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Amar Bendjama à l’ONU : Le Sahara occidental « demeure une question de décolonisation »

L’ambassadeur Amar Bendjama, représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations unies, a livré une intervention ferme lors de la session du Comité de décolonisation de l’ONU (C-24) consacrée mardi à la question du Sahara occidental. 

Le diplomate algérien a réaffirmé avec force que cette question « demeure une question de décolonisation » qui oppose directement le Maroc au Front Polisario, appelant à la reprise « immédiate et substantielle » des négociations directes entre les parties au conflit. Dans son discours prononcé depuis New York, l’ambassadeur Bendjama a souligné que la question du Sahara occidental « ne souffre d’aucune ambiguïté » et constitue clairement un enjeu de décolonisation impliquant le royaume marocain et le mouvement de libération sahraoui. Le représentant algérien a exprimé sa consternation face au fait qu’après six décennies de débats à l’Assemblée générale des Nations unies, le référendum d’autodétermination promis au peuple sahraoui n’ait toujours pas eu lieu, malgré la résolution 2229 qui réaffirme ce droit fondamental avec la plus grande fermeté.

Le diplomate a rappelé l’ancienneté de cette question en soulignant que le Sahara occidental, dernier territoire africain non autonome, figure à l’ordre du jour onusien depuis 1963. Fort de son expérience , l’Algérie « a terriblement souffert » de la colonisation, « soutient résolument les causes justes » et exhorte l’ONU à « agir avec détermination pour éliminer les derniers vestiges du colonialisme ». L’ambassadeur Bendjama a également déploré les difficultés rencontrées par la Mission des Nations Unies pour l’Organisation du Référendum au Sahara occidental (MINURSO), établie il y a près de quatre décennies par le Conseil de sécurité, qui « peine encore à accomplir son mandat » d’organisation du référendum.

Sur le plan juridique, le représentant algérien a rappelé la clarté des éléments du droit international, citant notamment l’avis consultatif historique de la Cour internationale de justice de 1975 qui « a formellement exclu tout lien juridique entre le Sahara occidental et le Maroc » susceptible d’affecter l’application de la résolution 1514 sur l’octroi de l’indépendance aux pays et peuples colonisés. Il a également mentionné la récente décision de la Cour de justice européenne qui, en octobre 2024, a réaffirmé ce statut en annulant un accord de pêche entre l’Union européenne et le Maroc pour défaut de consultation du peuple sahraoui.

Concernant la situation des droits humains dans les territoires sahraouis occupés, l’ambassadeur Bendjama a cité plusieurs points alarmants relevés dans le rapport du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, notamment l’encadrement policier, les détentions arbitraires, l’interdiction de visites et l’expulsion de parlementaires européens, ainsi que l’expulsion des rapporteurs onusiens et des journalistes. « Tout ce passe en vase clos », a-t-il déclaré, encourageant le Comité des 24 à mobiliser tous ses instruments pour protéger les droits du peuple sahraoui et parachever ce processus de décolonisation.

Le C24 plaide pour l’autodétermination 

Plusieurs intervenants ont appuyé la position algérienne lors de cette session du C-24, plaidant avec conviction pour le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui. L’Afrique du Sud a notamment souligné que la résolution du conflit doit se faire conformément à la légalité internationale, dénonçant les initiatives opportunistes de certaines parties. « Ce n’est pas l’opportunisme politique qui doit fonder une solution au Sahara occidental, mais plutôt la légalité internationale », a affirmé le représentant sud-africain. Kathleen Thomas, représentante de l’ONG Global Directives LLC, a insisté sur le fait que l’organisation d’un référendum d’autodétermination constitue la seule solution viable à ce conflit, affirmant que « le plan marocain n’offre aucune autonomie réelle et perpétue le statu quo ». Chris Sassi, représentant de l’ONG SKC, a rappelé l’adoption par l’Assemblée générale de l’ONU en décembre d’une résolution réitérant le statut de territoire non autonome du Sahara occidental, tout en soulignant la décision de la Cour de justice européenne jugeant que les accords commerciaux et de pêche entre l’UE et le Maroc ne peuvent s’appliquer au territoire sahraoui. L’activiste sahraouie Nayat Aduh Jatri a pour sa part insisté sur le fait que selon l’ONU, « le Sahara occidental reste un territoire non autonome avec un processus de décolonisation inachevé et un peuple sahraoui sous occupation ». Elle a qualifié le territoire de « dernière colonie d’Afrique » malgré les résolutions onusiennes et les décisions de l’Union africaine, plaidant pour que la question reste à l’ordre du jour jusqu’à l’exercice effectif du droit à l’autodétermination. Mohammed Abbadi, représentant de l’ONG FreedomSun Organization, a dénoncé les manœuvres du régime marocain, révélant que depuis janvier 2025, quelque 25 observateurs internationaux ont été interdits d’entrée dans le territoire occupé pour évaluer la situation des droits humains.

L’ambassadeur Bendjama a conclu son intervention en affirmant qu’une seule voie s’ouvre désormais : « la reprise immédiate des négociations directes et substantielles entre le Maroc et le Front Polisario pour une solution juste et durable garantissant l’autodétermination du peuple du Sahara occidental ».

Lyes Saïdi

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