L’Algérie affiche des objectifs climatiques ambitieux: L’hydrogène vert et l’IA pour révolutionner le modèle énergétique
Oran accueillela 12e édition des Journées scientifiques et techniques de Sonatrach, avec pour ambition de faire de l’Algérie un hub technologique des énergies propres d’ici 2030.
Réunis à Oran pour la 12e édition des Journées scientifiques et techniques de Sonatrach, près de 1000 experts de 32 pays dessinent les contours d’une révolution industrielle sans précédent au Maghreb. L’enjeu dépasse largement les frontières algériennes : il s’agit de repositionner tout le continent africain sur l’échiquier énergétique mondial face aux géants asiatiques et européens. Le signal est donné dès l’ouverture par Rachid Hachichi, PDG de Sonatrach, qui dévoile une feuille de route aussi audacieuse que nécessaire. « Réduire les gaz torchés à 1% d’ici 2030 et faire passer le taux d’émissions fugitives de méthane dans nos installations gazières à moins de 3% », annonce-t-il, transformant ainsi le géant pétrolier en laboratoire grandeur nature de la transition énergétique africaine. Cette ambition s’appuie sur une nouvelle politique climatique adoptée en février 2025, révélant l’urgence avec laquelle l’Algérie entend rattraper son retard technologique.
La stratégie algérienne repose sur un pari technologique majeur : l’intelligence artificielle appliquée au secteur énergétique. Hachichi précise que Sonatrach œuvre à « intégrer l’intelligence artificielle, l’internet des objets et l’analyse des méga-données dans toutes les chaînes de valeur ». Cette digitalisation massive vise à transformer radicalement les processus de production, avec l’IA permettant désormais « la prévision des réserves, la maintenance préventive et la réduction des coûts d’exploitation ». Une révolution silencieuse qui place l’Algérie en concurrence directe avec les leaders mondiaux du secteur.
L’hydrogène vert émerge comme le second pilier de cette transformation. Noureddine Yassaa, Secrétaire d’État aux Énergies renouvelables, révèle qu’une journée entière des JST sera consacrée à cette filière stratégique. L’Algérie développe progressivement une stratégie nationale fondée sur « la création d’un environnement favorable, le développement du capital humain, les mécanismes de financement, ainsi que la promotion du partenariat et de la coopération internationale ». Cette approche méthodique contraste avec l’improvisation qui a longtemps caractérisé les politiques énergétiques du pays.
La dimension géopolitique de cette mutation ne doit pas être sous-estimée. Yassaa souligne que « l’Algérie, riche en ressources fossiles et renouvelables, fait face à un double défi : répondre à la demande croissante d’énergie liée à la croissance démographique tout en respectant ses engagements internationaux dans la lutte contre le changement climatique ». Cette équation complexe force le pays à innover rapidement pour maintenir sa position de fournisseur énergétique majeur de l’Europe.
Consolider l’intégration industrielle
L’enjeu industriel se cristallise autour de la souveraineté technologique. Yassaa insiste sur le fait que « des initiatives concrètes, telles que la production locale de panneaux solaires photovoltaïques, constituent une première étape vers la fabrication d’équipements d’énergie renouvelable ». Cette approche de localisation des chaînes de valeur répond à une nécessité stratégique : éviter la dépendance technologique qui a handicapé tant de projets énergétiques africains.
Les startups constituent le troisième levier de cette transformation. Selon Yassaa, « grâce à l’innovation dans les domaines des énergies renouvelables, du stockage, des réseaux intelligents et de la gestion intelligente de l’énergie, ces startups contribuent non seulement à la diversification du mix énergétique, mais aussi à la réduction de la dépendance aux hydrocarbures ».
La dimension financière de cette mutation reste considérable. Hachichi rappelle que « le secteur pétrolier et gazier mondial a investi près de 1000 milliards de dollars en 2023 dans l’exploration et le développement, dont environ 15% désormais destinée aux technologies numériques et aux solutions à faible émission de carbone ». L’Algérie doit donc mobiliser des ressources massives pour ne pas rater ce virage technologique crucial.
Placées sous le thème : « L’énergie de l’innovation technologique », ces journées, organisées sous le haut patronage du président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, regroupent de nombreux spécialistes du secteur énergétique pour débattre des défis et opportunités liés aux énergies renouvelables. Les Journées scientifiques et techniques de Sonatrach se sont imposées comme une plateforme de réflexion collective regroupant les meilleures compétences du groupe pour échanger, collaborer et construire ensemble l’avenir de l’industrie énergétique, selon les organisateurs. Près de 1.000 participants de 32 pays prennent part à ces JST, qui comprendront plus de 400 interventions orales et affichées, ainsi que 6 ateliers. A noter qu’en marge de ces JST, deux conférences de haut niveau seront organisées, à savoir le « National Energy Meeting », organisée en collaboration avec le Conseil National de la Recherche Scientifique et Technologies (CNRST) et l' »International Conference Green Hydrogen Algeria 2025″, au cours de laquelle sera présentée la stratégie nationale de développement de l’hydrogène en Algérie, ainsi que ses opportunités. Samira Ghrib