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Trafic de foncier à Alger : 30 prévenus devant le tribunal correctionnel

Parmi les prévenus figurent des conservateurs fonciers et des employés des directions de conservation de la wilaya d’Alger, accusés de falsification de documents administratifs et de registres fonciers officiels, d’imitation et de falsification d’écritures et signatures dans des registres officiels, de blanchiment d’argent, entre autres lourdes accusations.

Pas moins 30 accusés ont comparu hier mardi, devant la cour criminelle d’Alger dans une affaire de trafic de foncier, apprend-on de source judiciaire. Sont impliqués dans ce scandale de gros calibre des conservateurs fonciers et des employés activant dans les différentes conservations foncières d’Alger, selon les informations apportées par la même source. Celle-ci a fait savoir que les 30 prévenus sont accusés de trafic foncier, en particulier dans les quartiers huppés de la capitale. Des zones où, après manipulation frauduleuse et falsification des registres fonciers remontant à l’époque coloniale (1960-1962), la parcelle de terrain était vendue à des sommes avoisinant les 30 milliards de centimes.

Opérant dans le cadre d’un réseau bien organisé, les mis en cause se sont appropriés des terrains domaniaux après la falsification des documents, en inscrivant des superficies et des numéros dans des actes, sous le titre d’« affectation ». Ces terrains qu’ils avaient illégalement détournés de manière systématique étaient vendus à des personnes qui étaient en réalité victimes d’escroquerie. La mise à nu de ce scandale, selon les détails fournis par la même source, résulte d’informations parvenues aux services de la brigade économique et financière de la sûreté d’Alger, concernant des soupçons de dépassements et violations au niveau des registres fonciers de la wilaya.

Aussitôt informé, le procureur de la République près le tribunal de Sidi M’hamed a ordonné l’ouverture d’une enquête élargie et approfondie. Les investigations menées ont révélé que, lors du contrôle des registres fonciers qui a ciblé toutes les conservations foncières de la wilaya d’Alger, de nombreux actes falsifiés ont été découverts. Au niveau des conservations foncières de Bir Mourad Raïs, 13 actes notariés publiés durant la période coloniale (1961-1962) ont été identifiés. Ces actes, pour lesquels 12 cartes foncières ont été établies, ont été remplacés par d’autres falsifiés, intégrés dans les registres de publication foncière de la conservation foncière d’Alger-centre.

Il a également été révélé que sur les 13 actes falsifiés, 6 ont été traités et ont fait l’objet de procédures de transfert de propriété et de publication foncière, tandis que 7 autres n’ont pas été transférés mais ont été dotés de cartes foncières falsifiées. Dans le cadre de l’enquête des services de sécurité, il a été découvert, nous dit-on, que la majorité des actes falsifiés concernent des terrains situés dans la région de Saha (Ouest d’Alger), à l’image de l’acte notarié publié en 1961 au nom de B. Khaled pour un terrain de 30 hectares, et un autre en 1962 au nom de S. Khadija pour 900 m². Pendant que L. Zohir a bénéficié d’un terrain d’un hectare et 60 m², avec un acte publié en 1962. De leur côté, B. Fatouma et H. Hasina ont bénéficié de 1250 m² et 70 ares, en 1960, à partir d’actes notariés et publiés en une seule année. Ces agissements et dépassements, selon notre source, ne sont que l’arbre qui cache la forêt.

Concernant les actes notariés publiés dont la falsification a été découverte par la cellule d’enquête mise en place par la direction de la conservation foncière, les enquêteurs de cette cellule, après la découverte du premier cas de falsification impliquant le suspect (A. Djamel), se sont rapprochés en janvier 2017 et ont examiné plusieurs registres d’actes de propriété publiés, en se concentrant sur les petits registres. Car, nous explique-t-on, ces derniers sont plus faciles à manipuler pour retirer n’importe quel acte du registre et le remplacer par une copie falsifiée, portant les noms de l’acheteur et du vendeur, en utilisant la référence et la date de l’acte original authentique qui est ensuite détruit.

Il a également été découvert 20 actes falsifiés intégrés dans 17 registres. Outre cela, les membres du réseau modifiaient aussi le contenu des actes dans les registres originaux au niveau même de la direction centrale de conservation foncière à Alger, en créant de faux actes pour les insérer dans les registres authentifiés, notamment ceux allant de 1961 à 1962. Il a également été constaté des manipulations flagrantes du tableau descriptif pour la division des propriétés et des terrains relevant de la propriété de l’État. Des agissements aboutissant à la création de subdivisions fictives, afin de pouvoir détourner des biens et du foncier de l’État, avec la complicité de responsables au sein des conservations foncières de la wilaya d’Alger.

À l’issue de l’enquête et de l’instruction, le dossier de ce scandale qui a défrayé la chronique a été transféré vers la justice. Comparaissant hier mardi devant la barre, les 30 prévenus, dont des femmes, font face à de lourds chefs d’accusation. Car ils sont poursuivis pour falsification de documents officiels, imitation et falsification d’écritures et de signatures, création de faux accords, faux et usage de faux de documents officiels falsifiés, escroquerie, blanchiment d’argent via la transformation d’actifs issus d’activités criminelles pour dissimuler leur origine illicite, abus de fonction avec violation des lois pour obtenir des avantages indus, complicité dans l’abus de fonction, pratique de la falsification de documents officiels, usage de documents falsifiés, modification illégale de documents de registres publics officiels, déclaration de fausses informations à un agent public, ainsi que l’enrichissement illicite, entre autres accusations retenues.

SOFIA CHAHINE

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