Économie

Cybersécurité : Les entreprises algériennes mal-préparées face aux menaces

La transformation digitale accélérée des entreprises algériennes révèle une vulnérabilité critique que les experts n’hésitent plus à qualifier d’enjeu de souveraineté économique. Réunis samedi à Alger lors d’un atelier organisé par l’Union algérienne des sociétés d’assurance et de réassurance et l’Association des anciens de l’Institut de l’économie douanière et financière, professionnels et spécialistes ont tiré la sonnette d’alarme sur l’insuffisance des dispositifs de protection face à la sophistication croissante des cybermenaces. Le constat est sans appel : les entreprises algériennes, particulièrement dans le secteur financier, naviguent dans un environnement numérique hostile sans équipement de protection adéquat. « Le renforcement de la résilience des systèmes d’information constitue un enjeu stratégique pour tous les secteurs, en particulier celui des finances, marqué par l’interconnexion des systèmes, le développement des moyens de paiement et la gestion d’une grande masse de données », a souligné Youcef Benmicia, président de l’UAR. Cette réalité expose les institutions à des risques multiples : « attaques par logiciels malveillants, sabotage des systèmes ou encore vol de données, pouvant entraîner des interruptions d’activité ou des pertes financières ».

La solution préconisée par les experts repose sur la création de Centres des opérations de sécurité (SOC) au sein de chaque entreprise. Mourad Sidane, PDG de la Société industrielle algérienne de télécommunications, insiste sur cette nécessité : il faut « anticiper les risques tels que le piratage, le vol de données ou les demandes de rançon, à travers la mise en place de SOC dans chaque entreprise, particulièrement dans le secteur financier ». Ces centres, « animés par des analystes et des ingénieurs en sécurité, disposent d’outils de surveillance leur permettant de détecter, analyser et prévenir les attaques informatiques ».

L’approche défendue va bien au-delà de la simple protection individuelle des entreprises. Les intervenants prônent une coordination nationale de ces structures pour former un véritable « bouclier digital contribuant à la protection de l’économie nationale ». Cette vision systémique reflète une prise de conscience : dans l’économie numérique, la cybersécurité n’est plus un coût mais un investissement stratégique indispensable à la compétitivité et à la survie des entreprises.

Le défi humain représente un autre volet crucial de cette transformation. Bouchera Bibi Triki, consultante en TIC, met l’accent sur « la nécessité de prévenir les cyber-risques internes par la sensibilisation et la formation du personnel ». Car si les attaques externes mobilisent l’attention, les failles humaines représentent souvent le maillon faible de la chaîne sécuritaire. L’adoption de « politiques de sécurité alignées sur les objectifs stratégiques des entreprises » devient donc impérative.

Cette mobilisation intervient dans un contexte où l’Algérie dispose déjà d’un cadre juridique en matière de cybersécurité, salué par les participants. Cependant, la réglementation ne suffit pas. Comme le rappelle Sidane, « la sécurité informatique relève de la responsabilité de chaque entreprise, tout en devant être confiée à des spécialistes ». Cette responsabilisation des acteurs économiques marque un tournant dans l’approche algérienne de la cybersécurité.

L’enjeu dépasse la simple protection des données. Dans un contexte de « transition vers le numérique » où les entreprises algériennes cherchent à rattraper leur retard technologique, la cybersécurité conditionne leur capacité à saisir les opportunités du marché digital tout en préservant leur intégrité opérationnelle. Les experts appellent donc à « l’adoption d’une approche stratégique » intégrant « des mesures de prévention et de protection, des plans de continuité d’activité et des solutions d’assurance adaptées ». Cette approche globale de gestion des cyber-risques devient le prérequis d’une économie numérique sécurisée et competitive.

Sabrina Aziouez

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