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La loi sur les données personnelles devant le Conseil de la nation : Les assurances de Lotfi Boudjemaa

Le texte vise à aligner la législation algérienne sur les normes internationales dans un contexte de recrudescence du crime organisé transfrontalier et de développement des échanges numériques.

Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa, a détaillé lundi devant les sénateurs les nouveaux mécanismes de protection des données à caractère personnel et le rôle renforcé de l’Autorité nationale de protection des données personnelles (ANPDP) lors de l’examen du projet de loi modifiant et complétant la loi 18-07. Ce texte, qui sera soumis au vote mardi au Conseil de la nation, vise à aligner la législation algérienne sur les normes internationales dans un contexte de recrudescence du crime organisé transfrontalier et de développement des échanges numériques. Répondant aux interventions des sénateurs sur ce projet de réforme, le ministre de la Justice a précisé les prérogatives élargies de l’ANPDP qui « s’attèlera à réguler la question de déclaration des données par tous les établissements ou secteurs ainsi que toutes les questions liées au traitement des données à caractère personnel ». Cette mission de régulation s’étend notamment aux flux transfrontaliers de données, une question cruciale à l’ère de la mondialisation numérique. Le garde des Sceaux a souligné que cette problématique englobe « l’opération de transfert des données en dehors du territoire national, qui ne peut se faire sans l’autorisation de l’Autorité », marquant ainsi un durcissement du contrôle sur les échanges internationaux d’informations personnelles.

Les missions de contrôle de l’ANPDP s’articulent autour de deux axes principaux selon les explications fournies par le ministre. L’Autorité sera habilitée à mener des enquêtes visant à vérifier la conformité des établissements à la loi et à réaliser des audits techniques pour s’assurer de la disponibilité des mécanismes de protection. Cette double approche, à la fois juridique et technique, témoigne de la volonté des pouvoirs publics d’adapter les instruments de contrôle aux défis posés par l’évolution technologique et la sophistication croissante des systèmes de traitement de données.

Le principe fondamental du consentement demeure au cœur du dispositif législatif. Après avoir rappelé que « le principe général interdit le traitement des données personnelles sans le consentement de la personne concernée », le ministre Boudjemaa a justifié les amendements apportés au texte de loi par la nécessité de s’aligner sur les normes internationales. Cette harmonisation législative vise à « relancer la coopération judiciaire internationale dans ses volets sécuritaire et judiciaire, notamment avec la hausse des affaires liées au crime organisé transfrontalier », a-t-il précisé, soulignant l’enjeu géopolitique de cette réforme dans la lutte contre la criminalité moderne. Le dispositif de protection se structure autour d’un système gradué de recours et de sanctions. En cas de violations constatées, le ministre a expliqué que « la loi protégeait le titulaire des données en lui permettant d’introduire un recours auprès du responsable du traitement concerné, puis une plainte auprès de l’Autorité nationale ». Cette procédure à deux niveaux privilégie d’abord la résolution amiable avant d’engager la responsabilité de l’autorité de régulation, témoignant d’une approche pragmatique de la résolution des conflits. L’architecture des sanctions répond à une logique de proportionnalité adaptée à la gravité des infractions. Le ministre Boudjemaa a détaillé un système à double détente où « la loi prévoit deux types de sanctions: celles infligées par l’autorité, allant de l’avertissement à l’amende, voire au retrait de l’autorisation, et la saisine du parquet général lorsque l’infraction revêt un caractère pénal ». Cette gradation permet une réponse modulée aux manquements, depuis la simple mise en garde jusqu’aux poursuites judiciaires pour les cas les plus graves.

La portée extraterritoriale de la loi constitue l’une des innovations majeures de cette réforme. Interrogé sur l’application du texte aux entreprises étrangères, le ministre a assuré que « la loi est appliquée à toute entité traitant des données à caractère personnel même si elle est domiciliée à l’étranger ». Cette disposition répond aux défis posés par la dématérialisation des services et l’implantation de géants du numérique qui collectent massivement des données d’utilisateurs algériens depuis l’étranger. Le garde des Sceaux a également souligné que « cette protection concerne également les données médicales », étendant ainsi le champ d’application à des informations particulièrement sensibles.

Cette extension du contrôle aux opérateurs étrangers s’inscrit dans une tendance mondiale de renforcement de la souveraineté numérique. En s’inspirant de modèles comme le Règlement général sur la protection des données européen, l’Algérie entend exercer sa juridiction sur tous les traitements de données concernant ses ressortissants, indépendamment du lieu d’implantation des responsables de traitement. Cette approche témoigne d’une prise de conscience des enjeux stratégiques liés à la protection des données personnelles dans un monde interconnecté. Hocine Fadheli

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