole américains a également contribué à la volatilité du marché. L’Agence américaine d’information sur l’énergie (EIA) a fait état d’une baisse légèrement plus importante qu’anticipé des réserves commerciales de brut, qui ont diminué d’environ 2 millions de barils lors de la semaine achevée le 2 mai, contre une prévision de 1,9 million de barils. Les stocks ont ainsi atteint 438,4 millions de barils, hors réserve stratégique. Cette réduction, attribuable à une activité accrue des raffineries américaines, constitue théoriquement un facteur de soutien pour les prix, mais son impact est resté limité face aux préoccupations relatives à l’offre mondiale.
La question de la production américaine demeure également centrale dans l’équation pétrolière actuelle. Plusieurs analystes, dont Arne Lohmann Rasmussen de Global Risk Management, soulignent que « les prix actuels du pétrole n’incitent guère à forer à tout-va aux États-Unis », contrairement aux souhaits exprimés par Donald Trump. Avec un baril de WTI oscillant autour de 60 dollars, niveau souvent considéré comme un seuil de rentabilité en dessous duquel « l’expansion de la production devient économiquement non viable » selon Ole Hansen, analyste de Saxo Bank, la perspective d’une production américaine moins dynamique pourrait constituer un facteur de soutien pour les cours à moyen terme. Cette hypothèse semble d’ailleurs se confirmer avec l’entreprise Diamondback Energy, spécialisée dans l’exploration et la production de pétrole dans le bassin permien, qui a récemment revu à la baisse ses prévisions de production et mis en garde contre une diminution prochaine des activités de forage.
Face à ces éléments contradictoires, le marché pétrolier devrait continuer à faire preuve d’une volatilité significative dans les jours à venir.
Sabrina Aziouez